Nouvelle ère pour l’Ofc Likouala
Impfondo s’est animé le 10 août dernier lorsque les délégations féminines ont convergé vers la grande salle préfectorale pour élire les nouvelles dirigeantes de l’Organisation des femmes du Congo, branche Likouala.
Sous l’œil attentif de la présidente nationale, Inès Nefer Ingani Voumbo Yalo, le scrutin a couronné Mme Moungbende Ballay, née Kemenguet Emma Marie Claire, qui devient la voix officielle des militantes pour les trois prochaines années.
La journée s’est conclue dans une atmosphère empreinte de chants traditionnels, rappelant l’ancrage culturel que l’Ofc entend défendre tout en modernisant ses méthodes d’action politique au cœur de cette vaste région équatoriale.
L’Ofc, locomotive de l’engagement féminin
Créée en 1969, l’Ofc se réclame héritière des grandes figures qui ont contribué à l’indépendance du Congo tout en portant la cause des femmes, longtemps reléguée au second plan des débats institutionnels.
Son réseau, présent dans les douze départements, revendique plus de 250 000 adhérentes et s’appuie sur des cellules de quartier qui organisent campagnes de sensibilisation, cours d’alphabétisation et formations entrepreneuriales.
Au-delà de la politique partisane, l’organisation veut désormais consolider ses partenariats avec les associations confessionnelles et les ONG pour amplifier la lutte contre les mariages précoces et l’analphabétisme.
Likouala, terre de défis et d’opportunités
S’étendant sur près de 66 000 kilomètres carrés, la Likouala demeure l’un des départements les moins densément peuplés, mais recèle d’immenses réserves forestières dont l’exploitation durable suscite à la fois espoir économique et vigilance environnementale.
Les routes fluviales constituent l’ossature logistique, reliant Impfondo à Brazzaville en trois jours de voyage, un délai que les commerçantes souhaiteraient réduire pour écouler manioc, poisson fumé et huile de palme vers les grands marchés urbains.
L’arrivée du haut débit, promise par le ministère des Postes, pourrait transformer l’accès à l’information, condition essentielle pour que les programmes de l’Ofc atteignent les villages les plus enclavés.
Cap sur 2026, voix féminines en préparation
En adoptant une motion de soutien à la candidature du Président Denis Sassou Nguesso, les militantes réaffirment leur attachement à la stabilité institutionnelle et entendent participer activement aux débats programmatiques qui précèderont le scrutin.
« Il ne s’agit pas seulement d’aligner des slogans, mais de formuler des propositions concrètes sur l’accès à la terre, le microcrédit et la santé maternelle », explique Mme Ballay, déterminée à élargir la base électorale féminine.
Un calendrier d’assemblées mobiles, inspiré des tournées présidentielles, sera déployé dans les six districts afin d’identifier les priorités locales et de former des coordinations de campagne efficaces.
Jeunesse féminine et digitalisation
Les jeunes adhérentes, très actives sur WhatsApp et Facebook, souhaitent digitaliser les réunions et créer des podcasts en lingala pour toucher les étudiantes de Brazzaville ou d’Oyo qui suivent l’actualité de leurs localités d’origine.
Avec l’appui d’ingénieurs congolais revenus de Dakar, elles testent une plateforme open source offrant visioconférences à bas débit, preuve que l’innovation peut germer loin des campus technologiques habituels.
Ce tournant numérique est perçu par la présidente nationale comme une opportunité d’unifier le discours de l’Ofc et de raccourcir la distance symbolique entre les structures urbaines et rurales.
Cohésion sociale et développement local
La Likouala a souvent été citée pour son exemple de cohabitation pacifique entre communautés autochtones et bantoues ; l’Ofc entend capitaliser sur cette tradition pour promouvoir des projets agricoles coopératifs.
Un premier programme pilote d’éco-jardin maraîcher, mené à Epéna avec l’aide de l’Agence française de développement, a vu ses revenus tripler en un an, selon les chiffres du service départemental de l’agriculture.
Les responsables locales espèrent répliquer le modèle autour de la culture du riz pluvial, susceptible de réduire la dépendance aux importations et de favoriser la sécurité alimentaire à l’horizon 2025.
Regards vers Brazzaville et au-delà
À Brazzaville, l’expérience likoualaise est suivie de près : des parlementaires voient dans ce renouvellement un laboratoire pour renforcer la représentativité féminine à l’Assemblée nationale, actuellement à 17 %.
Le Secrétariat permanent du PCT envisage déjà d’intégrer certaines propositions issues des motions d’Impfondo dans la plateforme électorale, notamment la création d’un fonds dédié aux entrepreneures rurales.
Si elles parviennent à mobiliser ressources et compétences, les nouvelles instances de l’Ofc Likouala pourraient servir de catalyseur à une génération qui, tout en restant fidèle aux orientations nationales, veut inscrire le développement local dans une dynamique inclusive et durable.
Perspectives régionales et partenariats
La proximité géographique avec la République centrafricaine favorise des échanges transfrontaliers que l’Ofc souhaite structurer, en collaborant avec les mairies frontalières pour sécuriser les couloirs commerciaux empruntés par les femmes vendeuses de poissons et d’ignames frais.
Selon le chercheur Éric Mabiala, spécialiste des politiques du genre à l’Université Marien Ngouabi, l’initiative pourrait « donner au bassin nord-est une identité économique concertée et réduire les flux migratoires internes dans les cinq années à venir ».
Pour concrétiser ces ambitions, un mémorandum d’entente devrait être signé avant décembre avec la Banque de développement des États d’Afrique centrale, prévoyant une ligne de crédit préférentielle destinée aux projets portés par des coopératives féminines locales.