Émergence d’une gouvernance sanitaire renouvelée
La capitale congolaise vient d’abriter la seconde session du Conseil national de la santé, conclue le 18 juillet dans une atmosphère où prévalaient exigence technique et sens aigu de la responsabilité publique. En fédérant experts nationaux, représentants des agences onusiennes et acteurs du secteur privé, les travaux ont permis de jauger l’architecture sanitaire du pays à l’aune de l’Objectif de développement durable 3 qui érige le droit à la santé en priorité planétaire. Les diagnostics convergent : il s’agit moins de réinventer les fondamentaux que de consolider la gouvernance pour accélérer la mise en œuvre des réformes.
Financement durable : vers un nouveau pacte budgétaire
Par-delà les constats, les participants ont plaidé pour l’accroissement prévisible et soutenable des allocations budgétaires dédiées à la santé. L’engagement récent de l’État à consacrer une part croissante du produit intérieur brut aux dépenses sanitaires est salué par les économistes de la Commission de la CEMAC, qui soulignent la corrélation entre stabilité macroéconomique et gains d’espérance de vie. Le Conseil recommande, à court terme, la création d’un mécanisme de mutualisation des ressources domestiques et partenaires, afin de sécuriser le financement des programmes prioritaires – vaccination, lutte contre les maladies non transmissibles et couverture santé universelle. En complément, l’option d’eurobonds thématiques ou de partenariats public-privé ciblés sur les infrastructures hospitalières est ouverte, conformément aux orientations de la Banque africaine de développement.
Infrastructures et technicité : moderniser le maillage territorial
Le débat a ensuite porté sur l’impératif de modernisation des plateaux techniques, dans un contexte où la croissance démographique accroît la demande de soins spécialisés. Les experts convergent vers la revitalisation des districts sanitaires, pierre angulaire d’un système décentralisé capable d’absorber les chocs épidémiques. À Brazzaville comme à Pointe-Noire, des projets pilotes de télémédecine sont déjà en cours, appuyés par l’Organisation mondiale de la santé. Ces initiatives, adossées à des formations ciblées pour le personnel paramédical, devraient réduire les inégalités d’accès aux diagnostics de pointe. L’introduction de normes de certification hospitalière, fondées sur l’accréditation régionale, fait également consensus pour garantir la qualité et la sécurité des soins.
Partenariat public-privé : catalyseur d’innovation
Convaincus que l’atteinte de l’ODD 3 appelle une synergie inédite avec l’écosystème entrepreneurial, les membres du Conseil national de la santé ont salué les récentes concessions de gestion d’établissements spécialisés à des opérateurs privés. Ce modèle hybride, précisent-ils, doit pourtant rester adossé à un cadre réglementaire exigeant, afin de préserver l’accessibilité tarifaire. Le ministre Jean-Rosaire Ibara a insisté sur « l’audace de la concertation permanente », condition à ses yeux pour convertir l’expertise privée en bénéfice public (selon le ministre Jean-Rosaire Ibara). Les organisations de la société civile, associées aux débats, voient dans cette dynamique l’opportunité de renforcer la participation communautaire, gage de redevabilité.
Santé et climat : anticiper les nouveaux risques
Les inondations récurrentes sur le bassin du fleuve Congo et l’évolution du paludisme vers des zones autrefois épargnées rappellent combien la crise climatique met à l’épreuve les systèmes sanitaires. Les délégués ont validé le principe d’un observatoire national santé-climat, outil de veille épidémiologique et d’alerte précoce. Ce dispositif, interopérable avec les bases de données de l’Union africaine, permettra de croiser indicateurs météorologiques et morbidité, afin d’orienter rapidement les campagnes de prévention. La démarche répond également aux attentes des partenaires techniques qui souhaitent l’alignement des politiques nationales sur l’Accord de Paris.
Cadre juridique et responsabilité institutionnelle
Le Conseil a adopté un projet de décret révisant le texte fondateur de 1984 pour consolider la mission du Conseil national de la santé dans son rôle de vigie et de proposition. Cette révision clarifie la chaîne de décision, hiérarchise les priorités et formalise l’obligation de rapport annuel au Parlement, instrument clé pour résorber le gap informationnel entre experts et élus. Les constitutionnalistes présents saluent une avancée juridique qui conforte la séparation fonctionnelle entre conception stratégique et exécution technique.
Perspectives et responsabilités partagées
Au terme des discussions, la tonalité est à la mobilisation collective. Le ministère de la Santé réaffirme sa détermination à traduire les recommandations en politiques publiques concrètes, tout en invitant les bailleurs et le secteur privé à agir en partenaires responsables. La feuille de route issue de Brazzaville projette le Congo sur une trajectoire où efficacité administrative, innovation technologique et inclusion sociale se conjuguent. En creux, elle rappelle que la santé demeure un indicateur cardinal de stabilité et de crédibilité internationales. Les diplomates de la sous-région, attentifs aux signaux envoyés par la capitale congolaise, y voient l’esquisse d’un leadership sanitaire apaisé, capable de dialoguer avec la multiplicité des acteurs et de transformer les engagements multilatéraux en acquis tangibles pour les populations.