Un jalon énergétique au cœur de la stratégie congolaise
En paraphant à Pointe-Noire un contrat d’approvisionnement électrique dédié à la Zone économique spéciale, le ministre des Zones économiques spéciales et de la Diversification économique, Jean-Marc Thystère Tchicaya, a donné corps à l’une des promesses les plus attendues par les investisseurs : la disponibilité d’une énergie stable et compétitive. Conclu en présence du ministre de l’Énergie et de l’Hydraulique, Émile Ouosso, de la direction de la Centrale Électrique du Congo et de la société Plateformes Industrielles du Congo/Pointe-Noire, l’accord illustre la volonté de l’exécutif de doter la vitrine industrielle du pays d’infrastructures conformes aux standards internationaux, préalable indispensable à tout essor manufacturier durable.
Énergie et compétitivité industrielle à l’unisson
Le texte, qui garantit une fourniture continue de plusieurs dizaines de mégawatts, répond aux exigences de fiabilité formulées par les sidérurgistes, cimentiers et agro-transformateurs potentiels. Dans un environnement régional où les coupures demeurent fréquentes, la sécurisation de l’électricité apparaît comme un facteur différenciant majeur. « La certitude d’un courant sans interruption réduit le coût de production de 15 à 20 % selon nos simulations », confie un consultant basé à Douala, appelé comme expert lors des négociations. Le gouvernement compte ainsi stimuler la substitution aux importations et renforcer la balance commerciale non pétrolière, objectif rappelé à plusieurs reprises par le président Denis Sassou Nguesso lors de ses allocutions sur la diversification.
Une architecture contractuelle pensée pour la durabilité
Au-delà du volume, l’ingénierie contractuelle retient l’attention des observateurs. Indexé partiellement sur le prix du gaz associé exploité au large des côtes congolaises, le tarif vise à préserver la compétitivité sur le long terme tout en offrant aux producteurs d’électricité une visibilité favorable à l’amortissement des investissements. Les signataires soulignent la clause de revue quinquennale appelant à réévaluer la grille afin d’intégrer les mutations technologiques, notamment l’émergence progressive du solaire et de l’hydrogène vert dans le mix national. Cette flexibilité inscrite dans le texte reflète la recherche d’un équilibre entre prudence budgétaire et ambitions de décarbonation affichées lors de la COP27.
Synergies régionales et diplomatie économique
La mise sous tension de la ZES intervient alors que Pointe-Noire renforce ses liaisons maritimes avec l’Afrique australe et l’Asie, grâce à un port en eau profonde modernisé. Pour l’entourage du ministre des Affaires étrangères, cette articulation entre énergie, logistique et cadre incitatif illustre une diplomatie économique désormais centrée sur la création de chaînes de valeur transfrontalières. Les discussions avancées avec la Banque africaine de développement pour cofinancer des interconnexions électriques vers la République démocratique du Congo et l’Angola pourraient, à moyen terme, transformer la ZES en hub d’exportation régional. Le contrat signé devient ainsi un argument de poids dans les roadshows organisés auprès des fonds souverains du Golfe.
Les défis de la montée en puissance logistique
La concrétisation du projet n’occulte pas les défis. Certains opérateurs pointent la nécessité d’accélérer la formation de techniciens locaux capables de maintenir des équipements haute tension et de respecter les protocoles HSE. Dans un rapport remis en mai, la Chambre de commerce européenne évoque également le coût des servitudes foncières périphériques et la fluidité encore imparfaite des douanes. Le gouvernement assure que l’Agence pour la transition numérique finalisera cette année la plateforme unique de dédouanement, réduisant les délais d’acheminement des pièces importées. Une attention particulière est enfin portée à la résilience climatique : les ouvrages sont conçus pour résister aux fortes précipitations qui caractérisent la côte atlantique.
Perspectives pour la diversification sous l’ère Sassou Nguesso
En connectant durablement la ZES de Pointe-Noire au réseau national, Brazzaville consolide l’un des piliers de sa politique de diversification et signale aux acteurs privés la priorité accordée aux impératifs productifs. L’effet d’entraînement espéré sur les PME est loin d’être anodin : le ministère anticipe près de 15 000 emplois directs d’ici à 2027 et une contribution additionnelle de deux points de PIB. Pour les diplomates en poste dans la capitale, le message est clair : le Congo, longtemps tributaire des hydrocarbures, entend désormais exporter des barres d’acier, des fertilisants et des produits agroalimentaires. Le contrat d’électricité n’est donc pas qu’un simple accord technique ; il cristallise une vision portée par le président Denis Sassou Nguesso, celle d’un pays qui ancre sa souveraineté économique dans la transformation locale de ses ressources, tout en demeurant ouvert aux partenariats internationaux.