Forêts du Congo sous pression : état des lieux alarmant
Des bribes de forêt arrachées, des nappes verdoyantes trouées ; dans plusieurs départements, les images prises par des téléphones de villageois témoignent d’un paysage bouleversé. Du Kouilou à la Cuvette-Ouest, l’exploitation aurifère progresse souvent plus vite que les patrouilles forestières.
Selon des sources locales concordantes, des centaines d’hectares seraient déjà transformés en mares boueuses où stagnent huiles et produits chimiques. Ces zébrures brunes, visibles sur les cartes satellites gratuites, contrastent avec la canopée continue qui fait du Congo un pilier du Bassin du Congo.
Les scientifiques alertent sur une déforestation diffuse mais cumulative. « Chaque trou ouvert fragilise l’ensemble », résume un ingénieur de l’Université Marien-Ngouabi, rappelant que les forêts congolaises captent près de 600 millions de tonnes de CO₂ par an, un rôle crucial dans la régulation climatique régionale.
Orpaillage clandestin : quels impacts écologiques ?
Le mercure, le cyanure et parfois l’arsenic servent à amalgamer l’or sorti du sous-sol. Déversés sans contrôle, ces métaux lourds se répandent dans la Louetsi, la Lefini ou le Niari, contaminant poissons, bétail et puits que les familles utilisent quotidiennement.
À Mayoko, des éleveurs affirment avoir perdu plusieurs vaches après une crue chargée de résidus gris. « L’eau moussait, les bêtes ont bu, elles sont tombées », raconte un habitant de Lehala, qui n’ose plus planter manioc sur un sol devenu caustique.
Les coupes de bois non planifiées aggravent l’érosion. Les rigoles creusées pour laver le minerai sectionnent les couloirs de faune. Gorilles, céphalophes ou pangolins quittent alors les lisières et s’approchent des cultures, accentuant les conflits entre faune sauvage et communautés rurales.
Mobilisation gouvernementale et arsenal juridique renforcé
Face aux outrages constatés, le gouvernement multiplie les descentes inopinées. En avril dernier, le Premier ministre Anatole Collinet Makosso s’est rendu à Dimonika pour constater l’avancée des chantiers illégaux et rappeler que le code forestier de 2020 reste la boussole de toute activité.
« Nous ferons un audit environnemental, zone par zone, et nous ajusterons les réserves en conséquence », a-t-il indiqué devant la presse. L’annonce a été suivie d’opérations conjointes police-eaux-et-forêts qui ont saisi pelles hydrauliques, motopompes et plus de deux cents grammes d’or.
Le cadre législatif s’est étoffé. La loi d’orientation sur le développement durable de 2022 impose désormais des plans de réhabilitation des sites miniers et des garanties financières. Les contrevenants encourent des amendes pouvant atteindre 100 millions de francs CFA et la confiscation du matériel.
Michel Innocent Peya, témoin et relais de la vision verte
Dans ses ouvrages, dont le récent « Vision verte de Denis Sassou-Nguesso face à un monde en danger », l’écrivain-chercheur Michel Innocent Peya retrace les engagements du chef de l’État pour une gouvernance écologique fondée sur la foi et la responsabilité collective.
Invité régulièrement dans les forums internationaux, Peya explique que la préservation des forêts congolaises constitue une « offrande » au climat planétaire. Ses analyses ont valu à la République du Congo d’être citée comme pays leader des grands bassins forestiers lors des précédentes Conférences des parties.
Pour beaucoup d’étudiants, ses livres servent de manuel de plaidoyer. « Le message est clair : protéger l’arbre, c’est garantir la stabilité économique demain », résume Charlotte Mavoungou, doctorante en gestion durable. Elle appelle à distribuer l’ouvrage dans toutes les bibliothèques municipales.
COP30 de Belém : une tribune pour les ambitions congolaises
Du 10 au 21 novembre, la COP30 se tiendra à Belém, au cœur de l’Amazonie brésilienne. La délégation congolaise, très attendue, devrait présenter des indicateurs précis sur la séquestration de carbone ainsi que de nouvelles propositions de financement des communautés riveraines.
Les axes portés par Michel Innocent Peya sur l’union des grands bassins forestiers pourraient nourrir le débat. Un document de travail circule déjà, proposant un mécanisme de compensation carbone commun à l’Amazonie, au Congo et à l’Asie du Sud-Est afin d’augmenter l’attractivité des crédits verts.
Pour atteindre les objectifs, Brazzaville mise sur un partenariat étroit avec la Banque africaine de développement et le Fonds bleu pour le Bassin du Congo. Les discussions porteront également sur la certification internationale des concessions forestières respectueuses de la biodiversité et des droits des populations autochtones.
Communautés locales : entre inquiétude et espérance
À Kelle comme à Mbinda, les leaders coutumiers réclament plus de contrôles, mais aussi des alternatives économiques. Plusieurs associations plaident pour des coopératives d’orpaillage légal encadrées par l’État, avec interdiction stricte des substances toxiques et obligation de reboiser après extraction.
Le ministère de l’Environnement annonce l’élaboration d’un guide pratique destiné aux préfets, expliquant la procédure d’expulsion des sites illégaux et les mécanismes de suivi post-fermeture. Son adoption, prévue avant la fin de l’année, pourrait harmoniser les interventions et rassurer les populations.
Les organisations de la diaspora suivent de près ces évolutions. Sur les réseaux sociaux, des étudiants basés à Paris et Montréal organisent des campagnes de sensibilisation, collectant des fonds pour distribuer des filtres à eau et planter des essences locales le long des rivières impactées.
