Rentrée 2025 sous tension
La rentrée scolaire 2025-2026, calée au 1er octobre, s’annonce sous le signe de l’incertitude dans les établissements congolais. Le Mouvement national des enseignants du Congo, plus connu sous l’acronyme MNEC, a déposé un préavis de grève illimitée qui pourrait perturber la reprise.
Le bureau national du syndicat, dirigé par Blaise Ngambou, invite les enseignants de l’enseignement général, qu’ils soient fonctionnaires, volontaires ou communautaires, à « s’asseoir tranquillement à la maison » dès le jour J, tant que leurs revendications ne seront pas satisfaites.
Sept revendications adressées à la présidence
Dans un courrier transmis à la presse, le MNEC expose sept doléances qu’il souhaite voir examinées directement par le président de la République, Denis Sassou Nguesso, estimant qu’elles conditionnent la levée immédiate de l’appel à la grève.
Leurs requêtes portent notamment sur l’application financière du statut particulier des enseignants signé en 2018, le paiement des rappels de solde, des bourses en retard pour les volontaires, la réouverture des allocations familiales, ainsi que l’intégration administrative des campagnes 2024 et 2025.
Le syndicat réclame aussi la publication des listes d’enseignants déjà sélectionnés pour ces intégrations, geste attendu comme un signal de transparence et de reconnaissance envers des personnels parfois en poste sans matricule depuis de nombreuses années.
Une mobilisation aux contours incertains
Malgré le ton ferme, plusieurs observateurs rappellent que le MNEC a déjà lancé des mots d’ordre similaires sans bloquer durablement les cours, faute d’un taux de suivi suffisant et d’une coordination avec les autres centrales syndicales du secteur.
Dans les lycées de Brazzaville et Pointe-Noire, les chefs d’établissement interrogés se disent « prêts à accueillir les élèves », misant sur le sens du devoir d’une majorité d’enseignants, mais reconnaissent rester attentifs à l’évolution des négociations.
Enjeux pour les élèves et les familles
La rentrée marque souvent la reprise d’une organisation familiale minutieuse, entre transport, cantine et fournitures déjà impactées par l’inflation. Un arrêt prolongé des cours risquerait d’alourdir le quotidien des parents, tout en fragilisant la continuité pédagogique des apprenants.
Dans les classes d’examen, certains élèves redoutent un décalage du programme qui pourrait peser sur les résultats nationaux. « On ne veut pas revivre les rattrapages en pleine saison des pluies », confie Micheline, élève en terminale au lycée Chaminade.
Réactions du ministère de l’Éducation
Contactées par nos soins, les sources internes au ministère rappellent que le dialogue social reste ouvert et que plusieurs dossiers revendiqués sont déjà « en circuit » auprès des finances publiques. Elles soulignent l’importance de respecter le calendrier scolaire établi.
Un cadre de la direction des ressources humaines, sous couvert d’anonymat, indique que des réunions techniques se tiennent régulièrement pour finaliser la paie des rappels et l’actualisation des listes d’intégration, un travail jugé délicat en raison de la volumétrie des dossiers.
Perspectives de dialogue social
Plusieurs syndicats partenaires invitent le MNEC à rejoindre la table de concertation nationale au lieu d’une suspension unilatérale des cours. Selon eux, un compromis équilibré peut émerger, combinant échelonnement des paiements et mise à jour progressive des textes réglementaires.
Du côté des enseignants, la fatigue liée aux longues attentes reste palpable. « Nous voulons simplement que les accords signés deviennent réalité », explique Armand Mabiala, professeur de sciences physiques à Kinkala, tout en disant rester « disposé à enseigner si les gestes concrets suivent ».
Les jours précédant le 1er octobre seront donc décisifs. Si aucun signe d’apaisement n’apparaît, la grève pourrait démarrer et servir de test à la capacité d’organisation du MNEC, comme à la résilience du système éducatif national déjà confronté à divers défis.
L’issue dépendra de la volonté commune des acteurs de préserver l’année scolaire. En cas d’accord rapide, la rentrée pourrait se dérouler normalement, dans le respect des mesures sanitaires et des priorités pédagogiques établies par le gouvernement.
À défaut, enseignants, parents et autorités devront composer avec un calendrier bouleversé, et redoubler d’inventivité pour limiter l’impact sur les apprentissages. Les prochains jours diront si la mobilisation du MNEC se transforme en bras de fer ou en opportunité de dialogue.
Contexte budgétaire et financier
Le contexte budgétaire national pèse aussi dans la balance. Le ministère des Finances explique que le paiement des rappels de solde est soumis à la rationalisation des dépenses publiques, amorcée depuis le lancement du Plan national de développement 2022-2026.
Selon un économiste contacté, la marge de manœuvre existe si les décaissements sont étalés. « Un calendrier clair rassurerait les enseignants sans compromettre l’équilibre macro-économique », analyse Dieudonné Loubota, qui salue la volonté gouvernementale de combiner rigueur et prise en compte du social.
Expérience des années précédentes
En 2019 et 2021, de précédents mouvements de grève avaient abouti à des protocoles d’accord assortis d’échéances. Si certains engagements ont été respectés, d’autres, notamment financiers, ont pris du retard, nourrissant la méfiance actuelle d’une partie du corps enseignant.
Cette fois, le MNEC affirme vouloir sécuriser des mesures contraignantes avant toute suspension du mot d’ordre. Les autorités, elles, défendent une approche pragmatique, insistant sur la nécessité de tenir compte des réalités budgétaires tout en maintenant un climat social apaisé.