Une rencontre décisive aux Nations unies
Le 22 septembre, dans les couloirs de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, la maire de Paris Anne Hidalgo et le président Denis Sassou Nguesso ont tenu un long entretien. Au menu : consolider un dialogue historique entre les deux capitales francophones.
Au sortir de la réunion, les deux responsables ont fait état d’une volonté commune d’institutionnaliser leur coopération par un nouveau jumelage. Paris et Brazzaville, liées par l’histoire, entendent désormais inscrire leur relation dans le registre de la diplomatie des villes.
Un partenariat renouvelé entre les deux capitales
Le projet, encore au stade de la discussion, couvrirait plusieurs chantiers prioritaires. Anne Hidalgo évoque « un cadre formel, ambitieux, et surtout opérationnel ». Le chef de l’État congolais souligne pour sa part « l’importance de solutions partagées aux défis urbains ».
Cet accord moderniserait l’ancien jumelage établi en 2004 et resté symbolique. La nouvelle version veut s’appuyer sur des programmes mesurables, financements croisés et indicateurs de suivi pour éviter l’effet vitrine souvent reproché à ce type d’initiatives.
Selon l’entourage de la mairie de Paris, une lettre d’intention pourrait être signée avant la fin de l’année, ouvrant la voie à un plan d’action triennal présenté aux conseils municipaux respectifs.
L’écologie urbaine au cœur de l’agenda
Premier axe : verdir la ville. Paris met sur la table son expertise en végétalisation de toits, création de microforêts et gestion centralisée des déchets. Brazzaville, déjà engagée dans son programme « ville durable », ambitionne d’étendre ses couloirs verts jusqu’au fleuve.
« Nous voulons partager des méthodes, pas imposer un modèle », glisse une conseillère parisienne. Côté congolais, on souhaite adapter les solutions au climat équatorial, où la saison des pluies exige des infrastructures de drainage plus robustes.
Les équipes techniques étudient également l’agriculture urbaine. Des serres pédagogiques pourraient voir le jour dans les arrondissements de Makélékélé et de Bacongo, afin de rapprocher la production maraîchère des cantines scolaires.
Jeunesse et sport, leviers d’avenir
Le second pilier concerne les jeunes. Anne Hidalgo propose un programme d’échanges entre lycées, incluant un volet numérique pour que les élèves travaillent ensemble sans déplacements coûteux. La mairie de Brazzaville y voit un moyen de stimuler l’apprentissage des langues.
Sur le plan sportif, les deux villes songent à mutualiser les compétences acquises lors des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Techniciens, kinés et entraîneurs pourraient intervenir bénévolement auprès des centres de formation des Diables Noirs et de l’AS Cheminots.
Un mini-marathon Paris-Brazzaville, organisé simultanément sur les deux rives de la Seine et du Congo, fait partie des idées mises à l’étude pour 2025.
Un cadre multilatéral pour amplifier la coopération
Au-delà du face-à-face, le dossier passera par l’Association internationale des maires francophones. Brazzaville y joue déjà un rôle moteur, tandis que Paris en assure la vice-présidence. « L’AIMF offre un guichet de financement et un réseau d’expertise précieux », rappelle un responsable congolais.
Cette dimension multilatérale permettra d’intégrer d’autres villes partenaires, de Dakar à Montréal, et d’élargir la recherche de financements auprès de l’AFD ou du Fonds vert pour le climat.
Le secrétariat permanent de l’AIMF souhaite présenter le jumelage comme un projet pilote démontrant la contribution des collectivités aux objectifs de développement durable.
Des attentes locales à Brazzaville
À Mpila, quartier encore marqué par l’explosion de 2012, les habitants espèrent que la coopération accélérera la réhabilitation des espaces publics. « Nous manquons de jardins pour les enfants », confie Clarisse, commerçante.
Le gouverneur de la ville-département, Dieudonné Bantsimba, rappelle que la population brazzavilloise doublera probablement d’ici quinze ans. « Nous devons anticiper l’étalement urbain et créer des emplois verts », insiste-t-il.
Les acteurs économiques locaux, comme la Chambre de commerce, y voient déjà l’opportunité d’attirer des start-ups spécialisées dans le recyclage plastique ou la mobilité douce.
Prochaines étapes et calendrier pressenti
Les discussions techniques devraient se poursuivre en visioconférence dès octobre. Une mission exploratoire de la mairie de Paris est programmée à Brazzaville début novembre, avec ateliers participatifs et visites de terrain.
Si les délais sont tenus, la signature officielle pourrait intervenir lors du sommet des maires francophones prévu à Yaoundé au premier trimestre 2024. Un comité mixte suivrait ensuite l’exécution des projets.
Pour Anne Hidalgo, « cet accord prouvera que la diplomatie climatique se construit aussi à l’échelle des rues », tandis que Denis Sassou Nguesso affirme que « les villes africaines ont toute leur place dans la transition écologique mondiale ».