Un secteur en pleine effervescence à Pointe-Noire
Depuis cinq ans, les taxis-motos sillonnent les artères de Pointe-Noire, offrant une alternative rapide aux embouteillages. Entre 7 000 et 10 000 engins circulent chaque jour, selon les estimations syndicales, majoritairement conduits par de jeunes auto-entrepreneurs à la recherche d’un revenu quotidien stable.
Distribution des gilets : signal visuel et symbole de réforme
Vendredi, sur l’esplanade d’un lycée du quartier Patra, Bienvenu Mabiala, secrétaire général de la Fédération syndicale des professionnels des transports en commun, a remis les premiers gilets fluorescents numérotés aux adhérents. L’accessoire, visible à plus de 150 mètres, doit permettre une identification immédiate par les forces de l’ordre et les usagers.
Le décret 2024-324 : les nouvelles règles du jeu
Pris le 9 juillet, le décret encadre six volets essentiels : port de casques homologués pour passager et pilote, immatriculation des engins, limitation à un passager, interdiction d’exercice pour les non-nationaux et formation obligatoire débouchant sur un certificat de capacité.
Une vitesse maximale réaffirmée
Le texte fixe également la vitesse à ne pas dépasser à 50 km/h en zone urbaine. « Nous insistons : la rapidité ne doit pas compromettre la sécurité », rappelle Bienvenu Mabiala. Les contrôles radar, auparavant rares, devraient se multiplier autour des ronds-points et des sorties d’écoles.
Constats d’infractions persistantes
Casques absents, passagers multiples, plaques masquées : la liste des manquements relevés par la Fesyptc reste longue. Sur l’avenue Charles-de-Gaulle, un contrôle aléatoire réalisé mercredi a montré que trois motos sur cinq ne disposaient pas d’immatriculation définitive, malgré la gratuité de la procédure introduite depuis août.
La Fesyptc, médiatrice et pédagogue
Face à ces écarts, le syndicat joue un rôle d’interface. « Notre mission est de protéger l’outil de travail, pas de sanctionner », insiste Mabiala. Des séances de sensibilisation sont organisées chaque fin de semaine dans les quartiers Tié-tié et Loandjili pour expliquer les articles du décret et les démarches administratives.
La DGSP en soutien opérationnel
Mandatée pour veiller à l’application de la réglementation, la Direction générale de la sécurité présidentielle entend axer son action sur la prévention. Un responsable, sous couvert d’anonymat, confirme que les premières patrouilles mixtes avec la police territoriale débuteront dès la mi-novembre afin de « vérifier, conseiller puis verbaliser ».
Permis catégorie A : un sésame encore rare
Seuls 18 % des conducteurs de taxis-motos disposent du permis catégorie A, selon les chiffres de la direction départementale des transports. Pour réduire ce déficit, trois auto-écoles ont accepté de proposer une formule subventionnée à 35 000 FCFA, payable en deux tranches, grâce à un partenariat public-privé.
Spots radio et affiches de proximité
Une campagne de communication multicanal, financée par le fonds spécial d’aide à la sécurité routière, démarre cette semaine. Des jingles de trente secondes sur Radio Pointe-Noire et des affiches dans les gares routières rappellent les nouvelles obligations, le numéro vert ainsi que les sanctions encourues en cas de récidive.
Retombées économiques attendues
La professionnalisation du secteur devrait favoriser la micro-assurance et l’accès au crédit pour l’achat d’engins plus modernes. Le directeur d’une mutuelle locale anticipe une baisse de 20 % du taux de sinistralité d’ici un an, « condition indispensable pour que les banques accompagnent ces dizaines de petites entreprises roulantes ».
Des usagers globalement favorables
Rencontrée au marché de la côte Matève, Patricia, commerçante, estime que l’uniformisation des conducteurs « rassure les parents et incite les écoles à nouer des contrats de transport sécurisé ». Plusieurs chefs d’établissement évoquent déjà la création de points-relais dédiés aux taxis-motos devant les portails.
Les inquiétudes des conducteurs non affiliés
Tous ne partagent pas l’enthousiasme. Rodrigue, jeune pilote indépendant, craint une hausse des coûts. « Le gilet, le casque, la carte professionnelle, ça fait vite 60 000 FCFA. Sans micro-crédit, je risque de m’endetter », confie-t-il, tout en reconnaissant l’utilité des nouvelles règles pour sa propre sécurité.
Calendrier de mise en conformité
La Fesyptc prévoit une période transitoire de trois mois. Passé ce délai, chaque infraction relevée entraînera une amende comprise entre 5 000 et 30 000 FCFA, selon la gravité. Les conducteurs déjà inscrits bénéficieront d’un délai supplémentaire de quinze jours pour finaliser leur dossier.
L’appui des autorités locales
Le maire de l’arrondissement 1 – Lumumba salue l’initiative. Il promet un renforcement de l’éclairage public sur les axes fréquentés par les taxis-motos afin de « maximiser l’effet des gilets réflecteurs » et d’éviter les accidents nocturnes, en hausse de 12 % l’an dernier.
Formation aux premiers secours
Avec l’aide de la Croix-Rouge, le syndicat envisage d’intégrer une initiation aux gestes qui sauvent dans le programme obligatoire. Objectif : permettre aux conducteurs d’intervenir en cas d’accident jusqu’à l’arrivée des secours, réduisant ainsi la gravité des blessures liées aux chutes.
Traçabilité numérique à l’étude
Un projet pilote de code QR apposé sur les gilets est en discussion avec une start-up congolaise. Scanné, il afficherait le nom du conducteur, la plaque de la moto et l’assurance, offrant aux clients une vérification instantanée via smartphone, sans connexion internet permanente.
Impact environnemental mesuré
Selon le Centre d’observation de la mobilité urbaine, l’arrivée massive des taxis-motos a réduit de 7 % la consommation de carburant des taxis automobiles en centre-ville. Des discussions sont engagées pour introduire des modèles électriques, subventionnés, afin d’abaisser davantage les émissions de CO₂.
Coordination avec les transporteurs traditionnels
Le syndicat des chauffeurs de taxis jaunes plaide pour un partage équitable des stations. Un comité de suivi, réunissant toutes les parties, se tiendra chaque trimestre afin de prévenir les tensions et de mutualiser certaines infrastructures, notamment les abris voyageurs.
Regards de la population sur la sécurité
Les habitants interrogés notent déjà une légère diminution des comportements dangereux depuis l’annonce des contrôles. « Les excès de vitesse le long de la route de l’Aéroport semblent moins fréquents », observe un responsable de quartier, qui attribue ce changement à la perspective d’amendes dissuasives.
Objectif : pérenniser un modèle économique durable
Pour la Fesyptc, la remise des gilets n’est qu’une étape vers une professionnalisation totale. Le syndicat table sur un carnet d’entretien obligatoire et la création d’un fonds de garantie. « L’avenir du transport urbain sera multimodal et sûr », conclut Mabiala, confiant dans la capacité d’adaptation des conducteurs.
Vers une généralisation nationale
Si l’expérience de Pointe-Noire s’avère concluante, Brazzaville, Dolisie et Owando pourraient adopter le même dispositif dès le premier semestre 2025. Le ministère des Transports se dit prêt à harmoniser la réglementation, gage d’une mobilité moderne au service du développement économique et social du pays.