Une marche au cœur de Brazzaville
Sous un ciel légèrement voilé, une centaine de marcheurs se sont élancés tôt depuis le Plateau des 15 ans, siège de Wild Safari Tours, pour un parcours de près de huit kilomètres à travers les artères les plus symboliques de la capitale congolaise.
Avenue des Trois-Martyrs, rond-point Moungali, gare ferroviaire puis bâtiment emblématique de la tour Nabemba : chaque étape a offert un arrêt commenté, mêlant anecdotes historiques et conseils pratiques pour un tourisme urbain équilibré et respectueux des communautés locales.
La marche, organisée la veille de la Journée internationale du tourisme célébrée le 27 septembre, s’inscrit dans un mouvement mondial qui encourage les citoyens à redécouvrir leur patrimoine immédiat avant de songer aux grands voyages intercontinentaux.
Objectifs d’un City tour responsable
Pour Francel Emerancy Ibalank, directeur de Wild Safari Tours, l’initiative répond d’abord à un besoin de sensibilisation : « Brazzaville regorge de trésors souvent ignorés par ses propres habitants, il faut les remettre au centre des conversations », a-t-il expliqué en fin de parcours.
Les organisateurs insistent sur l’idée d’un tourisme à pied favorisant la réduction de l’empreinte carbone, la convivialité et l’interaction directe avec les commerçants de rue, garants d’une expérience authentique et d’un impact économique immédiat sur les petits acteurs locaux.
Cette vision rejoint la stratégie nationale de diversification économique, rappelée par le ministère de l’Industrie culturelle, touristique, artistique et des loisirs, qui fait du tourisme urbain un complément attendu au dynamisme portuaire de Pointe-Noire et aux projets agricoles de l’intérieur du pays.
Cap sur le Nabemba Tourisme Expo
La marche constitue aussi la rampe de lancement du premier Nabemba Tourisme Expo, annoncé du 18 au 20 novembre au Palais des congrès de Brazzaville et présenté comme une vitrine régionale pour les destinations d’Afrique centrale.
Selon Jordelin Atipo-Oko, directeur général de l’Opit, le salon ambitionne de réunir agences, hôteliers, artisans, bailleurs et start-ups autour de stands interactifs et de conférences orientées vers l’innovation, l’inclusion et la création d’emplois pour la jeunesse congolaise.
Le choix du nom, inspiré de la tour Nabemba, plus haut gratte-ciel du pays, symbolise l’aspiration des organisateurs à hisser l’offre touristique congolaise vers de nouveaux sommets, sans perdre de vue l’accueil chaleureux qui fait la réputation du bassin du Congo.
Un secteur porteur pour l’emploi des jeunes
D’après les chiffres préliminaires communiqués par l’Opit, le tourisme emploie déjà plus de 15 000 personnes au Congo, essentiellement dans l’hôtellerie et la restauration, mais la marge de progression est estimée à 40 % d’ici cinq ans si les initiatives locales se multiplient.
Les responsables municipaux présents ont rappelé que chaque nouveau circuit pédestre ouvre un marché pour les guides, les vendeurs d’artisanat, les photographes et même les développeurs d’applications mobiles capables de raconter la ville en réalité augmentée.
L’accent mis sur l’employabilité des jeunes s’accorde avec le Programme national de développement, qui prévoit des mesures d’accompagnement financier pour les porteurs de projets touristiques innovants, à travers des partenariats publics-privés et le renforcement des capacités dans les centres de formation hôtelière.
Brazzaville, vitrine internationale en construction
En parcourant la mairie centrale ou la primature, les marcheurs ont souvent dégainé leurs smartphones pour alimenter les réseaux sociaux, générant en temps réel un contenu visuel qui contribue à la promotion numérique de la destination congo-brazzavilloise.
Les influenceurs invités par Wild Safari Tours, suivis par un public jeune et diasporique, prévoient de publier des capsules mettant en avant le street art de Poto-Poto, les marchés colorés ou la riche scène culinaire fusionnant saka-saka, liboké et recettes contemporaines.
Pour Lis Pascal Moussodji, directeur de cabinet du ministre du Tourisme, ces contenus sont autant de cartes de visite virtuelles susceptibles d’attirer les investisseurs, les diasporas en vacances et les visiteurs voisins attirés par la facilité d’accès aérien de Maya-Maya.
Les données de l’Organisation mondiale du tourisme montrent déjà un rebond des arrivées en Afrique centrale cette année, tendance que les autorités congolaises souhaitent amplifier en combinant sécurité, connectivité et campagnes promotionnelles ciblées sur les capitales régionales.
En attendant le salon de novembre, les organisateurs promettent de multiplier les balades thématiques, consacrées tour à tour au patrimoine colonial, à la musique rumba ou aux légendes du fleuve Congo, pour que chaque piéton devienne l’ambassadeur souriant de sa propre ville.
Perspectives et défis à relever
La question de la signalétique urbaine reste toutefois un point d’amélioration ; plusieurs participants ont noté l’absence de panneaux explicatifs devant certains monuments moins connus, limitant la compréhension spontanée pour les visiteurs non accompagnés.
Le directeur de l’Opit a indiqué que des discussions sont en cours avec la mairie pour installer des QR codes multilingues, financés par des partenariats public-privé, afin d’enrichir le parcours sans alourdir les budgets municipaux.
Autre défi évoqué, la nécessité de former davantage de guides parlant anglais, espagnol ou mandarin, car les flux attendus pour le Nabemba Tourisme Expo incluent des délégations d’affaires venant d’Asie et d’Amérique latine à la recherche d’opportunités dans la zone CEEAC.