Hymnes croisés sous la coupole du Palais des congrès
Le grand auditorium du Palais des congrès de Brazzaville, habituellement réservé aux sommets politiques, a résonné d’une note singulière lorsque les élèves de l’École internationale chinoise ont entonné successivement La Congolaise puis La Marche des Volontaires. L’image, d’emblée, fixait le ton : une rencontre où le protocole diplomatique se conjugue à l’émotion d’une fin d’année scolaire particulièrement symbolique. Placée sous l’égide de la direction départementale de l’Enseignement préscolaire, primaire, secondaire et de l’Alphabétisation, la cérémonie d’émulation 2024-2025 a rassemblé parents, enseignants, cadres administratifs et partenaires, tous témoins d’un cérémonial mettant en lumière un modèle éducatif biculturel au service d’une jeunesse en quête de repères globaux.
Entre vitalité académique et ambition citoyenne
Prenant la parole, le directeur général de l’établissement, Gildas Niakissa, a salué « le professionnalisme des équipes pédagogiques » et « l’enthousiasme contagieux des élèves », rappelant que l’EIC n’envisage l’excellence que dans une perspective citoyenne. Les projets qu’il a esquissés témoignent d’une volonté de faire de l’école un incubateur de talents insérés dans la dynamique nationale. Outre l’enseignement du mandarin dès la maternelle et celui de l’anglais au cycle primaire, de nouvelles disciplines feront leur apparition à la rentrée : droit, économie, entrepreneuriat, technologie et même une initiation au pilotage de drones pour les lycéens. Cette diversification curriculaire, a-t-il insisté, obéit à un « impératif d’employabilité » et s’inscrit dans la stratégie congolaise de valorisation du capital humain.
La dimension d’ouverture se matérialisera également par le séjour linguistique que six élèves, lauréats des tests HSK 2 et 3, effectueront en Chine à l’automne 2025. Entièrement financé par l’établissement, ce voyage prolongera l’immersion culturelle entamée en classe et renforcera, selon le directeur, « le sentiment d’appartenance à une communauté mondiale où le Congo doit tenir toute sa place ».
Soremi, de la mine au parrainage académique
La cérémonie a pris un relief particulier lorsque Zhang He, vice-président de la société minière Soremi, a rejoint la tribune pour remettre les bourses décernées aux meilleurs élèves. Évoquant un « devoir de solidarité » dicté par la convergence des visions congolaises et chinoises en matière de développement, le dirigeant a rappelé que son entreprise, première mine modernisée du pays, « transforme chaque jour le cuivre et le zinc du district d’Ewo pour en restituer une valeur ajoutée à la Nation ».
Par-delà ses performances industrielles, Soremi entend se positionner en partenaire sociétal de référence. L’accord récemment signé avec l’Université Marien-Ngouabi pour accueillir des stagiaires au sein du complexe minier illustre cette ambition. « Nous misons sur la formation de talents nationaux capables d’accompagner la montée en gamme du secteur extractif », a-t-il souligné, citant l’intégration d’anciens étudiants de l’Institut Confucius dans les équipes techniques de l’entreprise. Les bourses Soremi s’inscrivent dans la même logique : encourager l’excellence académique tout en consolidant le socle culturel partagé entre les deux pays.
Des lauréats, reflets d’une coopération gagnante
Quatre noms ont été particulièrement applaudis : Elysée Lucia Bizenga, Janis Jeana Ngoyi-Ngubuku, Medina Prim-Rhoz Monka Kikouka et Fleur Céleste Louingui Malonda, nouveaux titulaires de la bourse Soremi pour l’année 2025. Le doyen des inspecteurs présents n’a pas manqué de féliciter ces élèves « dont la rigueur illustre l’avenir d’un Congo tourné vers l’Asie sans renier son identité ».
La performance académique a d’ailleurs été célébrée à plusieurs niveaux. Ainsi, Henrienna Bindou, forte d’une moyenne de 17,66, a reçu la distinction de meilleure élève de l’établissement. Vingt-et-un enfants du cycle préscolaire, admis en primaire, ont pour leur part été encouragés par une pluie de récompenses symbolisant l’importance accordée à la continuité pédagogique.
Arts vivants et soft power éducatif
Pour rythmer la cérémonie, les organisateurs ont multiplié les séquences artistiques. À la chorégraphie africaine répondait un numéro de danse classique chinoise, tandis que deux collégiens livraient un dialogue en mandarin ponctué d’une chanson populaire. Le public a également découvert une démonstration de wushu, discipline où la maîtrise corporelle rejoint la concentration mentale, principe cher au pédagogue congolais Jean-Félix Tchicaya, présent dans la salle. Ces performances, loin d’être de simples intermèdes, illustrent le soft power de l’éducation : faire dialoguer les symboles pour abolir les distances culturelles.
Un horizon élargi pour la jeunesse congolaise
Au terme de la matinée, un constat s’impose : l’École internationale chinoise incarne une plateforme où convergent ambitions nationales et dynamiques internationales. En soutenant les meilleurs élèves, Soremi renforce la chaîne valeur-connaissance qui relie le minerai congolais aux marchés mondiaux, tout en consolidant la relation stratégique entre Brazzaville et Pékin. Pour les familles, l’établissement devient un vecteur d’ascension sociale ; pour les autorités éducatives, un laboratoire de programmes innovants.
Dans un contexte régional marqué par la compétition pour les talents et les investissements, la cérémonie d’émulation 2024-2025 rappelle qu’une diplomatie efficace se nourrit aussi de salles de classe, de tables d’écoliers et de bursaries. À Brazzaville, la craie parle désormais mandarin sans cesser de penser en français : une polyphonie prometteuse pour la République du Congo et ses partenaires.