Une coopération qui s’affirme dans la durée
En conviant, du 30 juin au 3 juillet 2025, une quarantaine de cadres de l’Institut national de la jeunesse et des sports dans la capitale congolaise, le ministère de la Jeunesse et l’UNESCO ont manifesté leur volonté d’inscrire la prévention de la délinquance juvénile parmi les priorités structurelles de l’action publique. L’initiative, placée sous l’égide du directeur de cabinet du ministre, Charles Makaya, s’appuie sur une relation de confiance déjà éprouvée avec l’organisation onusienne, représentée sur place par Brice Kamwa Ndjatang. Celui-ci n’a pas manqué de rappeler que la formation continue des personnels constitue « un investissement stratégique pour la stabilité du vivre-ensemble et le développement durable » (UNESCO, 2025).
Alors que les crises économiques et sécuritaires de la dernière décennie ont accentué la vulnérabilité d’une frange de la jeunesse continentale, Brazzaville entend, en mettant l’accent sur le sport-éducation, offrir à ses citoyens en devenir un horizon d’inclusion. La démarche converge avec la feuille de route gouvernementale, notamment la création récente de l’Agence nationale d’insertion et de réinsertion sociale des jeunes ainsi que l’ouverture du centre spécialisé d’Aubeville, dans le département de la Bouenza.
Sport et pédagogie comme leviers de résilience sociale
Le choix de l’INJS comme plateforme de formation n’est pas anodin. L’institution, héritière d’une tradition où l’éducation physique côtoie l’engagement civique, dispose d’un réseau d’influence qui s’étend des lycées aux fédérations sportives régionales. En renforçant la capacité d’écoute psychosociale de ses encadrants, l’atelier mise sur un socle empirique : le sport, lorsqu’il est mobilisé dans un cadre structuré, facilite l’acquisition de compétences comportementales telles que la maîtrise de soi et l’esprit d’équipe, deux antidotes reconnus aux conduites déviantes.
Les intervenants ont ainsi décortiqué les mécanismes d’entrée en délinquance à travers l’analyse de trajectoires individuelles, avant de proposer des réponses éducatives graduées. L’accent a été mis sur les approches sensibles au genre, rappelant que les filles et les jeunes femmes subissent souvent une double vulnérabilité, exposées à la fois à la violence communautaire et aux discriminations sociales.
Alignement avec le Plan national de développement 2022-2026
Sur le plan programmatique, la session de juillet s’inscrit dans la dynamique du PND 2022-2026, qui fait de l’inclusion sociale et de la justice de genre un axe transversal. Les facilitateurs internationaux ont insisté sur l’importance d’objectifs mesurables pour assurer la cohérence avec les cibles 4.7 et 5.2 des Objectifs de développement durable. Dans cette perspective, les participants ont été initiés à la conception d’indicateurs capables de traduire un changement de comportement, qu’il s’agisse d’une baisse des incivilités dans les établissements ou d’une amélioration du taux de réinsertion après un passage par l’appareil judiciaire.
Le dialogue permanent entre les ministères de la Jeunesse, de la Justice, de l’Éducation et de la Santé est considéré comme une condition sine qua non. Charles Makaya l’a rappelé avec fermeté : « Sans articulation intersectorielle, nos efforts resteraient ponctuels. »
De la théorie à la pratique : vers un accompagnement de proximité
Au-delà de la formation, l’enjeu réside désormais dans la traduction des apprentissages en dispositifs concrets. Il est prévu de structurer, dans chaque département, des comités socio-éducatifs rattachés à l’INJS. Ceux-ci auront pour mission d’identifier les signaux faibles de décrochage, de proposer un suivi individualisé et de mobiliser les familles autour de projets de vie centrés sur le potentiel de chaque jeune.
Cette approche humaniste repose sur un triptyque : écoute, médiation, réinsertion. En premier lieu, l’écoute active doit prévenir la stigmatisation. Ensuite, la médiation, inspirée de la justice réparatrice, permettra de restaurer les liens entre le mineur en conflit avec la loi et sa communauté. Enfin, la réinsertion passera par des passerelles vers la formation professionnelle, l’entrepreneuriat social ou les filières sportives d’excellence.
Un outil diplomatique au service de la cohésion nationale
Dans l’écosystème des partenaires, l’UNESCO voit dans l’initiative congolaise un laboratoire de bonnes pratiques exportables. L’organisation rappelle que la délinquance juvénile n’est en rien une fatalité ; elle résulte d’un déficit d’opportunités et d’un manque de cadres structurants. En plaçant la jeunesse au cœur de l’agenda diplomatique, Brazzaville consolide également sa position au sein des forums africains consacrés à la prévention des conflits.
Les observateurs notent que le gouvernement congolais, loin de se contenter d’un discours prescriptif, s’emploie à financer les volets opérationnels des programmes. Cette volonté politique, souvent saluée par les partenaires bilatéraux, contribue à renforcer l’image d’un État acteur et non spectateur des transformations sociales.
Cap sur 2030 : consolider les acquis et anticiper
Alors que l’horizon 2030 constitue un jalon décisif pour l’évaluation des ODD, les cadres formés à Brazzaville sont appelés à jouer un rôle de courroie de transmission. Leur feuille de route inclut la conduite d’enquêtes de terrain semestrielles, la publication de rapports d’impact et l’adaptation continue des modules pédagogiques aux réalités locales. Cette exigence de redevabilité répond à la fois aux standards internationaux et aux attentes d’une population en quête de résultats tangibles.
À l’issue de la session, Brice Kamwa Ndjatang a souligné la détermination des participants à « faire de la jeunesse congolaise un moteur de paix et de créativité ». Son propos résonne avec la vision des autorités, qui placent la cohésion nationale au rang de priorité diplomatique. Dans un contexte régional fluctuant, la mise en synergie du sport, de l’éducation et de la politique sociale apparaît, pour Brazzaville, comme une réponse calibrée aux défis de demain.