Un rituel institutionnel à haute valeur stratégique
La solennité qui enveloppe chaque Conseil des ministres à Brazzaville a valeur de boussole pour la communauté diplomatique. Celui du 23 juillet 2025 n’a pas dérogé à la règle. Convoqué par le chef de l’État dans le salon d’honneur du Palais du Peuple, il a permis d’orchestrer une partition gouvernementale où les priorités nationales s’imbriquent subtilement dans les dynamiques régionales et multilatérales. Aux yeux des observateurs, la méthode mise en avant illustre une volonté de consolider la stabilité macroéconomique tout en affinant la diversification annoncée depuis plusieurs exercices.
Environnement : l’étude d’impact, pierre angulaire modernisée
La ministre Arlette Soudan-Nonault a soumis la refonte du décret encadrant les études d’impact environnemental et social. En actualisant un texte datant de 2009, Brazzaville se dote d’un outil apte à concilier l’exigence climatique globale avec les impératifs de croissance intérieure. Les promoteurs disposeront désormais de lignes directrices harmonisées avec la loi 33-2023, tandis que l’administration se voit confortée dans son rôle de gardienne de l’intégrité des écosystèmes du Bassin du Congo, véritable « poumon » continental. Cette modernisation, saluée par les partenaires techniques, renforce la crédibilité verte du Congo au moment où les marchés carbone et les financements climatiques prennent un essor sans précédent.
Économie numérique : vers une adresse postale 2.0
Portée par le ministre Léon Juste Ibombo, la codification postale nationale constitue un chantier de fond. L’absence d’un système universel d’adressage freinait le commerce électronique et, par ricochet, le potentiel d’attractivité logistique du corridor Pointe-Noire/Brazzaville. Inspiré des standards de l’Union postale universelle, le nouveau dispositif ouvre la voie à une traçabilité accrue des envois et à un meilleur maillage des services publics. À terme, il devrait soutenir l’intégration sous-régionale prônée par l’Agenda 2063 de l’Union africaine, tout en positionnant le Congo comme hub de services digitaux en Afrique centrale.
Orthodoxie budgétaire et trajectoire 2026-2028
Le rapport du ministre Christian Yoka confirme la rigueur budgétaire engagée depuis 2021. Malgré une conjoncture marquée par la volatilité des cours pétroliers, les recettes fiscales non pétrolières ont dépassé 100 % des prévisions 2024, témoignant d’un élargissement de l’assiette et d’une digitalisation accrue des procédures. Le solde global demeure perfectible, mais la réduction du ratio dette/PIB de 100,3 % à 88,8 % en quatre ans laisse entrevoir une crédibilité renforcée auprès des agences de notation qui ont récemment maintenu la perspective souveraine (Standard & Poor’s).
Le Cadre budgétaire à moyen terme 2026-2028 projette une croissance moyenne de 3,1 % et une inflation maîtrisée autour de la norme communautaire. La stratégie repose sur trois leviers : modernisation du recouvrement, rationalisation de la dépense et priorisation des investissements de croissance. La perspective d’un excédent budgétaire global consolidé à 5 % dès 2025 illustre la discipline recherchée, tandis que l’affectation des excédents primaires au désendettement traduit une approche prudente saluée par les partenaires financiers.
Transports aériens : un audit comme levier de crédibilité
L’annonce d’un audit de l’Organisation de l’aviation civile internationale en octobre 2025 place l’aérien congolais sous les projecteurs. Douze ans après la dernière évaluation, la ministre Ingrid Olga Ghislaine Ebouka-Babackas prépare un plan de mise à niveau des infrastructures et des capacités réglementaires. L’enjeu dépasse la conformité technique : il conditionne l’attractivité économique et la connectivité régionale, particulièrement pour les plateformes de Pointe-Noire et d’Ollombo, appelées à servir de relais logistique aux corridors maritimes et ferroviaires.
Vigilance sanitaire sur les rives du fleuve
Le ministre Jean Rosaire Ibara a informé le Conseil de foyers de diarrhées dans les districts frontaliers de l’île Mbamou et de Mossaka-Loukoléla. Bien que la nature pathogène attende confirmation, le contexte régional – marqué par une recrudescence du choléra en RD Congo et en Angola – impose une surveillance épidémiologique renforcée. Le déblocage de 248 millions F CFA traduit la promptitude des autorités à activer le partenariat établi avec l’Organisation mondiale de la santé. Dans une région où les échanges fluviaux demeurent le principal vecteur commercial, cette vigilance contribue à la sécurité sanitaire collective et à la pérennité des flux économiques.
Nominations : consolider les chaînes de communication
Les nominations à l’Imprimerie nationale et à l’Office de promotion de l’industrie touristique visent à renforcer des secteurs stratégiques. Dans un environnement d’information globalisé, la qualité de la production imprimée demeure un vecteur de souveraineté documentaire, tandis que la valorisation touristique constitue un moteur de recettes hors pétrole. Les nouveaux responsables auront pour mission de moderniser les outils de gestion et de promouvoir l’image du pays auprès des investisseurs et des visiteurs.
Cap sur une gouvernance durable et ouverte
En clôturant la séance, le président Denis Sassou Nguesso a souligné la corrélation entre climat des affaires et attraction des capitaux. Cette remarque cristallise la feuille de route gouvernementale : consolider la stabilité macroéconomique, verdir le modèle de développement et ouvrir davantage le marché intérieur. À l’horizon 2028, l’enjeu consistera à convertir les réformes techniques adoptées ce 23 juillet en gains tangibles pour la population et en signaux positifs pour les partenaires extérieurs. La récurrence de ces Conseils, remarquée par les diplomates en poste, confirme qu’à Brazzaville la gouvernance se veut désormais une liturgie du résultat.