Une visite très attendue à Brazzaville
Brazzaville s’est réveillée en effervescence, ce 22 juillet, avec l’arrivée du Dr Mohamed Yakub Janabi, nouveau Directeur régional de l’Organisation mondiale de la Santé pour l’Afrique. Son premier déplacement officiel au Congo a rapidement attiré l’attention des professionnels et des observateurs sanitaires.
Accueilli par le représentant de l’OMS, le Dr Vincent Sodjinou, le visiteur a parcouru les couloirs du bureau pays, serrant des mains et saluant des visages familiers. L’image a donné le ton d’une visite placée sous le signe de la proximité.
Renforcer l’ancrage local de l’OMS
Devant l’ensemble du personnel, le Dr Janabi a qualifié la structure brazzavilloise de « modèle de fonctionnement à reproduire ». L’expression n’était pas gratuite; elle valorise le travail quotidien d’une équipe qui tente, parfois loin des caméras, de transformer les orientations globales en solutions locales.
Pour le directeur régional, le bureau doit « incarner l’excellence opérationnelle et le bien-être au travail ». Les agents sur place y voient un encouragement à poursuivre l’amélioration des procédures internes, qu’il s’agisse de la réactivité lors des alertes ou de la gestion transparente des ressources.
Priorité aux soins de santé primaires
Le Dr Janabi a réaffirmé un principe cher aux autorités congolaises : la santé primaire demeure la clef de voûte d’une couverture sanitaire universelle effective. Il s’agit, a-t-il souligné, « d’apporter le service de base jusque dans la dernière ruelle ».
Cette vision s’inscrit dans le Plan national de développement sanitaire 2023-2027, qui articule prévention, soins et financement adapté. Le ministère de la Santé, partenaire clé, table déjà sur un réseau renforcé de centres de santé intégrés, soutenus par les partenaires techniques et financiers.
Des résultats déjà visibles sur le terrain
Sur le terrain, plusieurs avancées concrètes sont citées : la campagne de vaccination contre la rougeole vient de dépasser 95 % de couverture dans les départements les plus peuplés, tandis qu’un protocole modernisé de prise en charge du paludisme simple commence à réduire les délais de traitement.
Les communautés frontalières bénéficient également d’un appui renforcé en eau, hygiène et assainissement, crucial pour prévenir les flambées diarrhéiques. « Nous constatons déjà une baisse des cas de choléra importés », explique le Dr Charlotte Oko, épidémiologiste au programme national de surveillance.
Leadership et mobilisation des ressources
Le leadership du Dr Sodjinou a été salué par son hôte qui l’a qualifié de « facilitateur de solutions » pour la mobilisation des partenaires. Grâce à des négociations discrètes, le bureau a obtenu de nouveaux financements ciblant la formation des sages-femmes et le renforcement des laboratoires provinciaux.
« Notre rôle est d’appuyer le gouvernement pour transformer chaque franc disponible en résultat mesurable », a rappelé le représentant résident. Cette approche axée sur la valeur pour l’argent répond aux impératifs d’une économie nationale encore en phase de diversification hors pétrole.
Vigilance face aux épidémies régionales
Bien que la situation épidémiologique se soit améliorée, la sous-région reste exposée aux menaces émergentes. Le Dr Janabi a insisté sur la nécessité de maintenir les capacités de laboratoire mobile et les équipes d’investigation rapide, afin de briser précocement toute chaîne de transmission.
L’épidémie de choléra en République démocratique du Congo rappelle l’interconnexion des territoires. Les autorités congolaises et l’OMS multiplient les exercices conjoints de simulation, afin de tester les corridors humanitaires, les postes de santé avancés et la communication transfrontalière avec le Comité de la CEEAC.
Collaboration transfrontalière accrue
Le Dr Janabi s’est également entretenu avec la cellule régionale de coordination qui suit les déplacements de population entre Kinshasa, Pointe-Noire et Cabinda. Il a évoqué la possibilité d’un protocole sanitaire commun, garantissant surveillance électronique, traçabilité des alertes et partage instantané des données.
Selon une source ministérielle, des avancées sont proches sur la mutualisation des stocks de vaccins oraux contre le choléra. Une décision appuyée par les bailleurs pourrait réduire de moitié le délai de déploiement sur la rive droite pour les communautés riveraines du fleuve Congo.
Vers une couverture sanitaire universelle
Au-delà des urgences, le Congo maintient l’horizon 2030 pour la couverture sanitaire universelle avec un panier de services prioritaires. Le Programme d’appui au développement sanitaire, soutenu par la Banque mondiale, cible la contractualisation des districts et la réduction du paiement direct.
« Nous voulons faire du centre de santé le premier recours, non la dernière chance », rappelle le Dr Ossou, directeur de cabinet au ministère. L’appui de l’OMS est, selon lui, déterminant pour standardiser la qualité des soins et fiabiliser les chaînes d’approvisionnement.
Perspective des jeunes professionnels de santé
Pour les jeunes médecins présents, la visite est porteuse d’espoir. « Voir les décideurs sur le terrain nous motive à rester », confie Mireille Mbemba, 28 ans. Le suivi annoncé des indicateurs leur paraît essentiel pour mesurer, semestre après semestre, les progrès réels.
Le Directeur régional a promis de revenir l’an prochain pour évaluer les avancées. En attendant, les équipes locales finalisent une feuille de route semestrielle, avec des jalons précis sur la santé numérique et la télémédecine, domaine où Brazzaville entend jouer un rôle en Afrique centrale.