Un bilan financier qui conforte la trajectoire
Réunis à Brazzaville fin juin 2025, les membres de l’association PAFC-Congo ont livré un rapport d’étape que d’aucuns qualifieraient de rassurant. Les exercices financiers 2023-2024 affichent un solde positif, résultat d’une stratégie de mutualisation des fonds de coopération et d’une gouvernance prudente. Comme l’a souligné son président, Brice Séverin Pongui, « les prévisions techniques et budgétaires démontrent que nous demeurons sur la bonne voie » (PAFC-Congo, Assemblée annuelle 2024). Cette situation crée un effet de levier pour attirer de nouveaux partenaires, en particulier ceux qui scrutent la mise en œuvre concrète des politiques nationales de développement durable.
Deux millions d’hectares, vitrine d’une ambition régionale
Avec plus de trois millions d’hectares déjà certifiés, le Congo-Brazzaville occupe la première marche du podium sous-régional. Derrière ces chiffres se profile la montée en gamme environnementale de deux entreprises phares, devenues vitrines du label PAFC Bassin du Congo. Elles introduisent, dans leurs plans d’aménagement, un suivi satellitaire des coupes, un encadrement social des populations riveraines et une diversification des essences exploitées. Les retombées économiques sont tangibles : primes à l’export sur les marchés exigeants, accès facilité au crédit climatique et renforcement du capital réputationnel.
Une architecture tripartite avec Gabon et Cameroun
Le schéma PAFC Bassin du Congo résulte d’une coopération transfrontalière où le Congo, le Gabon et le Cameroun partagent méthodes de vérification, audits indépendants et retours d’expérience. Cette gouvernance tripartite réduit les coûts de transaction pour les opérateurs et offre une lecture harmonisée aux acheteurs internationaux. Lucas Millet, coordonnateur régional, rappelle que « la normalisation commune limite la fragmentation réglementaire, un frein plus important pour les PME que pour les grandes concessions ». L’initiative, saluée par l’Organisation africaine des industries forestières, sert de socle à la future Zone de libre-échange continentale verte.
Convergence attendue avec le règlement européen sur la déforestation
L’entrée en vigueur, en 2026, du nouveau règlement européen sur les produits issus de la déforestation place les exportateurs congolais devant une nécessité de conformité renforcée. Anticipant cette mutation, le PAFC lancera dès la fin 2025 la révision de son standard. Il s’agira d’y intégrer la traçabilité numérique parcelle-parcelle, l’obligation de preuve d’origine légale et la reddition de comptes climat, autant de dispositions calquées sur le texte européen (Règlement européen sur la déforestation, 2023). Cette convergence, loin d’être perçue comme une contrainte, offre au Congo l’opportunité de devenir un fournisseur référent pour le Vieux Continent, fragilisé par l’inquiétude croissante des consommateurs sur l’empreinte carbone des importations.
L’impulsion politique d’une diplomatie verte congolaise
Sous l’égide de la ministre de l’Économie forestière, Rosalie Matondo, la certification figure désormais au premier rang des priorités sectorielles. Le ministère multiplie ateliers, missions de terrain et dispositifs de formation pour convaincre les concessions du Sud-Congo de rejoindre la démarche. Ce couplage entre incitation étatique et engagement volontaire des entreprises renforce l’image d’une administration proactive. À l’international, la diplomatie congolaise capitalise sur ces résultats lors des Conférences des parties, misant sur une crédibilité accrue pour négocier financements climatiques et transferts technologiques.
Sensibilisation et acceptabilité sociale, les autres piliers
La légitimité du label se joue aussi dans les villages forestiers. PAFC-Congo déploie des campagnes d’information en langues locales pour expliquer le partage des bénéfices et les garanties de préservation des terroirs. Les comités de gestion participative mis en place dans les zones certifiées commencent à porter leurs fruits : réduction des litiges fonciers, scolarisation accrue grâce aux taxes de superficie et amélioration de la santé communautaire via les dispensaires financés par les concessionnaires. Une étude de l’Université Marien-Ngouabi souligne que 78 % des populations interrogées associent désormais la certification à une amélioration tangible de leurs conditions de vie.
Perspectives : conjuguer rentabilité et résilience
L’enjeu des cinq prochaines années sera de maintenir le rythme de certification tout en diversifiant la base industrielle, afin de ne pas dépendre exclusivement de quelques opérateurs majeurs. À plus long terme, l’intégration de services écosystémiques dans le calcul de la valeur des concessions pourrait ouvrir un marché de crédits biodiversité où le Congo-Brazzaville disposerait d’un avantage comparatif considérable. Cette trajectoire consolide l’engagement déjà affirmé par le président Denis Sassou Nguesso lors du Sommet des Trois Bassins, qui plaidait pour « une valorisation juste des forêts, poumons de l’humanité ». Ainsi s’esquisse la synthèse entre gestion durable, compétitivité économique et rayonnement diplomatique.