Cap budgétaire national 2026
Dans une lettre de cadrage publiée fin mai, le Premier ministre Anatole Collinet Makosso esquisse les grandes lignes du projet de loi de finances 2026. Le document, destiné à tous les ministères, balise le terrain d’une politique budgétaire tournée vers la consolidation macroéconomique et la relance post-crise.
Un espace budgétaire à reconquérir
Le gouvernement vise d’abord l’élargissement de la marge de manœuvre budgétaire. Pour y parvenir, il entend réduire les exonérations jugées peu productives et rationaliser les dépenses courantes. « Chaque franc économisé permettra d’amplifier l’investissement public », confie un conseiller du Trésor, soulignant l’importance d’une discipline accrue.
Mobilisation fiscale digitalisée
La digitalisation de la collecte figure au premier rang des réformes. Registres unifiés, télé-paiement sécurisé et interconnexion Douanes-Impôts devraient, selon le ministère des Finances, accroître la transparence et limiter les fuites de recettes. L’objectif affiché est une hausse de 0,8 point de PIB des recettes non pétrolières dès 2026.
Exploitation responsable des ressources
Le pétrole, le manganèse ou le bois continueront de soutenir le budget, mais l’État veut optimiser les contrats. Une cellule spécialisée vérifiera les droits exigibles et publiera des tableaux de bord trimestriels. « Nous visons un recouvrement intégral des redevances dues », précise un haut responsable des Hydrocarbures.
Portefeuille public sous surveillance
Les entreprises publiques, souvent critiquées pour leur faible rendement, feront l’objet d’un suivi rapproché. Un inventaire exhaustif des participations sera lancé et les dividendes attendus inscrits au budget initial. La Société nationale des pétroles du Congo et la SNDE ouvrent la voie en adoptant des plans de performance validés par le cabinet PwC.
Relance par l’investissement productif
Le projet de budget augmente la part des dépenses d’équipement à 30 % des crédits totaux. L’État ciblera les routes, l’accès à l’eau potable et la connectivité numérique. Selon l’économiste Landry Okombi, cette orientation « soutient la demande interne et dynamise les PME locales », créant un cercle vertueux pour l’emploi.
Dépense publique, efficacité recherchée
La généralisation du budget-programme doit améliorer la lisibilité de l’action publique. Indicateurs de performance, audits et revue semestrielle des projets deviendront systématiques. Le ministère du Plan assure que les retards de décaissement seront « divisés par deux » grâce à une plateforme partagée avec les bailleurs.
Réduction maîtrisée de la dette
Le service de la dette absorbe encore près d’un quart des recettes. Le gouvernement privilégie désormais les emprunts concessionnels et la renégociation des maturités. D’après la Caisse congolaise d’amortissement, l’encours devrait passer sous le seuil de 60 % du PIB en 2026, niveau compatible avec les normes régionales.
Diversification économique hors pétrole
Pour renforcer la résilience, Brazzaville mise sur l’agriculture, le numérique, le tourisme et les zones économiques spéciales. Un fonds de garantie de 50 milliards FCFA soutiendra les startups locales. « Le potentiel agro-industriel est immense, il faut l’exploiter », plaide Hervé Bouiti, président de la chambre d’agriculture.
Veille des risques budgétaires
Une unité d’analyse des risques budgétaires sera logée au ministère délégué au Budget. Elle suivra l’évolution des cours des matières premières, les aléas climatiques et les engagements quasi budgétaires. Ses alertes rapides devraient favoriser les ajustements avant que les déséquilibres ne s’amplifient.
Assiette fiscale élargie
L’exécutif prévoit la création d’un fichier foncier national et l’automatisation du transfert de données entre le centre d’identification des contribuables et les impôts. La TVA sur les hydrocarbures sera perfectionnée, tandis que les jeux de hasard verront leur fiscalité harmonisée pour limiter l’évasion.
Fin des avantages dérogatoires
Les nouvelles compensations fiscales contraires au code général sont proscrites. Les exonérations temporaires devront désormais comporter une clause d’extinction automatique. « Ces ajustements renforcent l’équité devant l’impôt », analyse maître Émilie Dzoussi, fiscaliste, qui y voit un signal positif pour les partenaires techniques.
Bancarisation et transparence
Tous les paiements de salaires, primes et dividendes transiteront par le circuit bancaire. Le gouvernement estime que la traçabilité ainsi obtenue facilitera la déclaration des revenus et la lutte contre l’injustice fiscale. Un impôt minimum sur ces flux complétera le dispositif lorsque la loi de finances sera adoptée.
Mesures sociales inclusives
Une enveloppe de 120 milliards FCFA est réservée aux filets sociaux, notamment les bourses étudiantes et l’assurance maladie universelle. Le ministère des Affaires sociales affirme que ces investissements « protégeront les plus vulnérables tout en stimulant la consommation intérieure ».
Regards d’experts et perspectives
La Commission économique pour l’Afrique salue « un cadre budgétaire réaliste adossé à des hypothèses prudentes ». Des analystes restent attentifs à l’exécution, jugeant la coordination inter-ministérielle décisive. Au Parlement, la majorité promet un débat constructif durant l’examen du texte prévu à la prochaine session ordinaire.
Une trajectoire vers la croissance inclusive
En fixant dix leviers clairs et mesurables, l’exécutif affiche la volonté de rétablir rapidement les équilibres et de soutenir la transformation structurelle. Les prochaines étapes se joueront dans la mise en œuvre quotidienne, où chaque ministère sera comptable de ses résultats devant les citoyens et leurs représentants.