Brazzaville célèbre la première cohorte Genius
Le 6 août 2025, l’hôtel de ville de Brazzaville a résonné d’applaudissements : trente entrepreneures et deux entrepreneurs recevaient leurs certificats, scellant la première promotion du programme Genius conduit par la Chambre nationale des femmes cheffes d’entreprises et entrepreneures du Congo.
La ministre des Petites et moyennes entreprises, Jacqueline Lydia Mikolo, et la représentante du PNUD, Adama Dian Barry, ont tenu à remettre en personne les attestations, saluant une initiative « qui transforme des idées en moteurs de croissance locale », selon les mots de la diplomate onusienne.
Des compétences solides pour piloter une start-up
Durant huit semaines, les incubés ont alterné ateliers, études de cas et sessions de mentorat, apprenant à rédiger un business plan, à affûter leur pitch et à construire une stratégie marketing apte à séduire investisseurs, banques et premiers clients exigeants.
Les modules incluaient aussi la planification financière, la gestion de projet, le développement personnel et le positionnement identitaire, des angles souvent négligés dans la création d’entreprise mais jugés décisifs par la présidente de la CNFCEEC, Flavie Lombo.
Partenariat État-PNUD : un appui stratégique
« Notre mission est d’accompagner chaque talent jusqu’à la formalisation de son activité », a rappelé la ministre Jacqueline Lydia Mikolo, insistant sur l’alignement du programme avec la feuille de route gouvernementale en faveur de l’autonomisation économique des femmes.
Le PNUD a, pour sa part, injecté six millions de francs CFA dans la mise en œuvre, confirmant son engagement à réduire la pauvreté par la création d’emplois durables. « Investir dans l’entrepreneuriat féminin, c’est stimuler la résilience des communautés », a souligné Adama Dian Barry.
Le bras financier d’Écobank renforce l’élan
Au-delà de la formation, l’accord conclu avec la banque panafricaine Ecobank via son programme Ellerver ouvre un accès privilégié à la bancarisation, au micro-crédit et à des produits d’épargne ciblés, pierre angulaire d’une croissance soutenable pour les futures dirigeantes.
Selon les chiffres communiqués par l’établissement, près de cinquante pour cent des participantes ont déjà entamé des démarches pour ouvrir un compte professionnel, étape cruciale pour rassurer fournisseurs et bailleurs durant les premières années d’activité.
Le pari du financement participatif
Pour consolider leur visibilité, plusieurs lauréates envisagent de lancer des campagnes de financement participatif, stratégie encore embryonnaire au Congo. Elles y voient un moyen de tester le marché, de fédérer une communauté et de collecter rapidement des fonds sans dilution excessive de capital.
Le ministère des PME planche déjà sur un cadre juridique adapté, inspiré des expériences sénégalaise et ivoirienne, pour sécuriser les transactions en ligne. « Nous voulons protéger les épargnants tout en ouvrant des canaux innovants de financement », précise un cadre du département.
À long terme, les promoteurs espèrent attirer la diaspora congolaise, dont les transferts représentent déjà plus de 4 % du PIB, afin qu’elle prenne part à ces levées de fonds numériques et devienne co-actrice de l’essor entrepreneurial national.
Une ambition de mille entrepreneures dans cinq villes
Dès septembre, Brazzaville accueillera la deuxième cohorte, tandis que Pointe-Noire, Oyo, Dolisie et Ouesso dérouleront le même curriculum, l’objectif global restant de former mille entrepreneures d’ici la fin 2026, soit deux cents par ville.
Cette approche décentralisée répond aux réalités d’un pays vaste, où les coûts de mobilité freinent souvent la montée en compétences. En rapprochant les outils, Genius espère réduire les inégalités régionales et créer une dynamique entrepreneuriale plus homogène.
Jeunes leaders, modèles et attentes du marché
Parmi les nouvelles diplômées, Blanche Bafiatissa, fondatrice de la marque agroalimentaire Bianca Biofood, affirme avoir gagné en clarté stratégique : « Je sais désormais distinguer commerce et entrepreneuriat, et surtout comment mutualiser nos forces pour accéder aux marchés institutionnels ».
Derrière son témoignage, se dessine le profil d’une génération connectée, à l’aise sur les réseaux sociaux, capable de transformer un hashtag en levier commercial. Les mentors recommandent néanmoins de ne pas négliger la conformité fiscale et la qualité, deux critères clés pour conquérir l’export.
Vers un écosystème inclusif et durable
Le programme s’appuie sur un réseau d’experts congolais et internationaux, issus de l’agro-industrie, de la tech et de la culture, témoignant du potentiel de diversification de l’économie nationale à l’heure où Brazzaville s’ouvre davantage aux marchés d’Afrique centrale.
Selon le dernier rapport Doing Business, les micro-entreprises dirigées par des femmes affichent un taux de survie supérieur de trois points à la moyenne nationale lorsqu’elles bénéficient d’un accompagnement structuré, un indicateur que le programme Genius ambitionne de consolider.
À moyen terme, les organisateurs veulent mettre en place un observatoire de l’entrepreneuriat féminin, afin de mesurer l’impact sur l’emploi, la fiscalité locale et l’innovation. Les données collectées pourraient nourrir la stratégie de développement national à l’horizon 2030.
Pour les jeunes adultes brazzavillois, ces réussites constituent déjà des repères tangibles. Elles démontrent qu’avec un encadrement adapté, un capital de lancement limité peut se transformer en entreprise créatrice de valeur, participant aux efforts de diversification économique soutenus par le gouvernement.
Rendez-vous est donc pris pour la montée en puissance de la cohorte suivante. Dans l’effervescence de la capitale, les diplômées de Genius s’apprêtent à lever les rideaux sur leurs premiers produits, illuminant, espèrent-elles, les vitrines du Congo et d’ailleurs.