Une diplomatie sanitaire au pas de course
Le 26 juillet, à l’aube d’une journée moite dont Brazzaville a le secret, plus d’une cinquantaine de marcheurs ont foulé l’asphalte du rond-point de la République. La scène, en apparence anodine, glisse pourtant du simple footing convivial à un acte de diplomatie sanitaire. En conviant la société civile à une marche de santé, l’Association Lheyet-Gaboka pour le développement (ALGD) s’inscrit dans la dynamique impulsée par les autorités congolaises, pour qui la prévention des maladies non transmissibles figure désormais parmi les priorités stratégiques. À l’heure où les chancelleries s’intéressent de près à la résilience des systèmes de santé africains, ce type d’initiative, soutenu tacitement par les cadres administratifs locaux, devient un signal adressé aux partenaires internationaux : le Congo-Brazzaville entend conjuguer anticipation médicale et mobilisation communautaire.
L’ancrage associatif dans la stratégie nationale
Sous l’égide de son président national, Axel Ariel Dinghat Mouenokanga, l’ALGD a conçu cette marche comme une traduction concrète des recommandations émises lors des dernières assises nationales sur la santé et le développement humain. En rappelant que « la pratique du sport à tout âge demeure un rempart contre l’hypertension et le diabète », le dirigeant associatif réaffirme la complémentarité entre politique publique et engagement citoyen. Le discours épouse la doctrine gouvernementale, laquelle promeut le triptyque prévention, sensibilisation, responsabilité individuelle. Dans cette architecture, l’association devient relais opérationnel, offrant aux bailleurs et aux partenaires bilatéraux une vitrine de l’efficacité d’une gouvernance sanitaire partagée.
Brazzaville, scène d’un soft power sanitaire
Le choix du parcours, allant du quartier Bacongo au cœur d’Ouenzé, n’est pas qu’une facilité logistique. En serpentant devant des édifices emblématiques – état-major des Forces armées congolaises, mairie centrale, siège historique du club Étoile du Congo – la procession sportive matérialise l’unité d’un tissu institutionnel rassemblé autour d’un même idéal de bien-être collectif. À chaque carrefour, l’événement expose la capacité des autorités à sécuriser et accompagner une mobilisation pacifique, attitude qui nourrit la réputation de stabilité indispensable à l’attractivité économique et diplomatique de la capitale. Les ambassades étrangères, observatrices attentives des indicateurs d’apaisement social, perçoivent ainsi la marche comme un marqueur de bonne gouvernance et de cohésion territoriale.
La marche, vecteur de cohésion et de prévention
Au-delà de l’effort physique, le rituel du pas partagé restaure une sociabilité souvent mise à l’épreuve par l’urbanisation rapide. En intégrant des footballeurs de l’équipe AJ Auxerre – entité sportive soutenant l’ALGD – les organisateurs entendent multiplier les figures d’identification auprès de la jeunesse. L’initiative fait écho aux conclusions de l’Organisation mondiale de la santé, selon lesquelles l’inactivité physique constitue l’un des premiers facteurs de risque de mortalité prématurée dans les pays à revenu intermédiaire. En associant des segments variés de la population, l’ALGD confirme l’idée que la prévention se nourrit d’exemples concrets plutôt que de campagnes abstraites.
Vers une société de bien-être partagé
Cette marche succède à un tournoi de football et précède une série d’activités culturelles, dont une journée portes ouvertes dédiée à la mémoire du philanthrope Maurice Lheyet Gaboka. La programmation, résolument transversale, illustre la volonté d’inscrire la santé dans une lecture holistique mêlant sport, culture et mémoire collective. Pour les décideurs, l’enjeu réside dans la pérennisation de ce modèle où l’acteur associatif se positionne en catalyseur d’énergies locales, tandis que l’État conserve son rôle de stratège et de régulateur bienveillant. Dans un contexte régional parfois marqué par la volatilité, l’harmonie entre initiative citoyenne et cap présidentiel offre au Congo-Brazzaville une fenêtre d’opportunité : celle de renforcer sa diplomatie de la santé, atout désormais convoité sur l’échiquier géopolitique africain.