Un pari pour sauver la saison 2025-2026
Réunis le 29 octobre à Brazzaville, la Fédération congolaise de football et les représentants des clubs ont jugé prioritaire d’empêcher une nouvelle année blanche. Tous ont entériné l’idée de délocaliser les championnats de Ligue 1 et 2 vers le centre technique d’Ignié, à 40 kilomètres de la capitale.
Jean Guy Blaise Mayolas, président de la Fécofoot, a présenté la mesure comme « la seule issue réaliste pour protéger nos joueurs, nos emplois et notre crédibilité continentale ». Les dirigeants de clubs, inquiets pour leurs effectifs et leurs revenus, ont salué « une décision courageuse ».
Ignié, nouveau cœur battant du football congolais
Inauguré en 2016, le site fédéral dispose de deux pelouses naturelles homologuées par la FIFA pour l’entraînement. Les installations, jusque-là réservées aux sélections nationales, pourraient pour la première fois accueillir l’ensemble des compétitions domestiques d’élite.
Selon la Fécofoot, la configuration d’Ignié offre un environnement maîtrisable : contrôle d’accès, logement à proximité et réduction des frais de déplacement pour la majorité des équipes basées à Brazzaville et dans son département.
Travaux d’aménagement en phase finale
Les ouvriers s’affairent déjà sur la mise aux normes : nouvelles grilles de sécurité, bancs de touche couverts, éclairage renforcé et espaces presse agrandis. Un budget complémentaire, soutenu par le programme Forward de la FIFA, couvre aussi la modernisation des vestiaires.
La fédération assure que les deux terrains seront prêts avant la mi-novembre. « Nous procéderons à des tests grandeur nature dès que le premier bloc de travaux sera livré », a précisé Charles Tchibota, directeur technique national.
Dialogue constant avec la FIFA et les clubs
La FIFA suit le dossier de près et échange chaque semaine avec la cellule d’ingénierie fédérale. Les experts internationaux ont validé les plans de drainage et la qualité du gazon, condition indispensable pour enchaîner plusieurs rencontres par jour.
Côté clubs, un comité ad hoc a été créé pour formuler des remarques opérationnelles : horaires adaptés à la télévision, répartition équitable des vestiaires et protocole sanitaire harmonisé. « La transparence de la Fécofoot nous rassure », souligne Arnaud Makita, président de l’AS Otôho.
La question épineuse de la réouverture des stades
Plusieurs enceintes nationales, dont le stade Alphonse-Massamba-Débat, restent fermées depuis la fin de la saison 2023-2024. Le ministère des Sports invoque toujours des soupçons d’arrangements arbitraux et la nécessité de réformes structurelles avant toute réouverture.
Jean Guy Blaise Mayolas rappelle avoir adressé plusieurs correspondances « techniques et pédagogiques » à la tutelle. Selon lui, « le regroupement à Ignié n’est pas un contournement, mais un relais provisoire ».
Soupçons de corruption : point sur les sanctions
En mars dernier, la commission d’éthique de la Fécofoot a suspendu six officiels accusés dans un enregistrement audio d’avoir influencé des résultats. Les sanctions, confirmées par la Confédération africaine, sont toujours en vigueur.
La fédération précise que ces mesures montrent « une tolérance zéro » et devraient lever les derniers doutes. « Les faits reprochés ont été punis, notre sport doit avancer », insiste le président Mayolas.
Risque sportif d’une saison blanche
Les clubs craignent de perdre leurs meilleurs éléments, libres de s’engager ailleurs faute de contrats professionnels solides. Un second exercice sans compétition couperait aussi toute chance de qualification aux tournois africains interclubs de 2026.
La Fécofoot alerte sur le classement FIFA des Diables Rouges, tributaire du dynamisme national. « Les joueurs locaux constituent l’ossature de nos sélections U-23 et A’ ; il leur faut du rythme », souligne l’entraîneur adjoint Barthélémy Ngatsono.
L’enjeu économique pour les formations de Ligue 1 et 2
Au-delà du sportif, une saison stoppée signifierait une chute des recettes de billetterie, de sponsoring et de merchandising. Les estimations internes évoquent une perte globale supérieure à deux milliards de francs CFA pour l’ensemble des clubs.
Centraliser la compétition à Ignié permettrait de réduire les charges logistiques et de mutualiser les revenus télévisuels. Un accord de diffusion en streaming, en discussion avec un opérateur sud-africain, pourrait même générer une nouvelle source de financement.
Prochaines étapes et appel au ministère
Les présidents de clubs se sont engagés à accompagner la Fécofoot dans une prochaine audience auprès du ministre des Sports. Objectif : présenter le calendrier, garantir la sécurité et solliciter un appui institutionnel pour la logistique médicale.
Le calendrier prévisionnel prévoit un coup d’envoi début décembre, avec trois rencontres quotidiennes pendant huit mois. « Si nous obtenons le feu vert, tout sera en place », assure le secrétaire général Victor Mouanga.
Optimisme mesuré des supporters
Sur les réseaux sociaux, de nombreux fans saluent « une solution pragmatique », même si certains s’inquiètent de l’éloignement géographique. Des navettes gratuites depuis Brazzaville sont à l’étude pour favoriser l’affluence.
« Nous avons besoin de vibrer à nouveau », confie Prisca Ngouabi, membre d’une association de supporters. « Revoir les compétitions relancera aussi les petits commerces autour du football ; c’est tout un écosystème qui repart. »
