Financement inédit de la BAD : un signal fort pour l’économie marocaine
En approuvant, le 30 juin 2025, une enveloppe de plus de 300 millions d’euros destinée au Royaume du Maroc, la Banque africaine de développement (BAD) confirme son rôle de catalyseur de la transformation structurelle du continent. Le Conseil d’administration de l’institution basée à Abidjan a, en effet, donné son feu vert à deux opérations phares : la deuxième phase du Programme d’appui au renforcement de la gouvernance économique et de la résilience au changement climatique (PGRCC II) pour 181,8 millions d’euros, et le Programme d’appui et de financement de l’entrepreneuriat pour la création d’emplois (PAFE-Emplois) doté de 119 millions d’euros. Par ce geste, l’institution panafricaine envoie un message clair au marché : l’alignement des politiques publiques marocaines sur les impératifs de durabilité et de compétitivité séduit les bailleurs multilatéraux.
Résilience climatique et gouvernance économique au cœur du PGRCC II
Le PGRCC II s’inscrit dans la continuité d’une première phase déjà saluée pour son apport à la rationalisation budgétaire et à l’optimisation de la dépense publique. Cette nouvelle tranche entend moderniser les secteurs de l’eau et de l’énergie, considérés comme stratégiques dans un royaume où la raréfaction hydrique et la dépendance énergétique pèsent sur la balance des paiements. En renforçant la transparence budgétaire et en dynamisant les investissements privés verts, le programme nourrit l’ambition de préparer l’économie marocaine aux chocs climatiques, tout en améliorant la gouvernance macro-économique. L’accent mis sur les indicateurs de performance souligne la volonté de la BAD et des autorités de Rabat de privilégier une approche axée sur les résultats plutôt que sur la simple injection de liquidités.
PAFE-Emplois : la dynamique entrepreneuriale comme moteur sociétal
Le second pilier du financement, le PAFE-Emplois, intervient dans un contexte où le taux de chômage des jeunes, oscillant autour de 32 %, reste préoccupant malgré une reprise post-pandémique plus vigoureuse qu’attendu. En mobilisant 119 millions d’euros, la BAD entend épauler les très petites et moyennes entreprises (TPME), colonne vertébrale de l’économie nationale. Le dispositif prévoit d’améliorer l’accès au crédit, de renforcer les incubateurs publics et de stimuler un entrepreneuriat inclusif qui accorde une place centrale aux femmes. La nouvelle feuille de route marocaine pour l’emploi, adossée à ce programme, vise l’insertion professionnelle de 1,5 million de jeunes d’ici 2030. « Ces deux opérations conjuguent leurs efforts pour consolider la compétitivité de l’économie, renforcer sa résilience et créer une dynamique d’investissement », a rappelé Achraf Tarsim, responsable du Bureau pays de la BAD.
Synergies régionales et enseignements pour le continent
Au-delà de l’effet immédiat sur l’économie marocaine, l’opération éclaire les contours d’une stratégie plus large de la BAD : mutualiser les leçons tirées de ses cinquante années de présence au Maroc pour inspirer d’autres partenaires africains. Les progrès enregistrés dans la modernisation des transports, de l’agriculture ou de la protection sociale constituent autant d’études de cas transférables. Les autorités de Brazzaville, d’Abuja ou d’Addis-Abeba observent avec intérêt la capacité marocaine à associer réforme structurelle et stabilité politique. La convergence entre objectifs climatiques et impératifs de création d’emplois répond d’ailleurs aux priorités formulées lors des dernières assemblées annuelles de la BAD, où la sécurité alimentaire et la transition énergétique furent érigées en chantiers continentaux.
Perspectives et défis de mise en œuvre jusqu’en 2030
Si l’ambition est manifeste, la mise en œuvre n’en demeure pas moins exigeante. L’intégration du suivi-évaluation dans la chaîne des dépenses publiques devra être consolidée afin de garantir l’absorption complète des fonds. L’enjeu de la coordination inter-ministérielle, particulièrement entre les portefeuilles de l’Économie, de la Transition énergétique et de l’Inclusion économique, conditionnera la pérennité des réformes. Sur le volet entrepreneurial, la simplification des procédures administratives et la vulgarisation de la finance verte pourraient amplifier l’effet multiplicateur des ressources mobilisées. La BAD, forte d’un portefeuille historique avoisinant 15 milliards d’euros au Maroc, mise sur la proximité technique avec les équipes nationales pour sécuriser les jalons trimestriels. Le pari est clair : transformer cette manne financière en opportunités tangibles pour la jeunesse, tout en érigeant la résilience climatique en avantage compétitif durable.
Un modèle de partenariat public-privé au service d’une croissance inclusive
Au terme de cet accord, le Maroc confirme son statut de laboratoire continental du partenariat public-privé axé sur la durabilité. Les bailleurs bilatéraux et les marchés de capitaux suivront de près la matérialisation des engagements pris, conscients que la requalification des infrastructures hydriques et le maillage entrepreneurial peuvent servir de point d’ancrage à une croissance inclusive. L’histoire récente montre que l’alliance entre gouvernance renforcée, financement vert et promotion de l’esprit d’entreprise constitue une trajectoire crédible pour atteindre les Objectifs de développement durable. En ce sens, l’initiative maroco-BAD trace un chemin qui, s’il est jalonné d’obstacles, n’en demeure pas moins porteur d’un narratif optimiste : celui d’un continent africain capable de conjuguer stabilité, innovation et souveraineté économique.