Une flambée maîtrisée : données épidémiologiques 2025
À la date du 9 août 2025, le ministère de la Santé et de la Population dénombrait 1 842 cas confirmés de choléra sur l’ensemble du territoire national, dont 46 décès, soit une létalité de 2,5 %. Les départements des Plateaux et du Kouilou restent les plus touchés, tandis que Brazzaville et Pointe-Noire enregistrent une courbe de contamination désormais en plateau. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) souligne que la dynamique de l’épidémie demeure « contenue mais sous haute surveillance », grâce à un dépistage précoce et à la gratuité des soins instaurée par décret présidentiel le 18 mai dernier.
L’incidence hebdomadaire, passée de 6,4 cas pour 100 000 habitants fin juin à 2,1 début août, confirme une tendance à la décrue. Les laboratoires provinciaux, appuyés par l’Institut national de recherche biomédicale, effectuent en moyenne 400 tests rapides par jour, un record depuis la flambée de 2013.
Mobilisation gouvernementale et partenariats internationaux
Sous la coordination du Premier ministre Anatole Collinet Makosso, le plan de riposte multisectorielle mobilise 35 milliards de francs CFA, financés à 60 % sur le budget national. « Nous avons choisi l’anticipation plutôt que la réaction », rappelle le Dr Georges Moyen, directeur général de la santé, qui insiste sur la formation accélérée de 1 200 agents de terrain et l’ouverture de 18 centres de traitement dédiés.
Le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) a livré plus d’un million de comprimés de purification d’eau, tandis que Médecins d’Afrique gère la logistique des campagnes de sensibilisation dans les zones fluviales. La Banque de développement des États de l’Afrique centrale a, de son côté, octroyé une ligne de crédit de 5 milliards de francs CFA pour la réhabilitation des réseaux d’adduction d’eau potable.
L’équation logistique : routes, fleuves et saisons
Si la réponse apparaît structurée, elle se heurte toutefois à la configuration géographique d’un pays où 70 % des localités prioritaires sont accessibles principalement par voie fluviale. La montée précoce des eaux du fleuve Congo, observée en juillet, complique la livraison de réactifs et de kits de réhydratation orale. « Une caisse de Ringer qui met deux jours de plus à arriver peut coûter des vies », confie un logisticien de la Croix-Rouge congolaise.
Pour pallier ces aléas, le gouvernement a réactivé la flotte de pirogues médicalisées acquise en 2022 et mis en service un pont aérien assuré par l’armée de l’Air entre Brazzaville et Impfondo. Cette saisissante coordination civil-militaire, saluée par l’OMS, illustre la volonté de renforcer la souveraineté sanitaire tout en capitalisant sur les soutiens extérieurs.
Coûts humains et effets socio-économiques surveillés
Au-delà du bilan médical, l’épidémie fragilise des communautés déjà éprouvées par l’inflation mondiale. Dans les marchés de Djiri ou de Tié-Tié, l’augmentation temporaire du prix de l’eau embouteillée a atteint 18 % en juin avant de retomber à 7 % après l’intervention de l’Agence de régulation des marchés. Les écoles rurales, fermées deux semaines pour désinfection, ont repris leurs cours, confirmant la priorité donnée à la continuité pédagogique.
La Commission économique du Congo chiffre à 0,3 point la contraction potentielle du PIB 2025 si l’épidémie dépassait le seuil de 4 000 cas. Toutefois, l’exécutif table sur une atténuation grâce aux investissements dans l’eau potable, secteur dont la croissance pourrait atteindre 6 % cette année, créant un effet compensatoire en matière d’emplois locaux.
Cap sur la résilience : enseignements et perspectives
La crise actuelle agit comme un révélateur des progrès accomplis depuis la création, en 2018, de l’Agence nationale de sécurité sanitaire. Les protocoles de surveillance intégrée des maladies diarrhéiques, étendus désormais aux postes frontières, autorisent une détection en moins de 24 heures. Signe d’un changement de paradigme, l’université Marien-Ngouabi a lancé un master en épidémiologie de terrain dont la première cohorte d’étudiants est déjà mobilisée au chevet des patients.
Dans une allocution devant le Sénat, le président Denis Sassou Nguesso a appelé à « transformer chaque crise sanitaire en tremplin pour l’excellence médicale africaine ». Les prochaines étapes incluent l’installation d’unités de production locale de solution de réhydratation et la digitalisation des alertes communautaires via l’opérateur Congo Télécom. Autant d’initiatives qui, si elles se pérennisent, pourraient faire de la République du Congo un pôle de référence régionale en matière de gestion du choléra et, plus largement, des maladies hydriques.