Un vecteur de cohésion sociale au cœur de Brazzaville
À l’ombre des flamboyants qui bordent le lycée technique 5 Février 1979, les cris des supporters couvrent le vrombissement discret de la ville. La quinzième édition du tournoi « Ouenzé Lisanga » a pris ses quartiers d’été sous le regard attentif du député de la première circonscription électorale de Ouenzé, Juste Désiré Mondélé, qui en a donné le coup d’envoi le 20 juillet. Derrière l’effervescence populaire, l’initiative répond à une exigence sociétale de première importance : offrir à la jeunesse un espace d’expression, de rencontre et de dépassement de soi pendant la trêve scolaire. À travers seize équipes issues des dix quartiers du cinquième arrondissement, les organisateurs entendent transformer un simple tournoi de vacances en acte politique de proximité, capable de cimenter les solidarités locales et de prévenir l’oisiveté estivale.
Un instrument diplomatique intérieur porté par les élus
Dans un pays où l’imaginaire collectif demeure largement façonné par les exploits des Diables Rouges, chaque ballon qui roule sur la pelouse synthétique revêt une dimension symbolique. « La jeunesse de Ouenzé, donc de Brazzaville, est la véritable gagnante », a rappelé le député Mondélé, avant de remettre des kits d’équipements flambant neufs aux capitaines. Ce geste, empreint de pragmatisme, s’inscrit dans la diplomatie intérieure voulue par les autorités : rapprocher l’action publique des citoyens par des initiatives tangibles et visibles. Le sport, à cet égard, se révèle un canal d’influence douce, apte à renforcer la légitimité institutionnelle et à conforter l’image d’un État attentif aux besoins de sa population, conformément aux orientations du président Denis Sassou Nguesso en matière de développement humain.
La stratégie nationale du sport et l’appui présidentiel
Au-delà de l’arrondissement, Ouenzé Lisanga trouve un écho dans la stratégie nationale de promotion du sport adoptée par le gouvernement, laquelle ambitionne de faire de l’activité sportive un moteur d’inclusion et de santé publique tout en repérant les talents susceptibles d’intégrer le dispositif fédéral. Le ministère en charge des Sports multiplie ainsi les partenariats avec les collectivités pour financer la réhabilitation des plateaux, la formation des encadreurs et la modernisation des matériels. La tenue régulière d’un tournoi depuis quinze ans atteste de la durabilité d’une politique qui, malgré les contraintes budgétaires, privilégie la proximité ; elle illustre aussi la ruche d’idées et d’énergies que représente le Congo-Brazzaville, prêt à capitaliser sur l’engouement populaire que suscite le football afin de consolider son rayonnement régional.
Les anciens internationaux, passerelle générationnelle
La présence d’anciennes gloires telles qu’Ange Ngapi, Willy Endzanga ou Franchel Ibara a conféré à l’ouverture une résonance patrimoniale. « Je me revois jouer dans les rues poussiéreuses », a confié l’ex-ailier Chaleur Mouyabi, soulignant la nécessité de « multiplier ces rencontres pour découvrir les talents souvent étouffés ». Le témoignage illustre la transmission intergénérationnelle à l’œuvre, indispensable à la consolidation d’une culture sportive nationale. En tendant symboliquement la main aux plus jeunes, ces figures rappellent que tout écosystème de performance repose sur la mémoire collective et l’engagement citoyen des aînés, un atout que de nombreuses fédérations africaines envient au modèle congolais.
Perspectives économiques et enjeux de gouvernance sportive
Au-delà de la dimension sociale, le tournoi génère une micro-économie informelle faite de vendeurs ambulants, d’artisans et de petites entreprises de communication locale. Cette effervescence conforte l’idée défendue par plusieurs économistes brazzavillois selon laquelle la filière sportive, si elle est structurée, pourrait devenir un relais de croissance non négligeable. Les discussions engagées avec le secteur privé pour parrainer les éditions futures témoignent de l’intérêt naissant des opérateurs, qui y voient un levier de responsabilité sociétale mais aussi une opportunité de visibilité. Dans cette optique, la gouvernance du tournoi, encadrée par les autorités municipales et les comités de quartier, joue la carte de la transparence afin de fidéliser partenaires et mécènes. Cette exigence rejoint la volonté étatique de promouvoir une gestion vertueuse, gage d’attractivité pour les investissements sportifs à long terme.
Un terrain d’avenir pour la diplomatie sportive congolaise
Lorsque l’arbitre a sifflé le match nul inaugurant l’épreuve entre AS Dépôt et l’équipe 42 Ans, la foule a salué l’équité du résultat, preuve que l’esprit de compétition ne saurait éluder la fraternité. Sur ce rectangle vert, l’unité nationale se conjugue au futur. En façonnant un cadre d’expression régulier, Ouenzé Lisanga contribue déjà à alimenter les sélections de jeunes espoirs qui, demain, porteront les couleurs du Congo dans les compétitions continentales. Ce faisant, le tournoi matérialise la doctrine gouvernementale visant à faire du sport un vecteur de paix, de santé et de prospérité partagée. Les regards tournés vers le tricolore au centre du terrain disent l’aspiration collective : que l’élan né sur la pelouse de Ouenzé rayonne jusqu’aux tribunes du stade Massamba-Débat et, au-delà, sur la scène africaine. La balle est lancée, elle roule déjà vers l’horizon des ambitions nationales.