Un nouveau souffle pour les PME congolaises
Le 23 août, la salle des congrès de Pointe-Noire a résonné d’applaudissements, lorsque 500 porteurs de projets ont appris qu’ils disposeraient d’un financement cumulé de 63,8 milliards de francs CFA pour transformer leurs idées en entreprises viables.
L’annonce, faite lors du Forum Horizon Initiative et Créativité, synthétise l’ambition congolaise d’encourager un tissu entrepreneurial capable de diversifier l’économie au-delà des hydrocarbures, principale source de devises du pays.
Parmi les bénéficiaires, certains développeront des solutions numériques, d’autres miseront sur l’agro-transformation ou les services à la personne, reflétant la pluralité des besoins locaux et la vitalité créative de la jeunesse.
Le forum s’est tenu dans un contexte de reprise post-pandémie, où la recherche d’opportunités locales apparaît comme un rempart face aux turbulences économiques internationales.
Le rôle stratégique du Figa
Instrument public dédié aux petites et moyennes entreprises, le Fonds d’impulsion, de garantie et d’accompagnement offre une combinaison de prêts bonifiés, de garanties bancaires et d’assistance technique, afin de réduire le risque qui freine traditionnellement l’accès au crédit.
En sélectionnant dix projets pilotes financés chacun à dix millions de francs, le Figa entend créer des vitrines de réussite capables d’inspirer les institutions financières privées et de rassurer les investisseurs extérieurs.
« Nous misons sur l’effet de démonstration », confie un cadre du fonds, estimant que chaque entreprise pérenne pourra « engager au moins vingt salariés directs », ce qui placerait potentiellement un millier d’emplois nouveaux dans le paysage économique de Pointe-Noire.
Les expertises mobilisées ne se limitent pas aux finances. Des juristes, fiscalistes et comptables accompagnent les entrepreneurs pour sécuriser leurs statuts légaux et optimiser la gestion, un volet jugé crucial dans un environnement où la formalisation reste encore un parcours exigeant.
L’ambition nationale pour l’emploi des jeunes
Présent à la cérémonie de clôture, le Premier ministre Anatole Collinet Makosso a rappelé que l’initiative s’inscrit dans la vision du président Denis Sassou Nguesso, pour qui l’emploi des jeunes demeure « la première urgence sociale ».
Depuis 2021, plusieurs programmes, du Service national de développement au Plan d’accélération de la transformation, gravitent autour du même objectif : accroître les compétences et faciliter l’insertion professionnelle d’une génération confrontée à un marché de l’emploi encore limité.
Le gouvernement parie sur l’entrepreneuriat comme relais de croissance et vecteur d’autonomie, jugeant qu’un tissu de PME dynamiques peut compléter l’effort public d’embauche dans la fonction publique et les grandes sociétés nationales.
Des projets variés et ancrés localement
Parmi les lauréats du concours, un ingénieur propose de transformer les déchets plastiques des plages en pavés écologiques; une agronome veut multiplier les cultures de manioc amélioré pour réduire les importations de farine; un développeur imagine une application de géolocalisation des taxis.
Ces idées ont été retenues pour leur capacité à répondre à des défis bien identifiés : gestion environnementale, sécurité alimentaire, mobilité urbaine. Les membres du jury assurent avoir privilégié l’impact sociétal et la viabilité financière sur des critères uniquement technologiques.
En contrepartie de l’appui, chaque porteur de projet s’engage à respecter un calendrier de décaissement et à soumettre des rapports trimestriels, condition sine qua non pour bénéficier de l’accompagnement technique prévu pendant les trois premières années d’activité.
Un écosystème entrepreneurial en mutation
Les banques commerciales de la place observent avec intérêt l’arrivée de ce portefeuille sécurisé par l’État. Pour elles, l’adossement aux garanties du Figa réduit le coût du risque et ouvre la voie à des produits financiers plus adaptés aux start-ups locales.
En parallèle, plusieurs incubateurs, tels que BantuHub et le centre d’innovation de l’Université Marien Ngouabi, annoncent des programmes de mentorat pour aider les lauréats à formaliser leur gouvernance, renforcer leur marketing et intégrer les réseaux régionaux d’e-commerce.
Dans les quartiers périphériques, des espaces de coworking émergent, offrant une connexion internet stable et des formations ponctuelles en marketing digital, ce qui réduit les coûts fixes pour les jeunes structures et favorise la collaboration entre filières souvent cloisonnées dans la capitale économique.
« Le capital seul ne suffit pas », rappelle Aline France Etokabeka, coordinatrice du forum, qui insiste sur la formation continue et le partage d’expériences entre pairs pour transformer un projet financé en entreprise résiliente et créatrice de valeur durable.
Perspectives et enjeux à moyen terme
Si l’exécution des promesses financières se déroule comme prévu, les premiers bilans seront dressés à la fin de 2024. Les analystes y verront un indicateur de la capacité du Congo à promouvoir un développement endogène porté par ses propres entrepreneurs.
Les observateurs signalent toutefois que la réussite dépendra également de la capacité des infrastructures, notamment énergétiques et logistiques, à suivre le rythme. Des coupures d’électricité prolongées ou un transport routier insuffisant pourraient rogner la compétitivité des start-ups en phase d’industrialisation.
Au-delà des chiffres, c’est la confiance des jeunes dans les institutions qui sera mesurée. Un succès durable consoliderait l’idée que l’État, les partenaires techniques et le secteur privé peuvent converger, dans le respect des priorités nationales, pour élargir l’horizon professionnel d’une génération entière.
À court terme, l’impact sera compté en emplois; à long terme, la vraie mesure résidera dans la pérennité des entreprises et une croissance inclusive.