Des entrepreneurs belges en visite officielle
Brazzaville a accueilli, le 13 octobre, l’ouverture d’une mission économique inédite conduite par dix-huit sociétés belges, venues scruter les secteurs porteurs de la République du Congo. Sous l’égide des deux ambassades, la table ronde inaugurale s’est tenue dans une atmosphère résolument collaborative.
Le ministre congolais du Développement industriel a salué « la confiance renouvelée d’anciens partenaires européens désireux d’investir dans une croissance diversifiée ». Son homologue belge, envoyé spécial pour le Commerce extérieur, a évoqué un « moment charnière » pour bâtir des chaînes de valeur mixtes respectueuses de l’environnement.
Opportunités d’affaires au Congo
Les délégations se sont réunies à huis clos avant d’ouvrir la première séquence, dédiée aux opportunités d’affaires. Michel Djombo, président de l’Union patronale et interprofessionnelle du Congo, a rappelé que le pays possède 10 millions d’hectares arables et un potentiel énergétique encore largement inexploité.
Dans le même atelier, Henry René Diouf du PNUD a mis en exergue la stabilité macroéconomique qui s’installe depuis la relance post-pandémie. Le retour progressif à la croissance, estimée à 4,3 % cette année, crée selon lui « un climat rassurant pour les investisseurs de long terme ».
Construction et croissance des infrastructures
Le deuxième axe, tourné vers le secteur de la construction, a retenu toute l’attention des visiteurs. Federica Petrucci, cheffe adjointe de la coopération européenne, a décrit « une dynamique soutenue d’infrastructures routières, portuaires et sociales », ouvrant la porte à des contrats de fourniture de matériel et d’ingénierie.
À titre d’exemple, elle a mentionné le projet de réhabilitation de 600 kilomètres de routes nationales, déjà cofinancé par l’Union européenne et la Banque africaine de développement. Pour les entreprises belges du génie civil, il s’agit d’un marché estimé à plus de 200 millions d’euros sur trois ans.
Partenariat public-privé mis en avant
Troisième thème, l’intégration accrue du secteur privé dans les grands chantiers publics a suscité de nombreuses questions pratiques. Les représentants du ministère congolais des Infrastructures ont précisé que la loi portant Partenariat public-privé, adoptée en 2021, offre désormais des garanties juridiques et fiscales compétitives.
« Nous invitons les opérateurs belges à créer des coentreprises avec les PME locales pour répondre aux appels d’offres », a souligné un cadre technique. Selon lui, cette stratégie favorisera le transfert de compétences, condition essentielle à la pérennité des futurs ouvrages tout en maximisant l’impact social national.
Rencontres B2B et accords naissants
En marge des panels, plus de 120 rendez-vous B2B ont été programmés via une plateforme numérique mise en place par la Chambre de commerce de Brazzaville. Les secteurs les plus sollicités sont l’agro-industrie, l’énergie solaire, la logistique portuaire et les services numériques à destination des collectivités.
Plusieurs entreprises congolaises, dont AgroMap et Eni Congo, annoncent avoir signé des protocoles d’accord de principe avec leurs homologues belges. Un dirigeant d’AgroMap évoque une joint-venture pour la transformation du manioc en amidon industriel, « un marché local sous-exploité mais à forte valeur ajoutée ».
Cap sur Pointe-Noire
La mission poursuivra sa route vers Pointe-Noire, cœur énergétique du pays, où sont prévues des visites des terminaux pétroliers et du futur parc industriel Malonda. Objectif affiché : présenter la chaîne logistique maritime et ferroviaire qui relie le port en eaux profondes au reste du territoire.
Du côté congolais, les attentes restent élevées. Le patronat souhaite que ces échanges débouchent sur une hausse tangible des investissements directs étrangers dès 2024. Les autorités rappellent leur ambition d’atteindre un taux de transformation locale de 25 % des matières premières agricoles d’ici cinq ans.
Atouts régionaux mis en lumière
Les représentants belges s’estiment, eux, séduits par l’accès privilégié du Congo aux marchés de la CEMAC et par la future Zone de libre-échange continentale africaine. « La combinaison d’une main-d’œuvre jeune et d’un positionnement géographique stratégique offre un terreau compétitif », résume Philippe Lust, chef de délégation.
Pour l’analyste économique Irène Nkounkou, la visite témoigne d’un intérêt européen renouvelé pour l’Afrique centrale. Elle estime toutefois que la matérialisation des projets dépendra de la qualité du suivi administratif et de l’amélioration continue du climat des affaires, deux priorités inscrites dans la feuille de route gouvernementale.
Calendrier de suivi bilatéral
Les organisateurs annoncent la tenue, en décembre, d’un comité mixte pour dresser un premier bilan et préparer une éventuelle mission retour d’entrepreneurs congolais à Bruxelles. Cette programmation, saluée par les deux chancelleries, devrait consolider la dynamique enclenchée et élargir le portefeuille de projets collaboratifs.
À Brazzaville comme à Pointe-Noire, la mission économique belgo-congolaise se veut un « laboratoire d’avenir », selon les mots du ministre du Commerce extérieur. Son ambition finale est de traduire les poncifs diplomatiques en contrats créateurs d’emplois et de valeur ajoutée, inscrivant ainsi un partenariat gagnant-gagnant dans la durée.
Un volet numérique pour la jeunesse
Un volet numérique a aussi été intégré, avec la signature d’un mémorandum visant la formation au code pour 200 jeunes congolais. Financé conjointement par l’Agence wallonne à l’exportation et le ministère congolais du Numérique, le programme démarrera début 2025.