Nouvelle architecture logistique d’E2C
À Itatolo, dans le neuvième arrondissement de Brazzaville, le ruban inaugural a été coupé sous un ciel chargé de promesses. Quelques instants plus tard, à plus de cinq cents kilomètres, la même scène se rejouait symboliquement à Mongo-Kamba II, dans l’agglomération de Pointe-Noire. Deux hangars jumeaux, dotés de bâtiments administratifs et d’équipements de manutention de dernière génération, viennent d’être livrés à Énergie électrique du Congo. La manœuvre est plus qu’un simple aménagement immobilier : elle redessine la carte logistique nationale, concentre les stocks vitaux de transformateurs et de pièces sous atmosphère contrôlée et réduit, à terme, les délais d’intervention sur les lignes stratégiques du pays.
Un financement franco-congolais exemplaire
Le projet s’inscrit dans la convention de 70 millions d’euros paraphée en 2015 entre Brazzaville et l’Agence française de développement. Le ministre de l’Énergie et de l’Hydraulique, Émile Ouosso, a rappelé que « ce partenariat illustre la confiance des bailleurs dans la vision énergétique du président Denis Sassou Nguesso ». Maurizio Cascioli, directeur pays de l’AFD, a salué pour sa part « un jalon de plus sur la route du redressement sectoriel ». La prolongation de la date de décaissement jusqu’en 2027 démontre la flexibilité de l’instrument financier et un alignement des calendriers sur les conditions opératoires locales, sans grever la soutenabilité de la dette publique, maîtrisée par le gouvernement congolais.
Des hangars conçus pour durer
Chaque site comporte deux structures métalliques aux normes internationales. Le premier bâtiment, d’une surface supérieure à mille mètres carrés, abrite des transformateurs de haut voltage. Le second, légèrement plus modeste, est dédié aux équipements contenant des gaz isolants ainsi qu’au stockage d’appoint. L’entreprise congolaise Central BTP a mené quatorze mois de travaux ponctués d’audits qualité et de tests de résistance à l’humidité équatoriale. Les sols en béton fibré, les systèmes de détection d’incendie multicapteurs et les rayonnages modulaires soulignent une volonté de pérennité et d’anticipation des risques industriels.
Modernisation de la ligne Moukoukoulou-Mindouli
La livraison des hangars s’articule avec la réhabilitation totale de la ligne haute tension de 110 kilovolts reliant le barrage de Moukoukoulou à la zone minière de Mindouli. Financement, supervision et calendrier relèvent du même portefeuille AFD. Objectif : sécuriser l’acheminement de l’énergie hydraulique du Niari vers le corridor industriel sud-est, réduire les micro-coupures et favoriser la compétitivité du tissu productif. Selon un ingénieur d’E2C, les travaux incluent le renforcement des pylônes soumis à la végétation tropicale et l’installation de parafoudres de dernière génération pour endiguer les surtensions liées aux orages atlantiques.
Gestion et sécurisation : le défi du suivi
Le directeur général d’E2C, André Bruno Danga Adou, a martelé que « ces infrastructures ne vaudront que par la rigueur de leur gestion ». Il appelle les équipes logistiques à une traçabilité numérique complète des pièces, appuyée sur un progiciel entériné par le ministère des Finances. Sur le terrain, les collectivités s’engagent : le secrétaire général de la mairie de Djiri, Guy Roger Embongo, a promis une veille citoyenne contre le vandalisme, fléau récurrent autour des installations énergétiques. Un protocole de coopération avec la gendarmerie renforce déjà la surveillance périphérique nocturne.
Enjeux géostratégiques du secteur électrique
Le renforcement de la logistique de pièces détachées répond à un enjeu plus large : la diversification du bouquet énergétique congolais et son insertion dans les échanges régionaux d’électricité. Brazzaville ambitionne d’exporter ses excédents vers la République démocratique du Congo et le Gabon à l’horizon 2030, comme l’a rappelé Espérance Ondongo Soussa, directeur des études au ministère. Pour y parvenir, la fiabilité des réseaux de transport reste la clé. En dotant E2C d’outils de maintenance proches des zones de consommation, l’État anticipe les besoins d’une économie appelée à croître, en cohérence avec les engagements climatiques pris devant la communauté internationale.
Perspectives pour une souveraineté énergétique
Les nouveaux hangars ne constituent pas une fin en soi mais le pivot d’un écosystème industriel que le gouvernement veut résilient. Des négociations sont en cours avec des fabricants régionaux pour l’assemblage local de transformateurs de moyenne puissance, ce qui réduirait encore les délais d’approvisionnement. Parallèlement, le ministère de l’Enseignement technique étudie la création d’un cursus spécialisé en logistique énergétique afin d’alimenter E2C en compétences. À travers ces initiatives, le Congo-Brazzaville affirme sa souveraineté technologique tout en consolidant la confiance de ses partenaires.