Clôture solennelle de la neuvième session
Les bancs vert immaculé de l’hémicycle vibraient d’une gravité particulière lors de la cérémonie de clôture de la neuvième session ordinaire de l’Assemblée nationale, ce 15 août à Brazzaville, présidée par Isidore Mvouba sous le regard attentif des membres du gouvernement.
D’emblée, le président de la chambre basse a rappelé que les députés ne se bornent pas à voter des lois : ils doivent, selon lui, « marquer le gouvernement à la ceinture » afin de garantir l’efficacité des politiques publiques dans un contexte économique engagé sur la voie de la relance.
Un standing-ovation nourri a ponctué cette mise en garde, signe que la représentation nationale semble déterminer à conjuguer proximité avec l’exécutif et vigilance constructive, sans sacrifier la stabilité institutionnelle recherchée par la présidence de la République.
Des votes porteurs de retombées socio-économiques
Durant quatre mois de travaux, les députés ont inscrit trente-deux affaires à leur ordre du jour et adopté vingt-sept textes, un ratio salué par l’ancien Premier ministre Mvouba comme « l’illustration de la compétence et du patriotisme dont fait preuve notre chambre ».
Parmi ces projets, le vote créant les hôpitaux généraux de Sibiti et de Ouesso attire l’attention : à terme, ces infrastructures modernes doivent déconcentrer l’offre de soins, soutenir la politique de couverture sanitaire universelle et générer des emplois locaux, selon le ministère de la Santé.
Le financement de ces établissements, partiellement appuyé par la Banque de développement des États de l’Afrique centrale, illustre l’articulation entre législation nationale et partenariats multilatéraux que le Congo privilégie pour améliorer ses indicateurs socio-économiques tout en réduisant la pression sur le budget national.
Focus sur la coopération fiscale Congo-Türkiye
Autre décision majeure, l’autorisation de ratification de la convention fiscale avec la Türkiye entend écarter la double imposition pesant sur les entreprises congolaises et turques, levier incitatif pour les investisseurs qui envisagent la zone CEMAC comme plateforme d’accès aux marchés d’Afrique centrale.
Selon le fiscaliste Étienne Mabika, « la convention va réduire de près de 10 % le coût fiscal moyen des projets binationaux et faciliter l’échange d’informations entre administrations, ce qui renforce la transparence souhaitée par le Fonds monétaire international ».
Brazzaville mise ainsi sur le rapprochement diplomatique avec Ankara, déjà visible dans les secteurs de la construction et de l’énergie, pour diversifier ses partenariats au moment où les économies de la région reconfigurent leurs alliances face aux nouvelles chaînes logistiques mondiales.
Le suivi budgétaire gagne en rigueur
La neuvième session a aussi confirmé la volonté des députés de moderniser leur méthode de suivi budgétaire : ils ont créé un groupe de travail chargé d’évaluer trimestriellement l’exécution des dépenses publiques à partir des données du ministère des Finances et des rapports de la Cour des comptes.
Pour l’économiste Alice Bouity, cette approche collaborative « permettra d’anticiper les risques d’endettement excessif et de consolider la confiance des bailleurs, condition essentielle au succès du programme conclu avec la CEMAC ».
Le président Mvouba a insisté sur la dimension pédagogique du contrôle parlementaire, rappelant que les comptes rendus de commissions seront désormais publiés sous forme de synthèses accessibles au public, un pas supplémentaire vers la culture de responsabilité prônée par le chef de l’État.
Enjeux futurs et attente des territoires
En marge des travaux, plusieurs élus des départements de l’intérieur ont plaidé pour que les indicateurs de performance des services déconcentrés soient inclus dans le tableau de bord que l’Assemblée veut élaborer, afin de mieux relayer les aspirations des territoires éloignés de la capitale.
Le gouvernement, représenté par le ministre d’État chargé des Relations avec le Parlement, a salué cette orientation en soulignant que l’exécutif et le législatif partagent désormais « la même boussole », à savoir la matérialisation du Plan national de développement 2022-2026.
Conformément aux usages, le président de l’Assemblée a enfin adressé ses félicitations aux parlementaires ayant déposé des propositions de loi, estimant que l’initiative privée doit compléter l’agenda gouvernemental pour garantir une législation plus proche des besoins des citoyens et des réalités du terrain.
Le défi budgétaire reste néanmoins de taille : la dette publique avoisinait 63 % du PIB fin 2024, selon la Direction générale du Trésor. Les autorités misent sur la croissance pétrolière, mais aussi sur la montée en puissance de l’agro-industrie pour redresser le ratio.
Dans l’hémicycle, plusieurs interventions ont souligné la nécessité d’une collaboration renforcée avec les collectivités locales pour capter les retombées de ces filières. Le député de la Bouenza, Lambert Ngoma, a proposé la création d’un fonds d’équipement rural financé par une quote-part des recettes d’exportation.
Autre chantier attendu, la digitalisation des procédures parlementaires doit être accélérée. Un projet pilote de vote électronique est à l’étude, avec l’appui de l’Union interparlementaire, afin de réduire les délais de compilation et de publier, en temps réel, les positions de chaque élu.
À la veille de la prochaine session prévue en octobre, beaucoup d’observateurs estiment que la dynamique instaurée pourrait se traduire par une amélioration perceptible des services publics, préambule indispensable à la diversification économique et à l’attractivité recherchée par la République du Congo.