M&A énergétiques africaines : cap sur une année record
Les projections 2026 de la Chambre africaine de l’énergie dessinent un marché pétrolier continental prêt à battre des records de fusions-acquisitions. La combinaison de cessions d’actifs des majors et de cycles de licences plus ouverts crée un terreau favorable aux transactions, malgré une conjoncture mondiale encore prudente.
Les analystes évoquent déjà un « réalignement stratégique historique » où indépendants mondiaux, compagnies nationales et juniors africaines repositionnent leurs portefeuilles pour optimiser rendement et exposition géographique.
Ralentissement mondial, dynamisme africain
Au premier semestre 2025, les M&A amont ont atteint 51 milliards USD, un repli par rapport au second semestre 2024, principalement à cause de la volatilité des marchés nord-américains. Pourtant, le volume africain s’est maintenu, confirmant une décorrélation partielle entre le continent et les tendances occidentales.
Les entreprises opérant en Afrique privilégient les transactions complémentaires autour de champs déjà maîtrisés, réduisant les risques techniques et accélérant la mise en production, tandis que les coûts de reprise d’actifs restent compétitifs face aux standards internationaux.
L’exemple nigérian, laboratoire continental
Au Nigeria, les indépendants tels que Seplat, Oando ou Aiteo ont profité des cessions successives d’ExxonMobil, Eni et TotalEnergies pour bâtir des portefeuilles robustes. Entre 2024 et 2025, quatre deals majeurs ont redistribué plus de 2 milliards USD d’actifs onshore et shallow-water.
La transaction emblématique reste la vente par Shell de sa filiale Shell Petroleum Development Company of Nigeria Ltd au consortium Renaissance, composée de sociétés locales, symbole d’une montée en puissance des capitaux indigènes dans la gestion quotidienne des gisements.
Majors : désinvestir sans partir
Les compagnies internationales adoptent une stratégie d’« allègement ciblé ». En se retirant d’actifs matures, elles gardent la main sur les développements deepwater à plus forte marge, confirmant ainsi leur confiance dans la rentabilité africaine à long terme.
Shell a, par exemple, finalisé l’acquisition de 12,5 % supplémentaires dans Bonga, tandis que TotalEnergies et Equinor ont cédé des parts onshore mais maintiennent des positions clefs offshore, illustrant cette gestion différenciée des risques et des capitaux.
Focus Congo : Vitol muscle sa présence
La République du Congo a fait les gros titres avec l’achat par Vitol des intérêts d’Eni pour 1,65 milliard USD, combinant blocs offshore et installations logistiques. Cette opération assure au trader un débouché GNL régulier et de nouvelles synergies commerciales depuis Pointe-Noire.
Pour Brazzaville, la transaction confirme l’attractivité d’un régime fiscal jugé stable et compétitif, à l’heure où le pays cherche à diversifier ses partenariats tout en sécurisant des investissements pour moderniser la chaîne de valeur nationale.
Cycles de licences : la nouvelle ruée
Au nord, l’Algérie a rouvert la porte après dix ans de pause, attribuant cinq blocs sur six grâce à des conditions de partage de production révisées. La Libye a suivi avec un premier tour depuis 17 ans couvrant 22 blocs et un régime fiscal assoupli.
Dans le golfe de Guinée, des annonces sont attendues au Congo, en Sierra Leone et en Tanzanie dès 2025, retardées pour l’instant par des ajustements réglementaires. Les observateurs prévoient que ces appels d’offres nourriront la prochaine vague de M&A de 2026.
Cash, actions : l’évolution des modes de paiement
Selon la Chambre africaine de l’énergie, l’espèce demeure la devise reine des transactions sur le continent, mais l’échange de titres progresse, notamment chez les juniors cotées à Londres ou Toronto cherchant à préserver leur trésorerie.
« Nous assistons à une mentalité du tout ou rien ; les entreprises montrent une agressivité assumée pour sécuriser les meilleurs actifs avant la fin de la décennie », observe NJ Ayuk, président exécutif de l’organisation sectorielle.
Consolidations attendues chez les mid-caps africaines
La fragmentation du tissu pétrolier africain devrait s’estomper. Les sociétés indépendantes de taille moyenne sont appelées à fusionner afin de renforcer leurs bilans, capter des financements plus abordables et mutualiser les expertises techniques.
M. Ayuk estime que « cette rationalisation est bénéfique, car elle créera des acteurs régionaux solides capables de rivaliser avec les majors tout en restant profondément enracinés dans les économies locales ».
African Energy Week 2026, carrefour stratégique
Prévue à Cape Town, l’AEW 2026 réunira gouvernements, investisseurs et dirigeants d’entreprises autour de sessions consacrées aux cessions d’actifs, aux régimes de licences et aux mécanismes de financement. Le rendez-vous apparaît déjà comme le baromètre incontournable des prochaines grandes manœuvres du secteur amont continental.
