Pointe-Noire au cœur de la diplomatie économique congolaise
Ville-pilier de l’économie nationale, Pointe-Noire concentre plus de 80 % des flux d’import-export du Congo-Brazzaville. C’est donc sans surprise que Christian Yoka, nouveau titulaire du portefeuille des Finances, du Budget et du Portefeuille public, a choisi le littoral atlantique pour sa première tournée de terrain hors de la capitale. L’agenda, condensé sur deux jours, n’avait rien de cérémoniel : il s’agissait de mesurer in situ la capacité des régies à sécuriser les recettes dans un contexte de reprise post-pandémie et de transition énergétique mondiale.
Les douanes départementales, nerf de la mobilisation fiscale
Première étape, la direction départementale des douanes, qualifiée de « poumon économique » par le ministre lui-même. Derrière la façade modernisée, les indicateurs restent en demi-teinte : un taux de recouvrement en deçà des projections semestrielles et des remontées récurrentes d’irrégularités dans la cotation des valeurs. « Nous devons préserver la réputation de la douane, garante de l’équité concurrentielle », a martelé Christian Yoka, rappelant qu’une administration fiscale performante constitue la colonne vertébrale de toute diplomatie économique crédible. Conjuguant fermeté et pédagogie, il a annoncé la suspension immédiate des agents pris en flagrant délit de fraudes, tout en insistant sur la nécessité de renforcer la motivation statutaire du personnel par des rétrocessions plus régulières.
Synergies entre infrastructures stratégiques et recettes publiques
La visite s’est ensuite étendue au Guichet unique des opérations transfrontalières, à la Centrale électrique du Congo, au port autonome, au Chemin de fer Congo-Océan et au Conseil congolais des chargeurs. Ces entités forment l’ossature logistique d’un corridor qui irrigue non seulement le marché intérieur, mais également la sous-région CEEAC. Pour le ministre, la performance douanière ne peut se concevoir isolément : elle dépend de la fluidité ferro-portuaire, de la délivrance rapide des documents au guichet unique et de la stabilité de l’approvisionnement énergétique. En mobilisant leurs directions générales à huis clos, il a encouragé la mise en place d’indicateurs partagés de productivité afin d’aligner la gestion des flux physiques et la captation des recettes.
Gouvernance financière et impératifs de confiance internationale
L’enjeu dépasse la comptabilité domestique. Pointe-Noire, notée par les agences de sûreté maritime comme l’un des terminaux les plus dynamiques du Golfe de Guinée, demeure scrutée par les bailleurs multilatéraux qui conditionnent leurs concours à la transparence des procédures douanières. Christian Yoka, conscient de cette dimension, a réaffirmé l’engagement du Congo à respecter les standards de l’Organisation mondiale des douanes et à digitaliser l’intégralité de la chaîne de déclaration avant 2025. Cette convergence normative doit, selon lui, rassurer investisseurs et États partenaires, notamment dans le cadre des mises en marché futures du gaz et des minerais dits « de transition ».
Vers une consolidation du pacte entre administration et secteur privé
Au terme de la tournée, le ministre a insisté sur la coproduction de la performance. Aux agents publics, il a demandé exemplarité et discipline ; aux opérateurs privés, il a rappelé leurs obligations déclaratives, tout en promettant l’allégement des tracasseries administratives grâce au guichet unique. La démarche, subtilement équilibrée, vise à transformer un rapport parfois conflictuel en partenariat fondé sur la confiance et la réciprocité des gains. Dans un pays qui ambitionne de porter la part des recettes hors hydrocarbures à 30 % du budget d’ici 2026, la feuille de route de Pointe-Noire fait figure de test grandeur nature. Laissons au temps – et aux résultats trimestriels – le soin de mesurer la portée des engagements pris sur le rivage atlantique.