Zanzibar, carrefour stratégique du CHAN 2024
En attribuant l’organisation partagée du Championnat d’Afrique des nations à la Tanzanie, au Kenya et à l’Ouganda, la Confédération africaine de football a fait le pari d’une diplomatie sportive régionale inédite. Le choix de Zanzibar pour accueillir le groupe des Diables rouges A’ illustre la volonté de valoriser cet îlot au carrefour des mondes swahili, arabe et continental. Les autorités tanzaniennes espèrent projeter une image de stabilité logistique et de modernité, tandis que les délégations africaines y perçoivent un terrain neutre, propice à l’expression d’un football décomplexé. Dans ce contexte, les joueurs congolais ne se contenteront pas d’un simple déplacement : ils seront les ambassadeurs d’un pays qui cherche à consolider son capital de soft power par le sport.
La constance congolaise, atout diplomatique et sportif
Depuis 2018, le Congo n’a manqué aucune phase finale du CHAN, se hissant ainsi au rang des sélections les plus régulières du continent. Cette présence continue, rare à ce niveau de compétition, confère aux Diables rouges un statut de partenaire fiable auprès des instances panafricaines. Pour Brazzaville, cette constance nourrit un récit de stabilité qui trouve un écho favorable dans les chancelleries. Elle témoigne aussi d’une politique de formation patiemment menée par la Fédération, avec l’appui discret de l’État, pour renforcer la filière domestique. Le sélectionneur Barthélémy Ngatsono, reconduit pour un quatrième tournoi consécutif, s’appuie sur cette assise pour fixer un cap clair : « Notre équipe est prête, nous avons un plan pour déjouer Soudan, Sénégal et Nigeria » a-t-il confié à la presse locale, soulignant la maturité d’un groupe qui vise, sinon la consécration finale, du moins une première apparition en demi-finale.
Un groupe à haut risque : lecture tactique et enjeux
Le tirage a placé le Congo dans la poule la plus dense du tournoi. Le Soudan, adversaire du 5 août, est réputé pour son organisation défensive et pour une densité physique qui bouscule les équipes d’Afrique centrale. Le Sénégal, champion d’Afrique en titre toutes compétitions confondues, aligne une génération locale portée par la réussite du championnat sénégalais. Quant au Nigeria, son vivier domestique reste un laboratoire de talents offensifs. Dans cet environnement, l’entame face aux Soudanais revêt une dimension cardinale, d’autant que les précédentes éditions ont montré la difficulté congolaise à négocier le premier rendez-vous. La cellule d’analyse vidéo du staff travaille à repérer les failles sur coups de pied arrêtés, tandis que la presse sportive de Brazzaville insiste sur la nécessité de hausser le tempo dès la première période. La perspective d’un quart de finale accessible passe donc par une gestion méthodique de l’énergie et par une discipline tactique que le capitaine Simon Ulrich Samba compare à « un pacte collectif » entre joueurs expérimentés et jeunes promus (déclaration d’avant-stage).
Calendrier condensé et préparation millimétrée
La délégation congolaise a quitté Brazzaville le 1ᵉʳ août sans avoir disputé de rencontre amicale internationale, choix assumé par le staff qui privilégie la fraîcheur physique à la sur-exposition stratégique. Les séances à huis clos, menées sur la pelouse synthétique du stade Alphonse-Massamba-Débat, ont insisté sur la fluidité dans les transitions, atout supposé contre les blocs bas. Les entraîneurs adjoints relèvent par ailleurs l’importance de la dimension mentale dans un tournoi ramassé sur moins de trois semaines, où l’enchaînement des matches peut fissurer les effectifs les plus riches. L’encadrement médical a, de son côté, renforcé la prévention hydrique pour anticiper la moiteur insulaire de Zanzibar, paramètre souvent sous-estimé par les adversaires venus de l’intérieur du continent.
Au-delà du terrain : retombées pour le championnat national
Le CHAN reste une fenêtre pour les joueurs évoluant sur le sol congolais. La perspective d’un transfert vers les clubs d’Afrique du Nord ou d’Asie élargit l’horizon professionnel de la jeune garde, tout en assurant des revenus de solidarité qui irriguent les structures locales. Si la performance collective devait atteindre le dernier carré, la visibilité médiatique pourrait se traduire par de nouvelles négociations avec des partenaires privés, attirés par l’audience continentale croissante de la compétition. Dans un environnement économique mondial contraint, pareille dynamique constituerait un signal positif, renforçant la crédibilité des réformes engagées par la Ligue nationale de football pour professionnaliser ses instances. À cet égard, la campagne 2024 des Diables rouges dépasse le seul enjeu sportif ; elle s’inscrit dans la stratégie globale d’ouverture et de valorisation du Congo sur la scène africaine.