Un mécanisme bilatéral devenu référence régionale
Institué en 2010, le Contrat de désendettement et de développement illustre une ingénierie financière atypique : convertir des créances françaises en investissements durables au Congo. La formule, présentée par certains observateurs de la Banque africaine de développement comme un « laboratoire de partenariats vertueux », a déjà libéré 229 millions d’euros en trois cycles, soit près de 150,2 milliards de francs CFA réinjectés dans l’économie réelle congolaise.
Huitième COS : état des lieux des livrables
Réunis à huis clos le 10 juillet 2025, le ministre des Finances Christian Yoka et l’ambassadrice de France Claire Bodonyi ont dressé un bilan nuancé mais globalement positif. Treize projets et deux fonds d’études composent actuellement le portefeuille. Le drainage des eaux pluviales de Brazzaville, la formation des travailleurs sociaux et le programme Lisungi figurent déjà au tableau des réalisations, renforçant la résilience urbaine et la protection des couches vulnérables.
Les retombées ne se mesurent pas uniquement en infrastructures livrées. « Nous avons observé un transfert de compétences inédit vers les administrations congolaises », souligne un haut fonctionnaire du ministère de l’Aménagement du territoire. Cette dynamique nourrit la mise en place progressive d’un cadre de suivi-évaluation conforme aux standards internationaux.
Inflation des travaux publics : un casse-tête budgétaire
Comme sur la plupart des marchés africains, la flambée des matières premières et des coûts logistiques pèse sur les devis initiaux. Claire Bodonyi a exprimé des réserves quant à la capacité de certaines enveloppes « à couvrir l’intégralité des activités programmées ». Les études de contingence menées par le Trésor congolais font état d’une dérive moyenne de 18 % sur les chantiers routiers depuis 2022.
Cette pression incite le Comité à hiérarchiser les dépenses. Selon l’économiste Alphonse Goma de l’université Marien-Ngouabi, « la clef réside dans la consolidation des appels d’offres pour capter des économies d’échelle, sans céder sur la qualité ». Les partenaires envisagent également de mobiliser des co-financements multilatéraux afin de préserver la cohérence des programmes.
Cap sur le capital humain : Telema et Lisungi en vitrine
Le virage social revendiqué par Brazzaville se confirme. Le projet Telema, qui offre des appuis financiers aux familles précaires pour lancer des activités génératrices de revenus, focalise désormais l’attention. Les cinquante mille bénéficiaires initiaux de Lisungi, programme déjà salué par le PNUD pour son innovation, constituent un vivier prêt à être intégré dans Telema 2.0.
Christian Yoka insiste sur la dimension structurante de ces dispositifs : « L’investissement social est déterminant pour consolider la paix sociale et préparer la diversification économique ». Sur le terrain, les premières enquêtes montrent un taux de création d’entreprises féminines de l’ordre de 38 %, un signal encourageant pour l’autonomisation.
Diplomatie de la confiance et alignement stratégique
Au-delà des chiffres, la tenue régulière du COS témoigne d’une méthodologie de dialogue que certains diplomates qualifient de « co-gestion coopérative ». Paris y voit l’illustration d’un partenariat gagnant-gagnant, tandis que Brazzaville consolide sa crédibilité réformatrice auprès des bailleurs. Cette dynamique s’inscrit dans la stratégie nationale de développement 2022-2026, articulée autour de l’industrialisation, de la transition numérique et d’une gouvernance financière renforcée.
Le Congo projette déjà d’adosser ses prochaines requêtes au Fonds vert pour le climat et à la Banque mondiale, dans une logique d’effet de levier. L’alignement des objectifs C2D sur les ODD des Nations unies facilite la syndication des ressources, tout en maintenant la souveraineté décisionnelle congolaise.
Vers un futur cycle C2D : scénarios et marges de manœuvre
Les discussions exploratoires laissent entrevoir un quatrième cycle, possiblement orienté vers les agro-chaînes de valeur et la décarbonation du mix énergétique. Les équipes techniques évaluent la possibilité d’introduire des instruments de financement verts, tel le swap dette-climat, afin de capter la finance durable.
Si la conjoncture internationale reste incertaine, la gouvernance du programme apparaît solide. L’exigence d’une priorisation plus fine, d’une transparence accrue et d’une implication systématique des collectivités locales ressort comme leitmotiv des recommandations adoptées. En filigrane, la relation bilatérale s’affirme, attentive aux impératifs sociaux et résolument tournée vers un développement inclusif.