Un partenariat stratégique pour les PME congolaises
La baie de Pointe-Noire bruissait d’enthousiasme lors de la cinquième édition du Forum horizon initiative et créativité, tenue du 21 au 23 août. Au-delà du programme dense d’ateliers, un moment décisif a retenu l’attention: la signature d’une convention entre le Figa et l’Odel.
En présence de représentants des ministères sectoriels, cet accord scelle une coopération visant à faciliter l’accès des petites et moyennes entreprises à des financements bancaires, enjeu central du Plan national de développement 2022-2026 qui place l’entrepreneuriat au cœur de la diversification économique.
Le directeur général du Figa, Dayi Allaire Branham Kintombo, résume la philosophie partenariale : « Notre rôle est de créer la confiance qui ouvre la porte des banques aux artisans et aux PME ». Une logique de catalyseur plutôt que de prêteur direct, saluée par les participants.
Cinq milliards de garantie pour déclencher le crédit
L’accord prévoit une ligne de garantie de cinq milliards de francs CFA mise à disposition de l’Odel. Concrètement, l’organisation pourra couvrir une partie du risque pris par les établissements financiers, abaissant le seuil de prudence habituel qui empêche souvent les jeunes entreprises d’obtenir leur premier crédit.
Pour Ebeh Deschagrains, président de l’Odel, le dispositif lève un verrou structurel ; il ambitionne de fédérer mille entreprises adhérentes d’ici trois ans et de générer environ huit mille emplois. « Un signal fort pour l’économie locale et un pari sur la créativité des Congolais », souligne-t-il.
Les banques partenaires, dont Crédit du Congo et la Coopérative d’épargne Kollect, ont déjà entamé des discussions techniques pour l’alignement des critères de sélection. Selon une source proche du dossier, la première vague de décaissements pourrait intervenir dès le quatrième trimestre, sous réserve de validation finale.
Le programme Kolisa, accélérateur d’idées
Parallèlement à la signature, dix entrepreneurs ont reçu symboliquement leurs chèques Kolisa, compris entre cent mille et un million de francs CFA. Derrière la photo officielle, ce sont en réalité cinq cents porteurs de projet, sélectionnés sur plus de deux mille candidatures, qui bénéficieront de 63,8 millions.
Doriane Mayoukou, spécialisée dans la cosmétique naturelle, voit déjà plus loin : « Je vais agrandir mon atelier et recruter deux personnes ». Même enthousiasme pour Ricci El Louemba, lauréate d’un million de francs : « Ce fonds arrive au moment où mes commandes en ligne explosent ».
Pour éviter les écueils observés lors de précédentes opérations de micro-crédit, le Figa a instauré un suivi post-financement. Des coachs formeront les bénéficiaires à la tenue de comptes simplifiée, au marketing digital et à la gestion des stocks, afin de maximiser le taux de survie des jeunes structures.
Un Forum Horizon Initiative créatif et fédérateur
Le Fhic, né il y a cinq ans, se veut laboratoire d’idées et vitrine des talents nationaux. L’édition 2025 a rassemblé plus de mille visiteurs, des étudiants aux cadres dirigeants, autour de panels traitant des chaînes de valeur locales, de l’économie verte ou encore du financement participatif.
Parrain de l’événement, le Premier ministre Anatole Collinet Makosso a doublé le nombre de bénéficiaires Kolisa dans son allocution d’ouverture. Un geste perçu comme un encouragement institutionnel à l’esprit d’entreprise, alors que le secteur privé non extractif représente encore moins de vingt pour cent du PIB.
Des espaces d’exposition ont permis aux startups de présenter drones agricoles, applications de suivi médical ou solutions de recyclage des déchets plastiques. « Nous sortons avec des contacts d’investisseurs », confie Flavien Mbemba, créateur de l’application RestoRapide. L’effet réseau du forum apparaît ainsi comme une valeur ajoutée majeure.
Perspectives pour la croissance et l’emploi
Selon le ministère de l’Économie, plus de soixante-dix pour cent des créations d’emplois formels proviennent aujourd’hui des PME. Renforcer le financement, tout en améliorant la gouvernance interne des entreprises, est donc considéré comme l’un des leviers indispensables pour absorber l’arrivée annuelle de quarante mille jeunes sur le marché.
Les experts soulignent toutefois que la réussite du mécanisme dépendra de la stabilité macro-économique et de l’abaissement des coûts de transferts financiers intrarégionaux. Les discussions en cours au sein de la Cemac sur l’interopérabilité des systèmes de paiement sont suivies de près par les entrepreneurs congolais.
À moyen terme, l’Odel envisage d’étendre sa présence à Brazzaville et Dolisie avec des antennes régionales chargées d’identifier de nouveaux projets. Le Figa, lui, travaille à la mise en place d’un tableau de bord transparent où chaque bénéficiaire pourra renseigner ses indicateurs de performance.
Pour de nombreux observateurs, l’initiative Figa-Odel illustre la montée en puissance des solutions nationales face à la défiance ancienne envers le crédit. En plaçant la confiance au centre, elle pourrait ouvrir un cercle vertueux, propice à l’innovation et à la compétitivité du Congo sur la scène sous-régionale.
Les regards se tournent désormais vers la mise en œuvre effective. Si le calendrier annoncé est respecté, les premiers retours d’expérience devraient être disponibles mi-2024, offrant un baromètre précieux pour jauger l’impact de la nouvelle architecture financière sur la vitalité des petites et moyennes entreprises congolaises.