Une visite stratégique au Sénat
Le bâtiment lumineux du Palais des congrès, siège du Sénat, a accueilli le 3 novembre une délégation du Conseil supérieur de la liberté de communication conduite par son président, Médard Milandou Nsonga.
Face à Pierre Ngolo, président de la chambre haute, l’autorité de régulation a décliné ses ambitions de partenariat pour un paysage médiatique apaisé, condition nécessaire au bon déroulement de la présidentielle de mars 2026.
Les échanges ont duré près d’une heure dans une atmosphère qualifiée de cordiale par les deux camps, illustrant la volonté institutionnelle de renforcer la démocratie congolaise par une communication responsable et respectueuse des diversités.
Former les acteurs des médias avant 2026
Premier axe détaillé par le CSLC : la montée en compétences des journalistes, animateurs de radios communautaires et gestionnaires de plateformes numériques afin d’éviter les dérapages verbaux souvent constatés en période électorale.
Médard Milandou Nsonga a expliqué avoir déjà identifié plusieurs partenaires techniques, nationaux et étrangers, prêts à financer des modules portant sur l’éthique, la vérification des faits et la couverture équilibrée des meetings de campagne.
Selon lui, une salle multimédia pourrait être opérationnelle à Brazzaville dès le premier trimestre 2025 pour accueillir les sessions interactives, tandis que des ateliers itinérants visiteront Pointe-Noire, Dolisie et Owando.
Le projet inclut également un volet jeunesse : des modules d’initiation destinés aux étudiants de l’Institut universitaire des métiers de l’information, afin de leur transmettre très tôt les réflexes de recoupement et la prudence nécessaire face aux contenus viraux.
Le Sénat, arbitre d’un débat équilibré
Pour Pierre Ngolo, le rôle du Sénat ne se limite pas à voter des lois ; il consiste également à préserver un climat de tolérance où chaque sensibilité politique peut s’exprimer sans craindre la diffamation ni l’intimidation.
Le président de la chambre haute a assuré son hôte du soutien législatif nécessaire, évoquant la possibilité d’actualiser la loi portant liberté de la presse afin d’intégrer les nouveaux défis posés par les réseaux sociaux.
Il a déclaré que « l’équité de parole est un socle de paix » avant de saluer l’approche pédagogique du CSLC, qu’il voit comme un complément indispensable aux efforts du Parlement pour consolider l’unité nationale.
Vers un dispositif anti-désinformation
Au-delà de la formation, le CSLC veut mettre en place un observatoire numérique capable de détecter en temps réel les fausses informations susceptibles d’envenimer la campagne.
Cet outil s’appuiera sur des algorithmes développés par de jeunes ingénieurs congolais et sur un réseau de correspondants régionaux chargés de signaler rapidement tout contenu douteux.
Chaque signalement fera l’objet d’une vérification croisée avec les rédactions concernées, puis d’un rappel public des faits exacts, afin de couper court aux rumeurs avant leur propagation.
Le CSLC compte, en outre, encourager les influenceurs à signer une charte de bonne conduite qui les engage à distinguer opinion, satire et information vérifiée, une première dans la sous-région.
Pour renforcer ce dispositif, un protocole d’entente sera proposé à l’Agence de régulation des postes et communications électroniques afin de faciliter l’identification technique des sites anonymes diffusant de la désinformation massive.
Prochaines étapes de la coopération
Les deux institutions se sont accordées pour tenir, avant la fin de l’année, une série de réunions techniques destinées à planifier les formations, fixer les budgets et définir les indicateurs d’évaluation.
Un comité restreint, composé de sénateurs, de commissaires du CSLC et d’experts indépendants, sera mis sur pied pour suivre l’exécution des décisions et rendre compte régulièrement à l’opinion publique.
La feuille de route commune prévoit aussi une campagne d’information citoyenne, diffusée sur les radios rurales et les réseaux sociaux, pour rappeler à chaque électeur son droit à une information fiable et les recours possibles en cas de propos diffamatoires.
Interrogé à l’issue de l’audience, Médard Milandou Nsonga a résumé l’enjeu : « Une information saine préserve la paix, et la paix consolide le développement. » Un message que Pierre Ngolo a jugé « parfaitement aligné sur la vision du chef de l’État ».
Réactions des rédactions congolaises
Joint par nos soins, le rédacteur en chef d’un grand quotidien privé de Pointe-Noire se réjouit de voir les institutions « travailler main dans la main pour assainir le secteur », tout en plaidant pour une concertation régulière avec les éditeurs.
Du côté des radios communautaires, l’on salue particulièrement la perspective de formations gratuites, jugées indispensables pour éviter que l’achat d’espace antenne ne devienne la seule porte d’entrée des candidats fortunés.
Les organisations de la société civile suggèrent toutefois d’impliquer les blogueurs, très suivis par la jeunesse, afin que la lutte contre les fausses nouvelles ne se limite pas aux médias traditionnels.
Un précédent encourageant en 2022
En 2022, lors des élections législatives, un premier partenariat ponctuel entre le CSLC et la télévision publique avait déjà permis la mise en place d’un fact-checking quotidien apprécié du public.
Selon les données recueillies par l’institution, le nombre de plaintes pour propos haineux avait alors chuté de 40 %, un signe que la pédagogie et la vigilance technique peuvent porter leurs fruits.
