La jeunesse francophone au cœur de la realpolitik congolaise
Longtemps cantonnée au registre symbolique, la question de la jeunesse s’impose aujourd’hui comme un axe structurant de la diplomatie congolaise. À Brazzaville, l’entourage présidentiel rappelle volontiers que 76 % de la population est âgée de moins de trente ans, un paramètre démographique que le chef de l’État, Denis Sassou Nguesso, décrit désormais comme une « opportunité géostratégique ». Dans cet esprit, le député Yves Fortuné Moundelé-Ngollo Ehourossia, premier vice-président du Réseau des jeunes parlementaires de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF), trace une feuille de route où la jeunesse francophone n’est plus spectatrice mais actrice de l’agenda multilatéral.
Une diplomatie de réseau portée par l’Assemblée parlementaire de la Francophonie
Issu de la circonscription d’Ongogni, dans la Nkeni-Alima, le jeune élu souligne la nécessité d’une coalition générationnelle transfrontalière. Dans une récente intervention sur la chaîne CDFLIX, il a exhorté ses pairs à rejoindre massivement le Réseau des jeunes élus de l’APF afin de « parler d’une seule voix », anticipant ainsi les recompositions à l’œuvre dans les enceintes multilatérales. La démarche se veut inclusive : réunir les élus de quatre-vingt-quinze Parlements, harmoniser les priorités et dégager une capacité de négociation plus crédible face aux grands bailleurs et institutions onusiennes. Cet élan collectif s’inscrit dans la stratégie globale défendue par Brazzaville, qui voit dans la Francophonie un vecteur de rayonnement diplomatique complémentaire aux forums continentaux traditionnels.
Classe diplomatique d’Alexandrie : un accélérateur de compétences
La participation d’Yves Moundelé-Ngollo à la 4ᵉ édition de la Classe diplomatique de l’Université Senghor à Alexandrie illustre cette montée en compétences. Pendant trois semaines, une trentaine de jeunes leaders francophones ont disséqué les tensions géopolitiques émergentes, de la reconfiguration des chaînes de valeur aux nouvelles conflictualités hybrides. Des modules interactifs sur la gestion de crise ont permis de simuler des négociations multilatérales, expérience que l’intéressé juge « structurante » pour les débats parlementaires à Brazzaville. En coulisses, plusieurs diplomates confient que ces formations affinent un vivier susceptible de renforcer le dispositif congolais de représentation à l’étranger, tout en consolidant le multilinguisme dans les enceintes internationales.
Enjeux électoraux : un capital démographique décisif
À l’approche de la prochaine échéance présidentielle, le poids arithmétique des moins de vingt-cinq ans aiguise l’intérêt des états-majors. « La jeunesse choisira le cap de la République », martèle Moundelé-Ngollo, conscient à la fois de la force mobilisatrice et de la vulnérabilité de cet électorat aux discours de rupture. D’ores et déjà, le Parlement planche sur des dispositifs d’encadrement de la campagne numérique afin de prévenir les manipulations. Le gouvernement, pour sa part, met en avant les initiatives d’employabilité et d’inclusion financées par le Fonds national de l’emploi, dossier suivi personnellement par le président Sassou Nguesso pour crédibiliser l’offre institutionnelle. Cet arrimage des politiques publiques aux attentes concrètes de la jeunesse entend désamorcer les tentations de surenchère populiste.
Vers un pacte générationnel pour la Francophonie
Au-delà des frontières congolaises, le débat rejoint une interrogation plus vaste : comment préserver la cohésion d’un espace francophone confronté à la rivalité des puissances et à la fragmentation des identités ? Pour le vice-président du Réseau, la réponse passe par un engagement « franc et durable » des jeunes dans toutes les sphères de décision, qu’il s’agisse des conseils municipaux, des entreprises culturelles ou des plateformes sportives. En citant l’appel de Boutros Boutros-Ghali à « préparer l’avenir par l’éducation, la coopération et la solidarité », il inscrit son propos dans la continuité des principes multilatéraux. L’objectif est clair : transformer la démographie en dividende, éviter qu’elle ne devienne un facteur d’instabilité et projeter ainsi une image résolument constructive de la République du Congo sur la scène régionale.