Une figure de la diplomatie congolaise s’éteint
La diplomatie congolaise perd l’une de ses voix les plus raffinées, Paul Alexandre Mapingou, décédé le 28 septembre à Paris après une longue maladie. Âgé de 69 ans, l’ancien ambassadeur en Belgique laisse derrière lui un parcours fait d’élégance, de rigueur et de fidélité au service public.
Le ministère des Affaires étrangères a confirmé la nouvelle dans un communiqué empreint d’émotion, rappelant que Mapingou fut tour à tour secrétaire général adjoint, ambassadeur itinérant puis ministre plénipotentiaire. Sa carrière, menée sous la conduite du chef de l’État, illustre une confiance renouvelée et un sens aigu du devoir.
Pour le professeur Grégoire Léfouoba, proche du défunt, « Mapingou était une identité de l’élégance des manières ». Dans une lettre ouverte, il raconte la soirée parisienne où le souffle de son ami s’est éteint, rappelant que « le départ de l’autre est le sien propre », soulignant un lien fraternel indéfectible.
L’universitaire se souvient aussi des soirées de débat où l’ancien diplomate cultivait l’art du silence autant que celui de la formule brillante. Entre deux poèmes de Senghor, il défendait la mission du service extérieur congolais, convaincu que la parole juste peut rapprocher les peuples et apaiser les tensions.
Un parcours académique entre Brazzaville et Paris
Avant d’embrasser la diplomatie, Mapingou avait posé des bases solides dans les amphithéâtres de l’Université Marien-Ngouabi. Étudiant en philosophie, il se passionnait pour l’éthique et la logique, disciplines qui, plus tard, guideraient sa plume et ses négociations bilatérales.
Son goût du savoir le mena ensuite à Amiens puis rue Saint-Guillaume à Paris, sur les bancs de Sciences Po. Dans cette école où se forgent les élites internationales, il découvrit l’art de la synthèse rapide, compétence précieuse pour décrypter les dossiers géopolitiques complexes auxquels il serait confronté.
Ses camarades évoquent un étudiant déjà « ambassadeur dans l’âme », toujours tiré à quatre épingles, accueillant ses pairs africains dans sa petite chambre parisienne autour d’un manioc fumant et d’anecdotes sur Brazzaville. La diplomatie, disait-il, commence par la table partagée et le respect de la parole donnée entre convives.
L’engagement auprès de la diaspora congolaise
Au-delà des salons officiels, Mapingou fut l’un des artisans de la Cellule de mobilisation de la diaspora congolaise, aujourd’hui Département des Congolais de l’étranger. Créée sous l’impulsion du président Denis Sassou Nguesso, l’instance devait canaliser les talents extérieurs vers le développement national, une mission qu’il porta avec ferveur.
À Bruxelles, Londres ou Montréal, il organisait des rencontres conviviales où ingénieurs et artistes partageaient idées de projets agricoles ou start-ups. « La distance géographique ne saurait briser le lien civique », aimait-il rappeler, encourageant chacun à garder un pied au pays malgré les aléas de l’exil choisi.
Les témoignages affluent aujourd’hui sur les réseaux sociaux. De jeunes chercheurs saluent celui qui relisait leurs dossiers de bourse tard dans la nuit, tandis qu’une entrepreneure de Pointe-Noire raconte avoir trouvé en lui un « mentor bienveillant » lors d’un forum économique organisé par l’ambassade du Congo en Belgique.
Le diplomate privilégiait une approche simple : créer des ponts concrets. Il facilita, dit-on, les démarches administratives pour l’envoi de matériel médical vers l’hôpital de Makelekele, aidant ainsi à moderniser certaines salles de soin. Ce pragmatisme lui valut estime et reconnaissance bien au-delà des cercles étatiques classiques.
Hommages unanimes à Brazzaville et dans la diaspora
Au pays, la nouvelle de son décès a suscité un émoi palpable. La ministre des Affaires étrangères a salué dans un message officiel la mémoire d’un « serviteur loyal de la République », annonçant que des dispositions protocolaires sont prises pour un rapatriement digne de sa dépouille vers Brazzaville.
Le gouverneur de la capitale a confirmé qu’une veillée officielle serait organisée au Palais des congrès, permettant aux autorités et à la population de se recueillir. Dans les quartiers comme Poto-Poto, des riverains disent déjà préparer des chorales afin d’accompagner l’arrivée du cercueil drapé aux couleurs nationales.
Au-delà des institutions, les artistes se mobilisent. Le comédien Dieudonné Niangouna envisage une soirée hommage au Théâtre de l’Éclair, rappelant que Mapingou soutenait régulièrement les tournées des compagnies congolaises à l’étranger. Pour lui, « donner à la culture c’était investir dans la paix », confie-t-il avec émotion.
Dans la diaspora, plusieurs collectifs prévoient des messes simultanées à Paris, Bruxelles et Washington. Averty Ndzoyi, son neveu, y lira un oraison célébrant « un père, un guide, une lampe sur notre chemin ». Les organisateurs espèrent retransmettre en direct ces moments pour permettre au plus grand nombre de participer.
La disparition de Paul Alexandre Mapingou rappelle combien la diplomatie est faite d’hommes et de femmes discrets qui tissent, jour après jour, les liens de la République avec le monde. Son parcours, exemplaire et fidèle, restera une source d’inspiration pour les jeunes Congolais désireux d’embrasser la carrière extérieure.