Une réforme en phase avec les standards internationaux
Adopté lors de la sixième session ordinaire de la quatrième législature, le texte confère aux magistrats de la Cour des comptes et de discipline budgétaire un cadre juridique actualisé, conforme aux principes de Lima et de Mexico qui promeuvent l’indépendance des institutions supérieures de contrôle. Depuis la révision constitutionnelle de 2015, la Cour est reconnue comme entité autonome ; l’adoption de ce statut parachève ce mouvement en dotant ses juges de garanties déontologiques et matérielles comparables à celles observées dans les juridictions homologues du continent.
Le ministre de la Justice, Aimé Ange Wilfrid Bininga, a salué « un socle stratégique qui consolide la crédibilité de la Cour dans la lutte contre les déperditions financières », rappelant que l’indépendance fonctionnelle des magistrats constitue un signal fort adressé aux partenaires techniques et financiers désireux de soutenir la modernisation des finances publiques.
Assistants vérificateurs : un statut clarifié et attractif
La question des assistants vérificateurs – pivot du contrôle sur pièces et sur place – a suscité un échange nourri dans l’hémicycle. Le garde des Sceaux a précisé que la loi organique n°32-2023 (articles 22 à 27) balise trois voies d’accès : recrutement sur test pour les fonctionnaires expérimentés titulaires d’un master en droit, comptabilité ou économie ; intégration des agents déjà en poste conformément au décret du 10 octobre 2024 ; et concours dédié à l’École nationale d’administration et de magistrature, section des comptes.
Ces professionnels, rappelle-t-il, « ne sont pas des juges au sens classique, mais des contrôleurs spécialisés placés sous l’autorité des magistrats de la Cour ». Après dix années d’expérience, un assistant peut toutefois accéder au rang de conseiller, équivalent à celui d’un magistrat de cour d’appel, illustrant la volonté d’offrir de réelles perspectives de carrière sans créer d’ordre juridictionnel parallèle.
Déclaration de patrimoine : vigilance consolidée
Le dispositif déclaratif, régulièrement scruté par la société civile, reste en vigueur sous la supervision de la Cour suprême. Les sénateurs ont obtenu la confirmation que les magistrats, comme les plus hauts gestionnaires publics, demeurent soumis à l’obligation de transparence patrimoniale. « La publication des déclarations n’est pas symbolique ; elle s’inscrit dans une dynamique de reddition des comptes parfaitement assumée », a insisté Aimé Ange Wilfrid Bininga.
Nomination et évolution de carrière au sein de la Cour
Les postes de premier président, de procureur général ou de présidents de chambres pourront être occupés soit par des magistrats issus de l’ordre unique des juridictions, soit par des hauts fonctionnaires aguerris à la gestion publique. Cette ouverture, déjà pratiquée dans plusieurs pays d’Afrique centrale, vise à capitaliser sur les expertises complémentaires financières et juridiques présentes au sein de l’administration.
Le texte adopté garantit également la stabilité institutionnelle : la durée de mandat, les conditions de mobilité et les régimes disciplinaires sont minutieusement définis afin de protéger les magistrats de pressions extérieures, tout en préservant la nécessaire reddition interne.
Autonomie budgétaire renforcée pour le Sénat
Profitant de la même séance plénière, les sénateurs ont amendé l’article 79 de leur Règlement intérieur. Les prestations liées à l’hospitalisation, à l’évacuation sanitaire ou aux obsèques des parlementaires seront désormais directement imputées au budget de l’institution, dans le respect de son autonomie financière. En cas de décès, une indemnité forfaitaire viendra soutenir la famille du défunt, alignant ainsi les pratiques sur celles de l’Assemblée nationale.
Si ce point peut sembler éloigné du débat sur la Cour des comptes, il illustre, selon le président de la commission des finances, « la volonté de crédibiliser l’ensemble des organes de contrôle et de décision par une gestion interne assainie ».
Vers une gouvernance publique plus lisible
Au-delà de la technicité juridique, le nouveau statut des magistrats de la Cour des comptes constitue un jalon dans la maturation institutionnelle du Congo-Brazzaville. En renforçant la sécurité professionnelle des juges et la transparence de leurs auxiliaires, le législateur mise sur l’efficacité d’un contrôle budgétaire moderne, condition sine qua non de la confiance des partenaires et, surtout, des citoyens.