Agression sur la route Louamba–N’Kayi
La nuit de dimanche à lundi a basculé dans la violence sur la route poussiéreuse reliant Louamba à N’Kayi, dans la Bouenza. Un père et sa fille y ont été sauvagement attaqués à la machette, déclenchant l’une des plus vastes chasses à l’homme récentes dans le district.
Selon le commissariat central de N’Kayi, l’embuscade s’est produite vers 19 h, à une quinzaine de kilomètres du village. Trois individus auraient surgi d’un bosquet, visant la moto Jakarta neuve de leur victime. L’assaut a duré quelques minutes, sous une obscurité qui a facilité la fuite des agresseurs.
Un motocycliste arrivant en sens inverse a entendu les cris. Voyant les silhouettes armées, il a aussitôt rebroussé chemin pour alerter le poste de police de Louamba. Ce réflexe, salué par les autorités, a permis l’évacuation rapide des blessés et le déclenchement de l’opération de recherche.
Victimes soignées à N’Kayi : pronostic rassurant
Transportés dans une ambulance municipale, Kévin Moukiama, 49 ans, présentait une plaie profonde au cuir chevelu et plusieurs entailles au visage. Sa fille Patchélie, 15 ans, souffrait d’une lésion au bras gauche. Tous deux ont été admis au service d’urgences de l’Hôpital de référence de N’Kayi.
Le docteur Faustin Nkouka se veut rassurant : « Le père a subi une suture et reste en observation, mais son état est stable. La jeune fille sortira sous 48 heures si les examens confirment l’absence de fracture ». Les proches, soulagés, remercient les soignants et les forces de l’ordre.
Trois suspects identifiés : enquête élargie vers Madingou
Une fois saisi, l’officier de police judiciaire a recueilli le témoignage de la victime. Kévin Moukiama affirme avoir reconnu un fils et deux neveux du secrétaire général du comité du village Kilemonzambi. Ces éléments d’identification ont permis d’ouvrir un dossier d’information transmis au parquet de Madingou.
Les trois hommes, âgés de 18 à 26 ans, auraient fui dans les plantations qui bordent la Nationale 1. La gendarmerie de Madingou coordonne désormais un ratissage avec des patrouilles mixtes appuyées par des chiens de piste. Les enquêteurs disent disposer de « pistes sérieuses » conduisant vers le Nord.
« La collaboration citoyenne reste décisive », rappelle le commissaire principal Armel Mabiala. À Louamba, un numéro vert a été affiché devant la mairie afin de collecter tout renseignement anonyme. Plusieurs témoins auraient déjà signalé la présence des fugitifs près d’un chantier de gravier, sans qu’un domicile fixe soit confirmé.
Criminalité aux armes blanches : un défi régional
L’agression relance le débat sur la hausse des attaques à la machette attribuées aux groupes de jeunes dits « bébés noirs ». Dans la Bouenza, la police a enregistré 27 cas depuis janvier, contre 19 l’an dernier. Les victimes sont souvent des motocyclistes isolés transportant des marchandises ou du numéraire.
Pour le sociologue Isidore Goma, « ces violences naissent d’un cocktail de chômage, de consommation de psychotropes et d’absence de loisirs structurés ». Il préconise la multiplication de programmes d’insertion et de patrouilles de proximité, afin d’endiguer l’engrenage avant que la criminalité n’échappe au contrôle.
Le ministère de l’Intérieur a, de son côté, annoncé en septembre l’affectation de nouveaux effectifs à la Brigade anticriminalité de la Bouenza. Des opérations nocturnes, appuyées par des drones de surveillance, ont déjà permis plusieurs arrestations à Nkayi et Loudima. Les autorités réaffirment leur volonté d’agir « avec fermeté ».
Le phénomène reste cependant marginal à l’échelle nationale, rappelle le chercheur Damien Ondongo, qui note que neuf départements sur douze affichent une baisse des délits violents. « C’est précisément pour éviter une contagion que la réponse doit être rapide », souligne-t-il, saluant la coopération actuelle entre police et justice.
Habitants solidaires : pression pour une justice rapide
À Louamba, la relative quiétude paysanne laisse place à une colère contenue. Devant l’école primaire, des femmes ont improvisé une chaîne de prières pour la guérison des victimes. « Nous voulons que nos chemins restent sûrs », explique Thérèse Mabiala, conseillère locale, plaidant pour une diligence exemplaire de la justice.
Les autorités coutumières, réunies mardi sous le fromager central, exhortent la population à ne pas céder à la vendetta. Le chef Kolelas a rappelé que « seule la loi protège durablement nos communautés ». En attendant, un couvre-feu non officiel s’installe dès 20 h, signe d’une vigilance collective renforcée.
Le parquet assure que le dossier sera traité en comparution immédiate dès l’interpellation des suspects. Une perspective qui rassure les cultivateurs de manioc fréquemment contraints de passer par le tronçon incriminé pour écouler leurs récoltes. « La confiance reviendra à mesure que justice sera rendue », estime un commerçant de N’Kayi.
Renforcement sécuritaire : ce qui se prépare
Dans le cadre du Plan national de sécurité, le préfet de la Bouenza annonçait la création d’un poste avancé de police mobile entre Louamba et Tubé. L’infrastructure, dotée d’un groupe électrogène et d’un mât d’éclairage solaire, devrait être opérationnelle avant la fin d’année, selon une note préfectorale.
Parallèlement, une campagne de marquage gratuit des motos commencera dès la semaine prochaine. Objectif : décourager le recel et faciliter l’identification des engins volés. Les propriétaires recevront une puce RFID et une plaque inviolable financées par un partenariat public–privé associant la mairie et plusieurs concessionnaires de la place.
Enfin, les autorités éducatives veulent introduire une « journée anti-violence » dans les collèges, avec ateliers sur le civisme et la gestion des conflits. Des psychologues interviendront pour sensibiliser les adolescents à la dangerosité des armes blanches, tandis qu’un concours de rap portera sur la promotion de la paix.
