Un jalon énergétique dans le contexte post-privatisation
L’histoire de la station-service de Boko épouse les inflexions du secteur congolais des hydrocarbures depuis la vague de privatisations du début des années 2000. Transférée d’Hydro-Congo à X-Oil Congo en 2002, l’infrastructure était demeurée en veille, reflet d’une période où les capitaux privés hésitaient encore à s’aventurer hors des grands centres urbains. Sa relance officielle, présidée par l’administratrice-maire Pradesh Nerva Elenga, vient donc matérialiser la volonté affichée par les autorités de conjuguer expansion économique et rééquilibrage territorial.
Modernisation des installations et exigences de sécurité
Selon le responsable Projets de X-Oil Congo, Jean-Edouard Bambote, le site a bénéficié d’un réaménagement conforme aux normes pétrolières régionales : équipement de trois pompes calibrées, piste de dépotage double sens de 850 m², quatre cuves enterrées totalisant 35 m³ et mise en place d’un bâtiment commercial de 135 m². Ces choix techniques traduisent, d’une part, la montée en gamme des standards environnementaux exigés par la Direction générale des hydrocarbures et, d’autre part, la recherche de synergies logistiques avec le corridor routier reliant Brazzaville à Kinkala.
Catalyseur économique pour l’agriculture et le petit commerce
Dans un district où la quasi-totalité des exploitants cultivent encore à faible rendement, l’accès régulier au carburant change la donne. « Nos agriculteurs n’auront plus à parcourir des dizaines de kilomètres pour se ravitailler ou écouler leurs récoltes », souligne le gérant Lardry Herz Koutiki, lui-même originaire de Boko. Le gain de temps réduit le coût de transport des maniocs, arachides et fruits vers les marchés de Kinkala et Madzia, tout en offrant une bouffée d’oxygène aux mototaxis et aux petits commerçants qui irriguent l’économie informelle locale.
Création d’emplois et cohésion territoriale
Les projections initiales tablent sur quinze emplois directs, auxquels s’ajoutent des postes induits dans la maintenance, la restauration et la vente de produits de première nécessité adossés à la station. Pour l’administratrice-maire, « ce n’est pas simplement une réouverture, c’est le début d’un nouveau chapitre pour Boko ». L’argument trouve un écho dans la feuille de route gouvernementale qui fait du développement des chaînes de valeur locales un pilier du Plan national de développement 2022-2026. L’initiative participe en outre à consolider la paix sociale dans le Pool, région longtemps pénalisée par des fragilités socio-politiques.
Un modèle d’entreprise citoyenne salué par les partenaires
La directrice des ventes, Raïssa Aït Bongouandé, insiste sur la notion d’« acteur présent, fiable et utile au cœur des territoires ». La banque publique BGFIBank, partenaire financier du projet, confirme un mécanisme de microcrédits destiné aux transporteurs locaux cherchant à renouveler leur flotte grâce à l’assurance d’un approvisionnement régulier. Le Programme des Nations unies pour le développement, observateur lors de la relance, y voit un exemple reproductible pour stimuler la résilience des zones rurales face aux chocs exogènes, du climat aux fluctuations des cours internationaux.
Perspectives d’intégration régionale et durabilité
Dans un second temps, X-Oil prévoit l’installation de panneaux solaires visant à auto-alimenter le site et réduire l’empreinte carbone de ses opérations, démarche alignée sur la contribution déterminée au niveau national du Congo relative à l’Accord de Paris. L’idée est également d’envisager Boko comme une étape logistique vers la République démocratique du Congo, dont certains flux transfrontaliers passent déjà par les pistes du Pool. À terme, la petite station pourrait donc devenir un nœud d’intégration économique, illustrant le potentiel des partenariats public-privé lorsqu’ils sont inscrits dans une vision de long cours.
Un signal politique subtilement positif
La cérémonie, sobre mais très suivie, a finalement envoyé un message clair : loin de se limiter aux grands chantiers d’infrastructures, le gouvernement entend encourager les initiatives capables de transformer le quotidien des citoyens. La relance de Boko concilie pragmatisme économique et impératif de cohésion nationale, rappelant que la diplomatie du développement se joue parfois à l’échelle d’une pompe à essence.