La Sangha clôture un cycle de sensibilisation
Dans la salle polyvalente de Ouesso, capitale départementale de la Sangha, experts en commande publique et représentants des collectivités ont bouclé la dernière étape d’un atelier national consacré aux réformes des marchés publics, amorcée à Pointe-Noire puis poursuivie à Brazzaville.
Cette tournée pédagogique, pilotée par la Direction générale du Contrôle des marchés publics, vise à uniformiser les pratiques, afin que chaque cellule locale applique un même cadre procédural, gage d’efficacité dans l’utilisation des ressources de l’État et de ses partenaires.
Un cadre juridique modernisé
Le Congo-Brazzaville s’est doté en 2022 d’un nouveau code des marchés publics, aligné sur les standards de l’Union africaine et de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale, en mettant l’accent sur la transparence, la concurrence libre et l’égalité d’accès.
Les récentes réformes détaillent désormais des seuils clairs pour les appels d’offres, introduisent des délais obligatoires de publication et imposent la création de registres numériques permettant aux citoyens de suivre, en temps réel, les étapes d’attribution et d’exécution des contrats.
Selon le chef de service législation, Hervé Biyogo, « l’objectif est d’arriver à zéro contentieux grâce à une procédure lisible par tous les partenaires, du bailleur international à la petite entreprise de district ».
Des innovations saluées par les acteurs locaux
À Ouesso, plusieurs présidents de conseils municipaux ont souligné que la planification préalable, désormais obligatoire, les aidera à dresser des budgets réalistes, à éviter les avenants coûteux et à sécuriser les chantiers routiers ou scolaires priorisés par les plans locaux de développement.
Pour l’entrepreneur forestier Déo Ngassaki, la dématérialisation des dossiers « va réduire les déplacements coûteux vers la capitale et ouvrir la concurrence à des jeunes structures qui n’osaient pas se présenter faute d’informations ».
Dans un département où les marchés publics représentent plus de 60 % des investissements, les autorités estiment que chaque gain d’efficacité impactera directement l’emploi local et la disponibilité des infrastructures de base.
Le soutien technique et financier du Pagir
Le programme Pagir, financé par la Banque mondiale, mise sur une approche dite « axée sur les résultats » ; les décaissements sont conditionnés à l’atteinte de jalons mesurables tels que la réduction des délais moyens de passation ou le pourcentage de contrats publiés en ligne.
D’après Sonia Makaya, coordinatrice du projet, plus de 1 200 cadres ont déjà été formés dans dix départements, et un portail national sera opérationnel avant la fin de l’année pour centraliser les statistiques et les appels d’offres.
Transparence et redevabilité au cœur des attentes
Le préfet de la Sangha, Édouard Dénis Okouya, a rappelé que la modernisation engagée répond aux directives nationales en faveur de la transparence, de la redevabilité et de l’équité, trois piliers inscrits dans la Feuille de route gouvernementale 2022-2026.
Des mécanismes de sanction graduée sont prévus : suspension des paiements en cas de malfaçon, audits externes systématiques et publication des décisions de sanction pour renforcer la confiance des contribuables.
Au-delà des procédures, les autorités encouragent également la société civile à suivre les chantiers et à signaler les retards via une ligne verte qui sera testée à Brazzaville avant d’être étendue aux chefs-lieux départementaux.
Opportunités pour les entreprises congolaises
Le tissu économique local, dominé par les PME de construction, voit dans la nouvelle réglementation une occasion d’augmenter son taux de succès ; les lots sont désormais segmentés pour éviter qu’un unique contrat ne dépasse la capacité financière d’un petit opérateur.
Un système de notation récompense l’emploi de la main-d’œuvre locale et l’insertion des jeunes diplômés, conditions jugées stratégiques par le ministère de l’Économie pour dynamiser la croissance hors pétrole.
Le banquier Alphonse Konda observe déjà « un regain d’intérêt des établissements financiers pour le préfinancement des contrats publics, grâce aux garanties plus claires sur la chaîne de paiement ».
Prochaines étapes de la feuille de route
Avant la fin du premier trimestre 2024, la Direction générale du Contrôle des marchés publics prévoit de déployer un module de gestion des litiges et un tableau de bord public affichant, pour chaque projet, le taux d’exécution physique et financier.
Parallèlement, des sessions de coaching individuel seront proposées aux communes rurales pour consolider leurs plans de passation et anticiper les risques, une démarche que la Banque mondiale juge essentielle pour pérenniser les acquis du programme.
La mise à jour régulière des manuels et l’internalisation progressive des formations devraient, selon les techniciens, conduire à un appareil d’achat public plus performant, capable d’accompagner la stratégie de diversification économique voulue par les autorités.
Regards des partenaires internationaux
Présente à la cérémonie de clôture, l’ambassadrice de l’Union européenne, Rosario Bento Pais, a salué une « démarche alignée sur les principes de l’Accord de Cotonou » et indiqué que des appuis complémentaires pourraient être mobilisés via le programme d’appui budgétaire 2024-2027.
Le représentant résident de la Banque africaine de développement a, pour sa part, évoqué la possibilité d’intégrer les indicateurs de performance congolais dans le Tableau de bord africain de la passation, afin de comparer les progrès du pays à ceux de la sous-région.
