Départ symbolique depuis l’aéroport Maya-Maya
Sous une pluie fine matinale, soixante-trois étudiants congolais ont franchi, mercredi 30 octobre, les portes de l’aéroport Maya-Maya pour embarquer sur un vol à destination d’Alger. Leur départ marque la nouvelle phase d’un programme de bourses conjoint entre Brazzaville et Alger.
La ministre de l’Enseignement supérieur, le Pr Delphine Edith Emmanuel, a personnellement accompagné le groupe jusqu’au hall d’enregistrement, rappelant à chacun l’« obligation de résultats » qui pèse sur eux. « Revenez diplômés et engagés pour la construction du Congo », leur a-t-elle lancé, sourire aux lèvres.
Une coopération académique Brazzaville-Alger renforcée
Aux côtés de la ministre se tenait l’ambassadeur d’Algérie au Congo, Azeddine Riache. Pour le diplomate, l’extension du quota à plus de soixante bourses pour l’année académique 2025-2026 illustre « la vision panafricaine de l’Algérie et son attachement à l’Afrique du savoir ».
Les domaines retenus sont stratégiques : informatique, architecture, médecine, mathématiques ainsi que sciences et technologie. Ces filières répondent, selon le ministère, aux besoins immédiats de développement du Congo, notamment dans la santé, le bâtiment durable et la transformation numérique de l’administration.
Sélection rigoureuse et préparation culturelle
À Brazzaville, la sélection a pris six mois, mêlant tests académiques, entretien de motivation et vérification de l’aptitude linguistique. Seuls les candidats ayant obtenu une moyenne générale supérieure à 13/20 et la recommandation de leur faculté d’origine ont finalement été retenus.
Avant le départ, les boursiers ont suivi deux semaines d’initiation culturelle dispensée par l’Institut des langues. Au programme : histoire contemporaine algérienne, rudiments d’arabe dialectal et module de vie collective afin de favoriser leur intégration rapide sur les campus d’accueil.
Ambitions des boursiers congolais
Âgé de 22 ans, Jordy Mankessi, futur étudiant en génie logiciel à l’université de Constantine, confie qu’il entend « revenir lancer une start-up de cybersécurité dès l’obtention du diplôme ». Comme lui, beaucoup voient la bourse comme un tremplin et non un exil.
Pour les parents, l’émotion dominait dans la salle d’embarquement, mais aussi la fierté. « Nous savons que le gouvernement veille à leur sécurité et à la régularité des transferts de bourse », glisse Cécile Ngoma, mère d’une étudiante en médecine, le regard rivé sur la passerelle.
Les fondations d’un partenariat durable
L’accord intergouvernemental signé en 2014 prévoyait initialement vingt places. Son évolution permanente reflète, selon la direction de la coopération universitaire, la confiance mutuelle et la stabilité institutionnelle des deux pays. Les dossiers financiers sont désormais traités par guichet unique pour accélérer les procédures.
Du côté algérien, les universités participantes annoncent avoir réservé des logements au sein des cités universitaires et mis en place un tutorat. « Le succès des étudiants congolais est aussi le nôtre », souligne un responsable de l’université d’Oran, rappelant les liens historiques entre les deux États.
Suivi des diplômés et impact économique
À terme, le ministère envisage de formaliser un réseau d’alumni afin de suivre le parcours des diplômés revenus au pays. Le dispositif permettra d’évaluer l’impact réel des bourses sur la productivité nationale et de mieux orienter les prochaines offres de formation.
Selon les statistiques officielles, plus de 1 200 Congolais poursuivent actuellement des études supérieures à l’étranger grâce à des accords bilatéraux similaires, dont près d’un tiers en Afrique du Nord. Les autorités y voient la preuve que la mobilité Sud-Sud gagne en pertinence.
Le coût moyen d’une bourse, estimé à 6 000 dollars par an, couvre les frais universitaires, l’hébergement, l’assurance maladie et un ticket de transport annuel. Un fonds spécial, alimenté par le Trésor public, garantit la régularité des paiements et évite les retards souvent décriés par le passé.
Liens avec le secteur privé national
Pour renforcer l’impact local, le ministère négocie déjà avec plusieurs entreprises nationales qui pourraient accueillir en stage, puis recruter, les lauréats dès leur retour. La Chambre de commerce s’est dite prête à créer un guichet « ingénieurs et médecins formés en Algérie ».
Guide pratique et représentation du Congo
Dans l’avion, chacun a reçu un guide de l’étudiant congolais en Algérie édité par les deux ambassades. Le livret recense conseils pratiques, numéros d’urgence et informations sur le climat, prévenant aussi sur l’importance de respecter les différences culturelles pour mieux représenter le pays.
Perspectives d’expansion du programme
Au moment où l’avion a décollé, la salle a éclaté en applaudissements brefs, symboles d’espoir partagé. Le gouvernement promet de poursuivre l’expansion de ces programmes, convaincu que chaque départ contrôlé prépare un retour utile et participatif au projet de développement national.
Les universités de Brazzaville profiteront également de cette coopération, grâce à des accords de doubles diplômes actuellement en discussion. Le principe permettrait aux étudiants algériens de venir passer un semestre dans la capitale congolaise, échange susceptible de dynamiser la recherche conjointe et la publication scientifique.
À l’horizon 2030, les autorités projettent de tripler le nombre de bénéficiaires totaux, tout en privilégiant les filières liées aux énergies renouvelables et à l’agro-industrie. « Former sur place ou dans un pays frère, c’est toujours investir dans l’avenir du Congo », résume un haut cadre du ministère.
