Un nouveau pas législatif pour la gestion de la dette
La Chambre haute du Parlement congolais a adopté le 28 juillet, dans la sérénité propre aux grandes heures institutionnelles, le projet de loi autorisant la ratification d’une convention de subvention à l’investissement entre la République du Congo et la Banque européenne d’investissement. Le texte, porté par le ministre des Finances, du Budget et du Portefeuille public, Christian Yoka, encadre un concours financier mixte – prêt à conditions préférentielles, subvention et assistance technique – dont l’architecture vise à renforcer la soutenabilité de la dette tout en accélérant la modernisation des infrastructures nationales.
Dette publique congolaise : un équilibre encore fragile
Au 31 décembre 2024, l’encours de la dette publique s’établissait à 8 535,7 milliards de francs CFA, soit 92,3 % du produit intérieur brut. Comparé aux 97,3 % enregistrés un an plus tôt, l’amélioration est tangible, mais demeure au-dessus des seuils de confort généralement admis dans la sous-région. Les autorités congolaises assument ce diagnostic sans faux-fuyant. « La dette publique reste un sujet majeur de vigilance », a rappelé Christian Yoka devant les sénateurs, soulignant qu’une gestion rigoureuse conditionne la stabilité macroéconomique et la crédibilité internationale de Brazzaville.
Stratégie d’endettement : la voie des prêts concessionnels
Pour consolider le rééquilibrage amorcé, le gouvernement a adopté une ligne directrice simple : ne solliciter que des financements affichant un élément don d’au moins 35 %. Cette exigence, conforme à la politique des plafonds d’endettement du Fonds monétaire international et aux orientations de la Banque mondiale sur le financement du développement durable, place la qualité avant la quantité. La récente sixième revue du programme triennal soutenu par la Facilité élargie de crédit du FMI, entérinée le 14 mars 2025, a confirmé la viabilité de la dette congolaise, confortant la stratégie officielle orientée vers des ressources concessionnelles, peu gourmandes en service d’intérêt et compatibles avec les impératifs sociaux.
Le rôle catalyseur de la Banque européenne d’investissement
L’accord ratifié avec la BEI constitue une brique supplémentaire dans cette architecture prudente. D’un montant de 10,3 millions d’euros en subvention, il génère un élément don de 39 %, supérieur au plancher de 35 % fixé par les bailleurs. Outre la manne budgétaire, la convention ouvre l’accès à une expertise technique européenne reconnue dans le montage et la supervision de projets complexes. Selon une source diplomatique européenne, l’enjeu est double : « répondre aux besoins d’infrastructure du Congo et conforter son positionnement comme partenaire fiable de l’UE dans le bassin du Congo ». L’arrimage progressif aux standards internationaux de transparence contribue de son côté à rassurer les créanciers et à réduire, à terme, le coût de la signature congolaise sur les marchés.
Perspectives macroéconomiques et crédibilité internationale
Le pari reste toutefois exigeant. La lente remontée des cours du pétrole offre un matelas de recettes, mais la diversification économique demeure un chantier prioritaire. La feuille de route gouvernementale table sur une croissance non pétrolière supérieure à 4 % dès 2026, condition sine qua non pour réduire durablement le poids de la dette dans le revenu national. Les partenaires techniques, FMI en tête, insistent sur la nécessité de renforcer la gouvernance budgétaire et d’élargir l’assiette fiscale. Dans cet environnement, l’accord avec la BEI envoie un signal de confiance mesuré : le Congo peut attirer des capitaux à conditions préférentielles dès lors qu’il démontre sa capacité de réformes. À court terme, l’impact sur la dette est neutre, voire légèrement positif du fait de l’élément don élevé. À moyen terme, l’effet multiplicateur dépendra de la mise en œuvre effective des projets financés, notamment dans les transports et l’énergie, secteurs identifiés comme leviers de compétitivité régionale.