Le symbole de Kintélé revisité
Premier samedi d’août, l’aurore dévoile un ballet inaccoutumé autour du complexe sportif de la Concorde de Kintélé. Sous la conduite de la task-force instaurée par le chef de l’État, Denis Sassou Nguesso, le site qui avait accueilli, en 2015, le cinquantenaire des Jeux africains retrouve une effervescence proche des grandes heures sportives. Ministres, agents techniques, étudiants et associations se sont joints à la manœuvre, rappelant, par leur présence, la charge mémorielle et identitaire que représente cette enceinte pour la jeunesse congolaise. « Kintélé symbolise la concorde », résume Juste Désiré Mondelé, ministre délégué chargé de l’Assainissement urbain, dont les propos confirment la dimension socio-politique d’une opération qui dépasse le simple acte de nettoyage.
Une gouvernance de la maintenance
Depuis une décennie, la République du Congo s’est dotée, grâce au programme de municipalisation accélérée, d’infrastructures d’envergure que nombre de capitales africaines envieraient. Pourtant, le défi de la maintenance demeure. En confiant à Jean-Jacques Bouya, ministre d’État en charge de l’Aménagement du territoire et des Grands travaux, la coordination d’une task-force intersectorielle, le gouvernement entend inscrire l’entretien régulier des ouvrages publics au cœur d’une gouvernance plus prévoyante. La démarche s’inscrit dans un double impératif : préserver l’investissement public et assurer la continuité des services rendus aux citoyens. Aux yeux des observateurs, cette articulation entre réhabilitation, planification budgétaire et sensibilisation sociale traduit la maturation progressive des politiques d’infrastructure congolaises.
Citoyenneté environnementale et mobilisation
L’opération massive de collecte de déchets à Kintélé et sur le campus de l’École normale supérieure illustre l’ancrage d’une citoyenneté environnementale encouragée par les autorités. Rares étaient les images, il y a encore quelques années, de membres du gouvernement maniant balais et pelles aux côtés de jeunes volontaires. Désormais, la pratique se banalise et renforce une dynamique participative. « Un engouement salutaire », commente le ministre Mondelé, qui plaide pour l’institutionnalisation du nettoyage mensuel. Cette ritualisation viserait à transformer l’espace public en bien commun partagé, prémisse d’une culture de la propreté urbaine indispensable à l’attractivité de Brazzaville.
Défis logistiques et perspectives durables
La réussite de l’opération n’occulte pas les difficultés persistantes. Le recours aux pré-collecteurs informels, munis de chariots, demeure un maillon sensible de la chaîne de gestion des déchets. Les dépôts sauvages réapparaissent parfois quelques heures après le passage des équipes municipales, alimentant la perception d’une prestation perfectible. Le gouvernement se veut ferme : toute infraction constatée sera sanctionnée, promet Juste Désiré Mondelé. Parallèlement, l’exécutif travaille à la modernisation du parc de bennes, à la traçabilité numérique des circuits d’évacuation et à la sensibilisation des ménages à la réduction des déchets à la source. Cette approche combinée, qui fait écho aux recommandations de plusieurs partenaires techniques, pourrait à terme stabiliser un modèle économique de la propreté urbaine, condition sine qua non de la durabilité des infrastructures.
Entre diplomatie urbaine et rayonnement national
Au-delà de la sphère domestique, l’opération Kintélé recèle une portée diplomatique. La présence de l’ambassadrice du Venezuela souligne l’intérêt porté par des partenaires étrangers aux initiatives congolaises de gestion urbaine. Dans une Afrique où l’image des capitales façonne la marque-pays, l’entretien du patrimoine sportif devient un instrument de soft power. En réhabilitant la Concorde, Brazzaville se positionne pour accueillir de nouveaux événements régionaux, stimulant un tourisme sportif aux retombées économiques notables. L’éclat retrouvé du complexe pourrait, à terme, renforcer la candidature congolaise à diverses rencontres continentales, consolidant l’idée d’un Congo moteur d’intégration et de coopération. En filigrane, c’est la diplomatie de la ville, vecteur de réputation internationale, que l’opération d’assainissement vient conforter.