Une première finale sous les projecteurs à Brazzaville
Les éclats de joie ont résonné dans l’espace culturel Burotop Iris samedi soir, lorsque l’équipe Winner Premier a soulevé le trophée de la toute première édition du “Lissolo Challenge”, compétition pensée pour remettre sur le devant de la scène le jeu de société Lissolo 2.0.
Cinq vainqueurs et une enveloppe symbolique
Composée de Roger Mankindou, Miveck Rhignanga, Lutther Mabiala, Davy Madassou et Amadou Samanke, la formation a dominé les différentes manches avant de s’imposer en finale, empochant chacun une enveloppe de 50 000 FCFA, soit l’équivalent d’un mois de salaire minimum local.
Plus qu’un prix, un voyage de connaissances
Au-delà de la récompense financière, les lauréats retiennent surtout la camaraderie et les connaissances glanées. « Nous avons révisé la géographie, les langues et même quelques proverbes que j’ignorais », confie Lutther Mabiala, visiblement surpris par la richesse des cartes qu’il a tirées durant la partie.
La vision de Kris Brochec
La créatrice du challenge, l’entrepreneure culturelle Kris Brochec, explique avoir voulu « raffermir les liens familiaux à travers une aventure interactive, accessible et 100 % congolaise ». Selon elle, Lissolo 2.0 s’adresse autant aux enfants qu’aux adultes curieux de l’histoire nationale.
Lissolo 2.0, réinvention d’un classique
Pensé comme une réinvention du traditionnel jeu Lissolo apparu dans les années 1990, le format 2.0 enrichit le plateau d’épreuves collaboratives, de quiz bilingues et de cartes “défis” qui invitent les joueurs à mimer une danse locale ou à chanter un refrain en lingala.
Des règles qui valorisent la coopération
Chaque partie se dispute par équipes de cinq, sur un parcours jonché d’étapes consacrées à l’artisanat, aux migrations ou à l’économie informelle. Pour avancer, il faut lancer le dé, répondre juste, puis coopérer : un système qui valorise la discussion plutôt que la compétition individuelle.
Un événement suivi en présentiel et en ligne
La finale, tournée en direct sur la page Facebook officielle, a rassemblé une centaine de spectateurs physiques et près d’un millier d’internautes. L’organisation avait installé un décor rappelant les cases traditionnelles, tranchant avec les écrans tactiles utilisés pour comptabiliser les points en temps réel.
Un pont entre les générations
« Nous tenions à ce choc visuel entre passé et présent », justifie le directeur artistique Elie Ndinga. Les enfants de moins de dix ans chantaient aux côtés de retraités venus tester leur mémoire, preuve, d’après lui, que le jeu peut combler le fossé générationnel.
Roger Mankindou prêche la pédagogie par le jeu
Capitaine de l’équipe victorieuse, Roger Mankindou voit dans l’initiative un outil pédagogique. « Beaucoup de jeunes connaissent mieux Paris que Sibiti. Jouer à Lissolo, c’est parcourir le pays sans billet d’avion », lance-t-il, invitant les écoles à intégrer le plateau dans leurs clubs parascolaires.
Une cartographie inclusive du territoire
Hugues Wilson, chargé du projet, insiste sur la dimension inclusive. Le plateau mentionne les 12 départements, mais aussi des communes moins médiatisées, comme Enyellé ou Mossendjo. « Personne n’est laissé sur le bas-côté, chaque carte apporte une anecdote positive sur une localité », souligne-t-il.
Cap sur le numérique et la diaspora
Une application mobile, actuellement en phase bêta, doit compléter l’expérience. Elle proposera des mini-jeux en réalité augmentée, un classement national et un dictionnaire sonore des dialectes recensés. « Nous voulons que la diaspora participe depuis Washington ou Paris à la prochaine saison », précise Brochec.
Le boom des cafés-ludiques brazzavillois
L’engouement autour de Lissolo 2.0 s’inscrit dans une vague de retour aux jeux de société observée à Brazzaville, où plusieurs cafés-ludiques ont vu le jour ces deux dernières années. Ce marché de niche représenterait déjà près de 150 millions FCFA de chiffre d’affaires annuel.
Un soutien institutionnel discret mais précieux
Le ministère de l’Industrie culturelle et des Arts, qui a apporté un appui logistique discret, se félicite de l’initiative. « Ces projets démontrent que la créativité congolaise peut générer des emplois et maintenir la cohésion nationale », indique une note transmise à notre rédaction.
Une production locale et responsable
D’après les promoteurs, chaque exemplaire du jeu est assemblé à Makabandilou par une PME locale. Les planches sont découpées dans du bois issu de forêts certifiées et les pions sont moulés à partir de plastique recyclé, réduisant l’empreinte carbone d’environ 30 %.
Un comité scientifique pour garantir la rigueur
Côté contenu, un comité d’historiens et de linguistes veille à la rigueur des fiches. Les fiches sur la guerre du Pool, par exemple, ont été rédigées en collaboration avec la Faculté des Lettres, pour garantir un traitement factuel et apaisé des épisodes sensibles.
Lissolo Days vise désormais les régions
Les Lissolo Days devraient maintenant s’exporter à Pointe-Noire, Owando et Dolisie. Des ateliers d’initiation seront organisés dans les lycées et maisons de quartier, avec la promesse d’une nouvelle finale nationale en 2024, voire d’une édition sous-régionale ouverte au Gabon et au Cameroun.
La diaspora mobilisée
Dans la diaspora, plusieurs associations culturelles se sont d’ores et déjà proposées pour relayer l’événement. « Nos enfants nés en Europe manquent parfois de repères. Ce jeu leur parle concrètement du pays de leurs parents », témoigne Cécile Ngoma, présidente d’un collectif basé à Lyon.
Un esprit de fierté contagieux
En attendant cette expansion, les cinq champions savourent leur victoire symbolique. « Nous avons gagné des francs CFA, mais surtout un sentiment de fierté collective », glisse Miveck Rhignanga. Un état d’esprit que les organisateurs espèrent contagieux, afin que chaque foyer congoloise adopte bientôt Lissolo 2.0.