Victoire juridique des Diables rouges au TAS
Au terme d’un arbitrage rendu à Lausanne le 21 juillet 2025, le Tribunal arbitral du sport a définitivement entériné la participation du Congo à la phase finale du Championnat d’Afrique des nations 2024. La juridiction a confirmé la sentence prononcée un mois plus tôt par le jury d’appel de la Confédération africaine de football et a débouté la Fédération équato-guinéenne, laquelle contestait l’éligibilité de l’attaquant Japhet Mankou. L’instance helvétique a jugé les preuves congolaises « probantes et conformes aux règlements », tout en condamnant la partie plaignante aux frais de procédure et à 4 000 francs suisses d’indemnité pour la Fédération congolaise de football.
Cette séquence rappelle que les rendez-vous sportifs, loin de se limiter aux quatre-vingt-dix minutes réglementaires, se jouent aussi dans les prétoires internationaux. « La vérité sportive a fini par triompher », s’est félicité Jean-Guy Blaise Mayolas, président de la Fécofoot, saluant la « coopération exemplaire » entre les services juridiques nationaux et la représentation permanente du Congo auprès des organisations internationales à Genève. Dans les couloirs du siège de la CAF, l’arrêt du TAS est perçu comme un signal de stabilité règlementaire, à deux ans de la refonte annoncée du code disciplinaire continental.
Diplomatie sportive et image internationale de Brazzaville
Au-delà de la qualification, le gouvernement congolais voit dans cette issue une consolidation de son soft power. En soutenant la démarche de la Fécofoot, Brazzaville a démontré sa capacité à faire valoir ses droits dans les enceintes arbitrales, un levier précieux pour un État qui multiplie les initiatives de diplomatie sportive depuis l’organisation des Jeux africains en 2015. Le ministre des Sports, Hugues Ngouélondélé, a souligné que « le sport reste une vitrine pacifique de notre diplomatie, un creuset d’unité nationale et un moteur d’intégration régionale ».
Cette victoire juridique intervient à un moment où le Congo cherche à diversifier son rayonnement, notamment par le biais d’investissements dans les infrastructures sportives. Le complexe de Kintélé, modernisé pour accueillir les Diables rouges, bénéficie déjà d’un programme de maintenance cofinancé par des partenaires étrangers. L’assurance d’une participation au CHAN permet de mobiliser de nouveaux sponsors et de conforter les partenariats public-privé, là où l’incertitude procédurale avait pu ralentir certaines négociations.
Une jurisprudence africaine en construction
L’affaire Mankou pose en creux la question de la cohérence des règlements encadrant les compétitions réservées aux joueurs locaux. Plusieurs fédérations, à commencer par celles d’Afrique centrale, appellent à une clarification accrue des critères de licence et de transfert intra-communautaire pour éviter que le TAS ne soit systématiquement saisi. Pour le juriste camerounais Michel Dongmo, spécialiste du droit du sport, « le dossier congolais établit un précédent : la charge de la preuve doit reposer sur le plaignant et non sur la fédération visée ».
Cette jurisprudence pourrait limiter à l’avenir les recours dilatoires et favoriser une émulation centrée davantage sur la performance que sur la stratégie procédurale. Elle renvoie aussi à la nécessité, pour la CAF, de renforcer les capacités de ses chambres arbitrales internes afin de désengorger le TAS et de réduire les coûts pour des fédérations dont les budgets demeurent contraints.
Impact sur la préparation technique et psychologique
Sur le plan sportif, l’arrêt du TAS dissipe un nuage d’incertitude qui planait sur le vestiaire congolais. Le sélectionneur Isaac Ngata peut désormais finaliser une liste élargie sans crainte de nouvelles contestations. Le dispositif tactique, bâti autour de la charnière Mbemba-Ondongo, exploite la vivacité de Mankou, dont la situation administrative est désormais clarifiée. Les préparateurs mentaux rapportent que le groupe, libéré d’une pression extrinsèque, affiche un taux de disponibilité physique supérieur à 90 % à six semaines du coup d’envoi.
Les clubs locaux, quant à eux, retrouvent la main-d’œuvre de leurs internationaux avec un calendrier ajusté. La Ligue 1 congolaise a accepté de condenser deux journées pour permettre aux Diables rouges d’effectuer un stage bloqué à Pointe-Noire, financé en partie par l’État et en partie par le secteur privé. Cette synergie entre institutions publiques et acteurs économiques marque un tournant vers une gouvernance partagée du football national.
Perspectives régionales et coopération sportive
Dans l’espace CEMAC, la clarification apportée par le TAS constitue une invitation à accroître la coopération réglementaire. Les ministres des Sports du Cameroun, du Gabon et de la République centrafricaine ont déjà annoncé la tenue, à Libreville, d’un atelier sur l’harmonisation des statuts des joueurs à l’échelle sous-régionale. Pour Brazzaville, cette dynamique s’inscrit dans la continuité des engagements pris lors du Forum sur la paix et la sécurité en Afrique, où le président Denis Sassou Nguesso avait rappelé que « la compétition sportive, en rapprochant les jeunesses, préfigure un dialogue politique apaisé ».
À l’approche du CHAN, le Congo peut ainsi capitaliser sur un climat apaisé avec ses voisins, tout en consolidant son leadership sportif. Les supporters, conscients de la portée symbolique de cette qualification définitivement acquise, se préparent à jouer leur rôle d’ambassadeurs culturels dans les tribunes. Sur le plan économique, les agences de voyages locales ont déjà relevé une hausse de 12 % des réservations vers les villes hôtes, signe que la diplomatie du ballon rond trouve un écho tangible dans les circuits touristiques.