Marché du Oui, poumon économique de Pointe-Noire
Dans le quartier OCH, le marché du Oui crépite dès l’aube, drainant commerçants, restaurateurs et touristes vers des étals ruisselants de poissons argentés et crustacés pigmentés.
Carrefour gastronomique autant que moteur économique, l’espace accueille quotidiennement plusieurs milliers de clients, consolidant la réputation halieutique de Pointe-Noire dans toute la région côtière congolaise.
Les teintes vives des parasols, la cadence des couteaux sur les planches et la brise marine créent un décor digne d’une carte postale contemporaine.
Selon la direction départementale de la pêche, plus de cinq tonnes de produits arrivent ici chaque jour, issues de pirogues artisanales et de chalutiers côtiers.
Ce volume illustre la place stratégique de ce marché, trait d’union entre la mer et les assiettes urbaines, mais aussi entre producteurs et transformateurs locaux.
Un héritage de la modernisation municipale
Ouvert en 2015, le marché tire son nom de la forte mobilisation populaire ayant soutenu le référendum constitutionnel, moment clé de l’histoire politique contemporaine congolaise.
À l’époque, Denis Christel Sassou Nguesso avait offert cette infrastructure moderne pour remplacer l’ancien marché central jugé exigu, suscitant un large élan de gratitude.
Couvertures métalliques, systèmes de drainage et allées pavées illustrent une ambition : offrir aux vendeurs de meilleures conditions sanitaires tout en valorisant la filière poisson dans la ville.
Brice Itoua, conseiller municipal, rappelle que plus de 5 000 commerçants y travaillent désormais, « preuve que l’investissement continue de porter ses fruits pour notre cité ».
L’initiative s’inscrit aussi dans la stratégie nationale de diversification économique, qui mise sur les secteurs non pétroliers pour soutenir l’emploi et la croissance durable.
Abondance de poissons et crustacés frais
Dès six heures, les bacs isothermes se déversent en carpes rouges, capitaines, bars, soles, dorades, crevettes, crabes et langoustes fraîchement hissés des filets.
Le bar et la sole tiennent cependant le haut du pavé, recherchés par les foyers comme par les chefs qui approvisionnent hôtels et maquis du littoral.
Les prix fluctuent selon les marées ; un kilogramme de bar se négocie autour de 3 500 francs CFA, tandis que la sole atteint parfois 4 200 francs.
Les acheteurs apprécient la possibilité de faire nettoyer leur prise sur place, un service rapide réalisé au couteau, puis glissé dans des glacières remplies de glace pilée.
Pour garantir la fraîcheur, les vendeurs respectent un roulement serré : les invendus du soir sont immédiatement transformés en fumaison traditionnelle ou réacheminés vers des unités de surgelation.
Poissonniers, femmes et hommes au cœur de l’action
Derrière chaque comptoir, une histoire familiale se raconte ; beaucoup de stands se transmettent de mère en fille, perpétuant un savoir-faire patiemment construit sur plusieurs décennies.
Rose, venue spécialement de Brazzaville, témoigne sourire aux lèvres : « Le trajet vaut l’effort, ici je retrouve l’authenticité et la qualité que je recherche ».
Mignon, vendeur installé côté nord, explique que l’affluence varie : « Le premier samedi du mois reste calme, mais à la paie, c’est plein dès l’aube ».
Les poissonniers se sont regroupés en coopératives pour négocier la glace, mutualiser le transport et organiser des sessions d’hygiène encadrées par les services vétérinaires municipaux.
Cette organisation collective améliore les marges tout en garantissant aux consommateurs une traçabilité appréciée, atout supplémentaire pour fidéliser une clientèle désormais attentive à la sécurité alimentaire.
Visiteurs conquis, ambiance sensorielle unique
Le parfum iodé, mêlé à la sciure humide utilisée pour absorber l’eau, entoure les passants d’un voile salin qui évoque immédiatement les vagues proches de la côte.
Les cris cadencés « poisson frais, poisson frais » s’élèvent en polyphonie, tandis que les balances claquent, ajoutant une rythmique presque musicale à l’expérience commerciale.
Beaucoup de visiteurs filment la scène pour leurs réseaux sociaux, contribuant à la notoriété numérique d’un lieu désormais recommandé par plusieurs guides touristiques francophones.
Les restaurateurs locaux profitent de ce bouche-à-oreille : certains proposent des ateliers où les clients apprennent à griller leur bar ou à mijoter une soupe de crabes.
Pour les familles, le marché sert aussi d’école vivante ; parents et enseignants y organisent des sorties pédagogiques afin d’expliquer les espèces endémiques et les pratiques de pêche responsables.
Enjeux et perspectives pour la filière halieutique
Face à la demande croissante, les autorités encouragent l’installation de chambres froides supplémentaires et la création d’un laboratoire de contrôle qualité directement adossé au marché.
Cette démarche vise à renforcer la compétitivité des pêcheurs congolais vis-à-vis des importations et à favoriser l’exportation régionale de produits à forte valeur ajoutée.
Plus largement, la diversification prévoit le développement d’une aquaculture durable autour du Kouilou, complémentaire à la pêche artisanale et créatrice d’emplois pour la jeunesse.
Le ministère de l’Économie bleue travaille en concertation avec les collectivités pour faciliter l’accès au crédit des coopératives et promouvoir des formations techniques adaptées.
Ainsi, le marché du Oui entend rester le catalyseur d’une filière halieutique innovante, tout en préservant l’âme conviviale qui fait le charme authentique de Pointe-Noire.
Pour les touristes comme pour les habitants, l’avenir de ce haut lieu commercial s’annonce prometteur, conjuguant saveurs marines, innovation et vitalité économique sur le long terme.